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Thomas Wiesel : « Le footballeur suisse le plus connu ? Sepp Blatter »

Par Matthieu Rostac, à Lausanne
Thomas Wiesel : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Le footballeur suisse le plus connu ? Sepp Blatter<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Le Jamel Comedy Club, le Montreux Comedy Festival, des chroniques chez Quotidien puis France Inter : depuis qu'il a laissé tomber la comptabilité pour faire rire les gens, Thomas Wiesel, 28 ans, est devenu « l'homme le plus drôle de Suisse ». Derrière Xherdan Shaqiri et sa dégaine de kangourou, évidemment. Le Lausannois reçoit chez lui pour évoquer les présidents-taulards du championnat suisse, un certain Autriche-Suisse de 1954 et le Loulou Nicollin des Alpes, Christian Constantin.

Le foot, ça commence où et quand pour toi ?Je n’ai jamais joué au foot, figure-toi. Le seul moment où j’ai eu une forme de velléité de taper dans un ballon, c’est quand j’habitais à Londres de 1998 à 2000, donc de 9 à 11 ans. Là-bas, c’était le foot, le foot, le foot. Mon frère me tirait dessus dans le jardin, donc j’ai fini par devenir pas trop mauvais au but. Il y avait un camp d’Arsenal qui tournait de quartier en quartier. C’était sur quatre ou cinq samedis et avec mon frère, on avait participé. Le recruteur d’Arsenal était intéressé par mon frère – « Il a quel âge ? 11 ans ? Trop vieux ! » – et mon frère a essayé de me placer, mais bon, ils ne cherchaient pas de gardien et je ne savais pas taper dans un ballon. Donc voilà, ma carrière à Arsenal s’est arrêtée là. J’ai croisé Johan Djourou sur un plateau et je lui avais dit que moi aussi j’avais joué à Arsenal, mais que je n’avais pas beaucoup joué non plus ! Il est marrant, Djourou, il a beaucoup d’auto-dérision. J’avais aussi dit à la radio alors qu’il était assis à côté de moi : « Désolé, j’ai pas l’habitude de travailler assis. Pas comme Johan Djourou. »

Et tu supportes le Lausanne-Sport ?Quand on était petit, on allait à la Pontaise. Je me rappelle qu’on a gagné plusieurs fois la Coupe de Suisse, souvent aux tirs au but de façon assez dégueu, d’ailleurs. On a eu quelque bons joueurs : Celestini, qui est le coach maintenant, on a eu Chapuisat en début puis fin de carrière. Quand j’étais gamin, l’attaquant-star du club, c’était Souleymane Sané, le père de Leroy. Il n’a pas joué trop longtemps, mais il marquait. On a eu droit à quelques matchs de Coupe des coupes, d’Intertoto, mais rien de plus. Ensuite, Waldemar Kita est venu pour couler le club. (Rires.) Et puis, il est parti à Nantes…

Pour couler le club aussi, d’une certaine manière…Oui enfin, pour l’instant ça va. Disons qu’il a coulé le club, mais qu’il est resté, quand même. Nous, il est parti. On a eu pas mal d’investisseurs miracle qui venaient pour couler des clubs en Suisse. Au Servette, ils ont eu Marc Roger. Le mec débarque, « ancien agent de joueur » – déjà, tu te méfies – avec sa gourmette, son bouc et son accent du Sud de la France. Il arrivait avec Christian Karembeu, le mec qui n’avait aucune envie de jouer au foot. Il avait fait venir Pelé pour une conférence de presse. Il faisait des plateaux télé pour dire : « J’ai trouvé un investisseur ! » Il avait trouvé un Irakien ou un Libanais, mais l’armée américaine retenait sa fortune soi-disant à cause de la Guerre de Golfe. Il appelait des notaires genevois en direct à la télé en gueulant : « Vous avez mon argent ! » (Rires.) Un feuilleton… Deux ans plus tard, le club fait faillite et lui finit en prison. Ils l’ont arrêté lors d’un match de Coupe d’Europe, on avait donné sa photo à tous les clubs. Le mec est en cavale et il va voir un match à Barcelone ! À Neuchâtel Xamax, on a eu un proche du président tchétchène, Bulat Chagaev, qui a coulé le club aussi. Lui passait les factures à la broyeuse et débarquait à la mi-temps dans les vestiaires avec ses gardes armés de mitraillettes pour dire à ses joueurs de mieux jouer.

