- C3
- J4
- Guimarães-Marseille (1-0)
Tonton flingué
Pris en grippe depuis des mois, Patrice Évra a dégoupillé pendant l'échauffement en collant un high kick à un supporter marseillais.
Il devait simplement cirer le banc des remplaçants. Relégué au rang de bouche-trou depuis la prise de pouvoir de Jordan Amavi dans le couloir de gauche de l’Olympique de Marseille, Patrice Évra ne faisait pas partie des plans de Rudi Garcia ce jeudi soir. Encore une fois. Et pourtant, malgré la défaite pitoyable de l’OM contre le Vitória Guimarães, on retiendra forcément cette image. Celle d’un homme excédé, avant même le coup d’envoi. À l’échauffement, l’ancien joueur de Manchester United est victime de chants hostiles et d’insultes pendant plus d’une demi-heure de la part des supporters marseillais. Il tente d’aller s’expliquer avec les principaux intéressés, qui sautent par-dessus la balustrade. Il craque complètement et, à l’image d’Éric Cantona il y a quelques années, envoie un high kick dans la tronche de l’un de ses détracteurs. Un geste impardonnable, injustifiable. La conséquence d’un trop-plein de méchancetés gratuites à son encontre, aussi.
L’apothéose du malaise
C’est un fait, Patrice Évra affiche un niveau de jeu plus que moyen depuis son arrivée à l’Olympique de Marseille. Après un Euro 2016 sur la corde raide, l’ancien capitaine de l’équipe de France ne cesse de régresser. Normal, à 36 ans, le latéral gauche qui a construit sa carrière sur le combat physique, l’explosivité, et une activité incessante dans son couloir ressent logiquement le poids des années. Souvent pris de vitesse par ses adversaires directs et incapable de tenir 90 minutes, Tonton Pat’ n’est plus que l’ombre de lui-même. C’est une évidence, un constat froid. Mais mérite-t-il pour autant toutes ces railleries ? Ancien capitaine de Sir Alex Ferguson, quadruple finaliste de la Ligue des champions, Évra est surtout un homme qui, quoi qu’on en pense, a envie de rendre service à l’OM, sans rien demander en retour. Relégué au rang de simple doublure sur le terrain, de piñata en dehors, Pat’ souffre de cette situation depuis des semaines, mais ne veut pas le montrer dans la presse, pour ne pas nuire au groupe.
Tête de Turc
Depuis le désastre de Knysna, Évra jouit d’une image désastreuse en France, malgré la confiance que lui a accordée Didier Deschamps depuis. Pourtant, il a pris le risque de revenir au pays et d’affronter les critiques acerbes des observateurs. Quitte à se complaire, il est vrai, dans son personnage de rebelle sur Twitter comme dans les médias. Sauf que depuis son arrivée à l’OM, tout le monde semble guetter le moindre faux pas, la moindre occasion de le pointer du doigt. Et ce jeudi soir, ce sont les supporters de l’OM en personne qui s’en sont pris à lui. Alors que, outre son niveau de jeu moyen, il n’a jamais manqué de respect à l’institution marseillaise. Caché derrière ses vidéos débiles, il masque depuis des mois son mal-être et, cette fois-ci, le masque est tombé. Patrice a craqué, maladroitement, comme tout humain aurait pu le faire. À commencer par ceux qui passent leurs matchs à l’insulter et qui viennent ensuite jouer les vierges effarouchées. Encore une fois, un tel geste est condamnable et pourrait avoir raison de sa fin de carrière. Éric Cantona avait pris neuf mois de suspension, par exemple. À 36 ans, Patrice Évra ne s’en remettrait pas. Le club, tellement soucieux de son image, pourrait prendre lui-même des sanctions exemplaires. Tonton Pat’ qui se retire sur un coup de sang, ce serait beau, mais tellement triste à la fois.
Par Kevin Charnay