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Thorgan et le chaudron magique
C’est acté. Après cinq saisons en Rhénanie-du-Nord, Thorgan Hazard va quitter le Borussia Mönchengladbach cet été pour un club plus huppé. Courtisé par le Borussia Dortmund, Liverpool et l'Atlético de Madrid, le feu follet belge souhaite enfin clore un apprentissage doré, mais discret.
Lloyd Chudley publiait en 1964 le premier volume des Chroniques de Prydain, œuvre de fantasy qui s’apparente à un réel roman d’apprentissage. Adaptée presque vingt ans plus tard par les studios Walt Disney, sous le nom de Taram et le chaudron magique, l’histoire nous narre les aventures d’un jeune valet de ferme qui se rêve en héros. Mais pour y parvenir, adjuvants et opposants lui font face, le poussant à devoir attendre que la chance lui sourie. Comme lui, Thorgan est arrivé à un moment clé de son histoire, celui où l’initiation doit laisser place à la consécration. Après avoir attendu à Lens et à Londres que son heure vienne, c’est finalement en Flandres puis en Allemagne que le jeune homme s’est épanoui. Appelé à rejoindre l’autre Borussia pour y retrouver l’audacieux magicien Lucien Favre, le Wallon de Braine-le-Comte veut écrire un nouveau chapitre avant qu’il ne soit trop tard.
Chroniques de La Gaillette
Arrivé à Lens à l’âge de 14 ans, Hazard y côtoie Aurier, Kondogbia et Varane. Si le champion du monde 2018 saisit aussitôt sa chance en équipe première avant de filer au Real en 2011, ce n’est pas le cas de Thorgan. « L’équipe galérait un peu, le club aussi, donc ils donnaient la chance aux jeunes comme Varane, qui l’a saisie directement. Moi, j’ai dû attendre un peu plus. Aurier et Kondogbia, c’était un peu plus difficile pour eux aussi, même si c’était plus facile que moi. Je regrette de ne pas avoir pu exploser là-bas. » Dans le sillage de son frère, il s’envole pour Chelsea en 2012, au même moment où Kondogbia et Aurier s’engagent avec Séville et Toulouse. Malgré cette arrivée précoce à Londres, le jeune Belge sait que cette étape n’est qu’un tremplin : « J’ai signé là-bas en sachant très bien que j’allais être prêté directement. Il y avait un plan, qui était d’être prêté et de jouer, surtout. D’avoir un club et un coach qui me font confiance. » Ce sera le cas avec Zulte Waregem, club de Jupiler League avec lequel il brille aussitôt. Lors de sa première saison, le club flamand joue même le titre jusqu’à la dernière journée perdue contre Anderlecht. Sa seconde saison est tout aussi réussie puisqu’il inscrit 9 buts et délivre 14 passes décisives. Suffisant pour être élu Soulier d’or belge, une première dans l’histoire de son écurie d’adoption.
Thorgan est à nouveau prêté au Borussia Mönchengladbach en 2014 malgré l’intérêt d’Anderlecht. Le talent du jeune ailier va alors y être poli par Lucien Favre. Sous ses ordres, Hazard passe rapidement du statut de débutant à celui de diamant. Aux pieds du podium deux saisons consécutives, Mönchengladbach joue aussi crânement sa chance en coupes d’Europe. Dans le même temps, ses coéquipiers de La Gaillette font preuve d’une précocité déroutante. Lors de la première saison d’Hazard à Gladbach, Aurier s’est engagé avec le PSG, Kondogbia brille avec l’AS Monaco, et Varane commence à gagner un temps de jeu conséquent au Real. Comme le héros de Lloyd Chudley, Thorgan prépare son éclosion avec patience et persévérance, une habitude à prendre quand on est le petit frère d’Eden Hazard.
Roi wallon en devenir
Sa deuxième saison à Gladbach commence bizarrement puisque Lucien Favre démissionne après cinq défaites lors des cinq premiers matchs de Bundesliga. Sous les ordres de son remplaçant, André Schubert, Thorgan participe largement à la quatrième place de son équipe en Bundesliga. Appelé dans la foulée avec les Diables rouges pour l’Euro 2016, le natif de La Louvière restera assis sagement sur le banc, attendant une nouvelle fois d’être l’heureux élu. Si son équipe enchaîne par la suite deux saisons ponctuées par deux décevantes neuvièmes places, les statistiques du cadet Hazard s’envolent grâce à une précision et un sang-froid décuplés. Capable d’évoluer à gauche ou à droite du front d’attaque, il développe une polyvalence intéressante. Constamment à l’affût de l’espace, diablement habile, collectif, mais aussi à l’aise dans l’exercice des penaltys ou des corners, il délivre 21 assists et marque 23 buts entre 2016 et 2018. Après une Coupe du monde qui l’aura vu participer à 97 petites minutes de jeu, Thorgan est revenu à Gladbach pour entamer sa cinquième aventure de suite. Mais cette fois-ci, c’est la croisade de trop.
« Nous avons terminé neuvièmes(la saison dernière), alors que cette saison, nous visons une qualification européenne, peut-être même en Ligue des champions. Une fois que ces objectifs seront atteints, si je dois aller voir ailleurs pour progresser, je pense que je m’en irai. » Mais à l’heure d’accueillir Leipzig ce samedi soir, le Belge sait pourtant que même en cas de qualification européenne, son avenir ne s’écrit déjà plus en Rhénanie. Surtout, cette cinquième saison est compliquée, tant sur le terrain qu’en coulisses puisque les joueurs savent déjà que Dieter Hecking sera remplacé la saison prochaine par le jeune et intrépide Marco Rose.
Cinquième de Bundesliga à un point de la dernière place européenne occupée par Francfort, Gladbach était prêt à offrir un salaire de six millions d’euros à Thorgan en février dernier. Mais le joueur ne prolongera pas, poussant les dirigeants du club à confirmer que le Belge les quitterait cet été. Si la presse allemande a annoncé qu’un accord avait déjà été conclu entre Thorgan et le Borussia Dortmund, Liverpool et l’Atlético de Madrid restent apparemment à l’affût. Désormais proche de la confirmation, le jeune valet Wallon n’a presque plus rien à envier au parcours de ses petits camarades de La Gaillette.
Maxime Renaudet
Tous propos issus de l'interview de Thorgan Hazard, réalisée par Romuald Gadegbeku dans le n°51 de So Foot Club.