Comment t’expliques que la Suisse attire ces mecs-là ?Dans le foot suisse, tu ne peux pas te faire trop de fric, il n’y a pas de prestige, donc ça attire ce genre de mecs. Pas des Abramovitch, des Al-Khelaifi, mais le rang inférieur, les margoulins de seconde zone. Mais là, j’ai l’impression que ça va un peu mieux, même si la résultante, c’est que plus personne n’a les moyens de lutter avec le FC Bâle. Comme en France, comme en Allemagne, t’as un gros club qui bat de la tête et des épaules les autres. Notre meneur de jeu, Samuele Campo, était arrivé en prêt de Bâle : il a bien joué, ils l’ont rappelé. On a un nouvel investisseur, Ineos, et le président David Thompson dit qu’il veut rivaliser avec les plus grands clubs suisses, mais bon, il va d’abord falloir changer le stade parce que c’est un frigo dans lequel tu entends plus les supporters adverses. Ici, la ville vibre pour le hockey sur glace, et plus généralement en Suisse romande, la blague, c’est de dire que le foot, c’est chiant. Et en hockey, on peut se moquer des noms de clubs. Il y avait ce club dans la banlieue de Saint-Gall, qui s’appelle Rapperswil – déjà, « rappeur’s ville » – et ils avaient décidé de faire un rebranding et de s’appeler les Lakers… parce qu’il y a un lac.

Une de tes chroniques sur France Inter était sur le PSG, tu fais beaucoup de vannes sur le foot. C’est un vraie inspiration pour toi ?Le sport, ça reste universel et le foot, c’est le sport le plus populaire. En humour, quand on fait des chroniques, il faut qu’on ait des connaissances communes. Le foot, c’est parfait pour faire une comparaison. Les gens savent que Zlatan a la grosse tête, que le PSG a du fric, etc. Et puis, je pense qu’il y a aussi le fait qu’en Suisse, c’est très difficile de parler de foot, donc il y a une forme de frustration. Je fais un peu tous les repas de soutien des clubs et là, tu parles de foot, mais si tu sors de ce cercle de spécialistes, ça ne marche pas. Bon en même temps, pour les Euro et les Coupes de monde, ça va, parce que la Nati se qualifie – ce qui n’était pas le cas quand j’étais gamin.

Donc la Suisse n’est pas un pays de foot ?Non, c’est un pays de tennis depuis l’avènement de Federer. C’est un pays de sport dès qu’un Suisse s’y illustre. Là, Volkan Oezdemir a fait son trou en MMA, donc le pays s’intéresse au MMA. C’est difficile d’être un pays de foot quand ton meilleur résultat, c’est un quart de finale de Coupe du monde. Après, ce quart de finale assez mythique, c’est 1954, la Suisse organise le Mondial, record de buts de l’histoire de la compétition. Mon grand-père me raconte ce match depuis que je suis tout petit. Les gens l’ont encore en travers de la gorge parce que ça s’est joué par une canicule, à l’époque tu n’avais pas droit à des remplaçants, et je crois que le capitaine, le gardien et deux autres joueurs ont eu des insolations. La Suisse mène 3-1 et finit par perdre 7-5. Les gens ont longtemps dit que c’était la meilleure équipe suisse de l’histoire. Les gens sont encore frustrés d’un match qui a eu lieu en 1954, pour te donner une idée du niveau de la Nati.

C’est votre Séville 82…Ouais, mais ça a eu lieu il y a plus de soixante ans, contre l’Autriche, donc c’est encore autre chose ! (Rires.) Et puis, vous, vous avez gagné quelque chose ensuite. Nous, on n’a jamais rien gagné. On avait une belle équipe en 1994, mais on n’aurait jamais rien gagné. L’exploit, c’est de se qualifier ou de taper un gros en phase de poules.

Comme l’Espagne en 2010, futur champion du monde…Oui, enfin même là, on se rendait bien compte que c’était un gros coup de bol. Déjà, le but : ça tape le poteau, la tête du gardien, le genou du défenseur et la poitrine de Gelson Fernandes, soit un homme qui ne marque jamais. Bon, ça nous a pas empêchés de nous targuer de les avoir battus. Et puis après, on perd contre le Chili et on fait match nul contre le Honduras, donc c’était bien la peine de battre l’Espagne, tiens.

