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Tommy Stroot, le loup de Wolfsburg

Par Florian Porta
5 minutes

Il a 34 piges, pas la moindre ride, une houppette façon Tintin et un faux air de Julian Nagelsmman. Lui, c'est Tommy Stroot, l'entraîneur des féminines de Wolfsburg, et il s'apprête, déjà, à vivre sa première finale de Ligue des champions ce samedi soir.

Tommy Stroot, le loup de Wolfsburg

On n’est encore qu’au mois de février lorsque Pep Guardiola et ses hommes, voyant le thermomètre s’affoler du côté de Londres, décident de venir refroidir l’Emirates Stadium. Deux bons mois plus tard, le printemps a désormais allègrement pointé le bout de son nez, et pourtant, les températures ne décollent toujours pas dans la capitale anglaise. Promis, le Catalan n’y est pour rien. Cette fois, ce sont Tommy Stroot et ses filles du VfL Wolfsburg qui viennent de glacer Arsenal à la 119e d’une demie retour de Ligue des champions. Du haut de ses 34 berges, et pendant que Julian Nagelsmann, l’autre « Wunderkind » des bancs de touche, pointe à Pôle Emploi, l’entraîneur allemand compte bien terminer le boulot et mener les Louves vers un troisième sacre européen, neuf ans après le dernier conquis face au Tyresö Fotbollsförening. Retour sur une ascension fulgurante.

« Je veux aller travailler en jogging »

Sa carrière d’entraîneur, Tommy Stroot la commence très tôt. « J’ai entraîné mon petit frère quand il avait 12 ans et moi 15, rembobinait-il dans les colonnes de Sportbuzzer. Lors du premier match, j’ai été totalement surpris de devoir payer les arbitres. Je me suis retrouvé là avec mes 20 euros d’argent de poche et j’étais content qu’il y ait encore quelques parents sur le terrain pour donner un coup de main. » Une mésaventure qui ne le refroidit pas, loin de là : « À l’époque, j’ai dit à mes parents : “Je veux aller au travail en jogging !” Je voulais faire quelque chose en rapport avec le football à plein temps. » Ça tombe bien, les filles du FSG Twist, qui partagent le même terrain d’entraînement que son frangin, recherche des bras pour coacher, il y devient adjoint et commence son aventure avec le football féminin. À tout juste 18 ans, il part finalement frapper à la porte du SV Victoria Gernsten, dont la section féminine et Stroot avec seront absorbés par le SV Meppen en 2011.

« Tommy était devant un court de squash et a attendu que je finisse. Il m’a ensuite dit qu’il voulait se perfectionner en tant qu’entraîneur et demandé s’il pouvait faire un stage. Je lui ai évidemment dit qu’il pouvait venir. Lors des premières séances, on a tout de suite vu qu’il était très sérieux, très ambitieux et très travailleur », rejoue Maria Reisinger, directrice technique de la section féminine des Bleu et Blanc. Il prend en mains les U17, toujours du côté féminin, et décroche un titre de champion d’Allemagne, face à Wolfsburg, déjà, avant d’atterrir sur le banc de l’équipe première, en deuxième division, à seulement 25 balais. « Après mes douze années à la tête de l’équipe, il m’a succédé en tant qu’entraîneur, ce qui n’a pas toujours été facile. De nombreuses joueuses étaient là depuis plus longtemps et étaient beaucoup plus âgées. Mais elles ont vite compris que ce n’était pas l’âge, mais la qualité qui était déterminante », rappelle Reisinger. Quatre saisons plus tard et alors qu’il hésite à laisser de côté sa carrière naissante pour retourner à son job de physiothérapeute pour les personnes lourdement handicapées, le FC Twente le convainc, à l’été 2016, de franchir la frontière et de venir s’installer à Enschede : « Je ne pouvais pas dire non à une telle opportunité à l’étranger. »

« Une véritable éponge  »

Débarqué du côté des Tukkers trois mois plus tard en tant que directeur technique de la section féminine, René Roord se souvient : « J’ai vu, à ce moment-là, que c’était un jeune entraîneur qui débutait au sein d’un grand club. Il a donc dû apprendre beaucoup de choses. » Plutôt logique tant la marche à franchir est importante, entre le niveau de jeu et la découverte d’une nouvelle langue. Le père de Jill, internationale néerlandaise formée au club d’Enschede et membre de l’équipe première lors du passage de Stroot, enchaîne : « Il voulait tout le temps apprendre, c’est un très bon auditeur. Il tenait compte de l’opinion de tout le monde pour s’améliorer, c’est une véritable éponge. Je me rappelle, tous les lundis matin, il venait prendre un café dans mon bureau et il voulait discuter du dernier match, de football et de tout ce qui s’y rapporte. » Et sur le terrain, comment est perçue sa jeunesse ? « Sans le connaître, j’avais tendance à dire que c’était un défaut, confesse Angeline Da Costa passée par le FC Twente en 2018. Il ne faut pourtant que peu de temps à Tommy Stroot pour convaincre la Fanco-Portugaise qui évolue désormais au SC União Torreense : « Mes interactions étaient limitées à cause de la barrière linguistique, mais on essayait toujours d’échanger un maximum. Lui et ses adjoints se préoccupaient beaucoup du bien-être des joueuses. J’ai tout de suite compris que c’était un entraîneur fait pour le haut niveau et qu’il allait rapidement grandir. Il était très jeune et déjà très performant. »

Il suffit en effet de jeter un œil à ses résultats pour s’en rendre compte. Durant ses cinq saisons passées au pays des tulipes, le blondinet décroche la timbale à deux reprises, en 2019 et 2021, et termine deuxième en 2017 et 2018 (l’exercice 2019-2020 ayant été annulé à la suite de l’apparition du Covid-19). Il profite également de son séjour néerlandais pour découvrir la Ligue des champions. Une expérience plus douloureuse, puisque son FC Twente se fait gifler, à deux reprises, en huitièmes : 5-0 en cumulé par le Barça en 2016 puis 7-0 par… Wolfsburg en 2019. Alors quand les Louves lui proposent de prendre la suite du démissionnaire Stephan Lerch à l’été 2021, le natif de Nordhorn saute sur l’occasion et franchit à nouveau la frontière pour rentrer au bercail. « Une étape logique » pour René Roord qui voit sa fille prendre la même destination. Un titre en Bundesliga et une Coupe d’Allemagne plus tard, voilà le technicien de 34 piges et sa bande de Louves en finale de Ligue des champions face au FC Barcelone.  Maria Reisinger ne s’attendait pas à le retrouver si haut : « On ne pouvait absolument pas le prévoir à l’époque, je suis d’autant plus heureuse maintenant ! Une fierté totale ! » L’ancien milieu néerlandais, lui, n’en a jamais douté : « En général, c’est difficile d’arriver en finale, mais non, je ne suis pas surpris, il se débrouille très bien. » Hasard du calendrier, celle-ci aura lieu sur des terres qu’il connaît bien, du côté d’Eindhoven, où, comme il le confiait à l’UEFA, il a de « très bons souvenirs. » Reste à savoir si ce samedi 3 juin en fera désormais partie.

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Par Florian Porta

Tous propos recueillis par FP, saut ceux de Tommy Stroot.

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