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Tirs au but : ceci n’est pas une malédiction

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes

L’OM n’ira donc pas en Ligue des champions. La faute paraît-il à une cruelle séance de tirs au but, toujours si injuste pour les équipes françaises. Un argument qui sert surtout de fait à dissimuler les véritables raisons des échecs tricolores dans les compétitions européennes…

Tirs au but : ceci n’est pas une malédiction

Avant Munich 1993, un premier drame s’est déroulé deux ans plus tôt à Bari. L’Olympique de Marseille perdait en finale de la Coupe des clubs champions, ancêtre de la Ligue des champions, contre l’Étoile Rouge de Belgrade, 5 tirs au but à 3. Un souvenir douloureux que le coup de tête de Basile Boli contre Milan a quelque peu effacé des mémoires phocéennes. Il n’empêche, l’élimination en tour préliminaire mardi face au Panathinaïkos, censé pourtant être du haut de la suffisance de la Ligue 1 une formalité à expédier, a un arrière-goût de déjà-vu. Une tragédie sportive et financière au bout de la nuit, malgré un Vélodrome en feu, qui renvoie la France et son championnat à son statut de seconde zone sur le Vieux continent et sa sixième place au classement UEFA. Malgré ça, les commentateurs et le club préfèrent parler d’une seule voix de sort injuste ou de loterie des tirs au but.

Le contexte peut donner l’impression de conforter la superstition. Notamment pour nos sélections nationales : la défaite récente suite à la même épreuve, ô combien éprouvante, des Bleus au Qatar face à l’Argentine puis des féminines face à l’Australie, sans oublier les traumatismes séminaux de Séville 82 (face à l’Allemagne) ou de Berlin 2006 (face à l’Italie). Ainsi, il faut remonter au quart de finale contre l’Italie lors du Mondial 1998 pour retrouver une séance à l’issue heureuse pour l’équipe de France. Il est de la sorte aisé de sortir du chapeau une malédiction en bleu-blanc-rouge, qui s’abattrait aussi sur les clubs de l’Hexagone. Claude Puel en semblait convaincu dans les colonnes de L’Équipe après le cauchemar de mardi soir : « Une telle malchance, c’est dur ». Des propos qui donnent écho aux lamentations de Bruno Genesio, après l’échec de Rennes face au Shakhtar Donetsk en C3 la saison passée. Une version romancée de l’histoire (il n’y a qu’à voir le niveau de la séance de mercredi entre Séville et Manchester City pour être convaincu du contraire) qui permet de sauver le mythe d’une supériorité des formations françaises, volées par les facéties du destin.

L’aléa qui cache la forêt de lacunes

Il est vrai qu’en la matière, les statistiques se révèlent impitoyables. « Les faits sont têtus », aurait dit Lénine. Une occasion pour les supporters bordelais de mettre un peu de baume sur l’orgueil girondin : « Bordeaux est le seul club français à s’être imposé lors d’une séance aux tirs au but en C1. C’était contre Dnipropetrovsk le 20 mars 1985. » En Ligue Europa, seul l’OL a su franchir l’épreuve, digne de Fort Boyard, en avril 2017, contre Beşiktaş en quart de finale (6-7 T.A.B.). De fait, le diagnostic et les chiffres cachent surtout une réalité : les équipes française n’arrivent pas à s’imposer face à des adversaires en principe à leur portée. Tous les arguments peuvent ensuite être dégainés : le manque de préparation, le changement d’entraîneur, l’effectif remanié, l’arbitrage évidemment… et donc l’aléa, le hasard. Les excuses d’une défaite mobilisent toujours plus d’imagination que les explications d’un succès.

L’OM avait 120 minutes pour s’imposer avant le coup de sifflet final. Sans parler du score à l’aller suite à un non-match des Marseillais. L’élimination de mardi, comme celle de ses prédécesseurs, n’est en rien le fruit du hasard, d’un sort jeté par on ne sait quel dieu hostile à notre foot hexagonal ou encore à une malédiction aussi crédible que dans les aventures de Rouletabille. Faudra-t-il un épisode d’une quelconque émission sur le paranormal pour connaître la vérité ? Plutôt que de pointer l’inefficacité lors des tirs au but, ce sont surtout le niveau, l’arrogance et le manque de compétitivité de la Ligue 1, que la LFP croit pouvoir vendre pour un milliard d’euros. Au classement UEFA, les Pays-Bas sont passés devant, le Portugal nous talonne et plus aucun club en Europe ne craint un représentant français. Les tirs au but sont la bonne excuse d’un championnat moyen qui préfère maudire le hasard que de reconnaître sa vanité…

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Par Nicolas Kssis-Martov

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