Vidéo


La Suisse n’est donc pas un pays de football et pourtant, on y trouve la FIFA, l’UEFA…Je disais souvent que le footballeur suisse le plus connu du monde, c’est Sepp Blatter alors qu’il n’a jamais joué au-dessus de la deuxième ligue et qu’il peut pas jongler à cause de son bide. C’est ridicule. Quand Blatter a été élu, un Suisse au sommet du foot mondial, c’était une fierté. Petit à petit, on a réalisé qu’il était corrompu, qu’il était le symbole de ce qui n’allait pas dans le foot. Sa sortie sur le foot féminin qui doit mettre des shorts plus courts pour être regardé… On a réalisé à quel point c’était un beauf et, avec toutes ses magouilles, on a fini par le détester. On était parmi les plus virulents à la fin et quand il y a eu des perquisitions à Zurich, les gens étaient contents. On a honte de l’image que ça donnait de la Suisse à l’étranger et le fait d’avoir nommé Infantino, un autre Suisse en remplacement, ça ne le fait pas. Ils prennent un mec qui a grandi à deux kilomètres du village de Blatter ! Et en plus d’être aussi corrompu que Blatter, il est moins malin pour le cacher donc bon… C’est un paradoxe très suisse. On a le CIO alors qu’on fait cinq médailles par JO. À Lausanne, on a le Tribunal arbitral du sport. Suárez est venu pour sa morsure, par exemple. Dès que les grandes stars du sport viennent à Lausanne, c’est qu’elles ont fait une connerie.

On a parlé des présidents de clubs suisses plus tôt. Ta victime préférée, c’est Christian Constantin du FC Sion. Il t’a fait quoi ce pauvre Christian ?D’un point de vue personnel, je l’aime bien. C’est un mec qui a compris l’importance des rapports interpersonnels, l’entregent : il se souvient de tout le monde, des prénoms, des discussions que t’as eues plusieurs années auparavant. En interview, quand il dit qu’il a failli signer Ronaldinho en fin de carrière, qu’il a prêté son avion à Jamel, c’est sûr. Quand tu le rencontres, t’as envie de dire oui à tout. J’avais fait le repas du Xamax, il était là, donc je l’avais un peu vanné et juste après, je jouais en Valais, son canton d’origine. Je lui ai envoyé un message : « Toujours un plaisir de faire des blagues sur toi ! Désolé, mais là, je dois filer en Valais ! » Il me répond : « Ah, mais attends, viens, j’ai l’avion, je te prends ! » Bosser dans l’immobilier avec lui, ça doit être horrible parce que c’est un homme d’affaires, il doit savoir ce qu’il veut, c’est un sanguin, etc. Mais en tant qu’humoriste, c’est génial. Quand il a giflé un consultant, ça nous a vraiment donné de la matière. On est dans un pays où il se passe peu de choses, donc un mec qui bouscule les codes, c’est incroyable. Je sais qu’en Suisse allemande, il est vu comme un fléau du foot, mais pour moi, c’est un mec aussi nécessaire qu’un Loulou Nicollin. Des mecs passionnés, capables de couler leurs économies à eux plutôt qu’un club.

Tu t’es donc chargé de roaster les invités du gala du FC Sion. Pourquoi avoir accepté ? Je ne suis pas quelqu’un qui nourrit une grande ambition, mais ça, je voulais le faire parce que c’est le plus gros des repas de soutien. Il fait toujours venir des comiques, des chanteurs has been. Nous, on a eu Umberto Tozzi qui est venu chanter Ti Amo et ses sept autres chansons que personne connaît (sourire). Et puis, c’était en période électorale, donc tous les politiciens locaux étaient là. Et moi, j’adore roaster… C’était les Golden Globe champêtres ! (Rires.)


Et donc, ta tête est désormais mise à pris en Valais ?(Rires.) Les Valaisans, ce sont un peu les Corses de la Suisse : ils viennent te dire qu’ils sont valaisans même si tu n’as rien demandé. Ils ont cette sorte de fierté. Mais à l’inverse, ils ont beaucoup d’auto-dérision et je suis très apprécié. Je me suis fait adopter… En leur chiant dessus, je crois. C’est rigolo.

Même après avoir brandi le maillot du Lausanne-Sport pour clôre ton sketch ?Oui enfin, Lausanne-Sport était dernier du championnat à l’époque, donc c’est passé. Pour les derniers fans hardcore de Lausanne, je suis un héros d’avoir fait ça, alors que pour moi, c’était juste un gag. D’ailleurs, les invités m’ont pourri mon maillot en coulisses. Constantin l’a signé, puis deux ou trois personnes. C’était un maillot que j’avais acheté aux enchères, signé par le capitaine du club ! (Rires.)

Suivez Thomas Wiesel sur Facebook Thomas Wiesel jouera le 13 février à l’Espace Ried Brun de Muntzenheim

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