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Tolgay Arslan, le bruit et la fureur

Par Julien Duez
Tolgay Arslan, le bruit et la fureur

Battu 5-0 à Munich, le Beşiktaş Istanbul aura besoin d’un miracle pour tenter de se qualifier pour les huitièmes de finale de la Ligue des champions. Au sein de l’effectif stambouliote, le milieu de terrain Tolgay Arslan est peut-être celui qui connaît le mieux les Munichois. Et pour cause : ce natif de Paderborn les a affrontés pendant quatre ans lorsqu'il jouait en Bundesliga avec Hambourg.

Au match aller, Tolgay Arslan n’est entré en jeu qu’à cinq minutes du terme, en remplaçant Gary Medel. Suffisant pour voir Robert Lewandowski claquer son doublé dans les arrêts de jeu et pester contre cette manita qui a gâché tous les espoirs de qualification du Beşiktaş. Enfin, presque tous. Car Arslan en est convaincu, au match retour, les Bavarois devront passer l’épreuve du feu, comprenez survivre au public du Vodafone Park, si bruyant qu’il avait envoyé Timo Werner chez l’ORL pendant la phase de poules. « Il faut avoir vécu cette atmosphère, on ne peut la décrire avec des mots, explique-t-il ainsi à Sport Bild. Nos fans sont incroyables. Tu as le sentiment que tu ne peux pas perdre parce que tu es en supériorité numérique. Aucun spectateur n’est assis, tous sont debout. Il n’y a pas de kop spécifique, le stade entier est un kop. »

Talent précoce

Que de chemin parcouru depuis les débuts du gamin de Rhénanie dans les années 1990, où son talent est très rapidement détecté par le Grün-Weiß Paderborn. « Tolgay était bien meilleur que les autres, se souvient André Hartmann, son pote et coéquipier chez les U7. Au coup d’envoi, je lui passais le ballon et il déposait cinq ou six joueurs avant de marquer un but. Si j’étais chanceux, il centrait pour moi et j’avais l’autorisation d’en marquer un. Il y a même eu des matchs où on gagnait 20-0 avec dix pions de lui ! »

Pareil talent ne pouvait échapper au viseur du mastodonte local : le Borussia Dortmund. Tolgay Arslan y gravit les échelons petit à petit, mais reste habiter chez ses parents à Paderborn, situé à une centaine de kilomètres. Son père Ehran se charge de le conduire aux entraînements, non sans assidûment surveiller ses résultats scolaires, condition parentale sine qua non pour poursuivre ses rêves footballistiques : « Si ses notes avaient baissé, son père n’aurait pas hésité à le désinscrire du BvB, poursuit André Hartmann.Mais Tolgay était déterminé. Dans la voiture, il avait toujours ses livres avec lui pour étudier sur le trajet. »

Hambourg, amour puis désamour

En 2009, auréolé du titre de meilleur buteur de Bundesliga U19 avec le BvB, Arslan choisit pourtant de quitter la Ruhr pour les bords de l’Elbe. Direction le HSV et la garantie d’intégrer le noyau A, chose que Dortmund ne lui a jamais promise. Mais les choses ne se passent pas comme prévu et un an plus tard, il enquille un prêt en D2, à l’Alemannia Aix-la-Chapelle. « Pour moi, c’était la décision parfaite. Jouer chaque match devant 20000 ou 30000 spectateurs, c’est un sentiment merveilleux. Là-bas, je me suis senti professionnel pour la première fois » , explique-t-il après coup. Devenu titulaire indiscutable, Arslan le reste lors de son retour dans le Nord. Ses partenaires s’appellent alors Rafael van der Vaart, René Adler, Marcell Jansen ou encore Heung-min Son. Le temps de jeu et la complicité sont là, mais les résultats ne suivent pas : en cinq ans passés au HSV, Arslan doit se battre trois fois contre la relégation, sous la houlette de pas moins de treize entraîneurs ! Une instabilité qui lui a coûté sa place en équipe nationale allemande comme turque (le pays de ses parents), alors qu’il avait goûté au maillot des deux sélections, depuis les U19 jusqu’aux U21.

Bradé au Beşiktaş pour 450 000 euros en janvier 2015, il garde un souvenir plutôt mitigé de son passage hambourgeois : « Ce n’est pas facile de jouer au HSV, résumait-il en début de saison. Il y a une énorme pression de la part des fans. Ils voient toujours leur équipe plus grande qu’elle n’est en réalité. À mon époque, nous étions un noyau jeune et avions besoin de temps. Mais dès que nous perdions trois ou quatre matchs, le coach était immédiatement viré.[…]Hambourg en attend toujours trop alors qu’il faut avancer pas à pas. On ne peut pas jouer la Ligue des champions du jour au lendemain. Cela prend du temps et ils doivent le prendre. »

Star dans la patrie parentale

De nouveau empêtré dans la zone rouge de Bundesliga, Hambourg appartient définitivement au passé pour Tolgay Arslan. Depuis son arrivée à Istanbul, il a été deux fois d’affilée champion de Turquie, et la Coupe d’Europe est devenue un rendez-vous incontournable pour lui. À tel point qu’il attire désormais plusieurs clubs anglais comme Chelsea ou Newcastle. Mais le Bayer Leverkusen s’est également positionné pour rapatrier le milieu de vingt-sept ans, dont le contrat avec le Beşiktaş court jusqu’en 2022.

En attendant de savoir où l’avenir l’enverra, Tolgay Arslan profite de sa vie turque. Dans la patrie parentale, dont il parle parfaitement la langue, il a découvert un « club familial » , dont il chérit le membre le plus influent : le public. Depuis la rénovation de l’ancien stade BJK İnönü en 2016, ce dernier a fait du Vodafone Park une forteresse quasi imprenable : seul Fenerbahçe s’y est imposé lors d’une rencontre de Coupe en 2017 (0-1). Pour l’illustrer, Arslan se plaît à raconter cette anecdote : « La saison dernière, on perdait 0-3 à la mi-temps contre Benfica. On rentrait au vestiaire, mais le public nous a rappelé sur la pelouse. On s’est alors tenus sur la ligne médiane et le stade entier nous a applaudis. Finalement, on est revenus à 3-3. Tu sais que tu n’es jamais seul. » De bon augure pour croire aux miracles.

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Par Julien Duez

Propos d'André Hartmann recueillis par fussball.de. Ceux de Tolgay Arslan recueillis par Sport Bild et Transfermarkt.

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