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Thomas Sotto : « L’organisation familiale est dictée par le Paris FC »
Si Thomas Sotto se présente spontanément comme « le mec qui reçoit le ballon devant un but vide et qui la met au-dessus » et surtout comme un fan de Roger Federer devant l’éternel, depuis quelques années, le journaliste de RTL et de France 2 s’est aussi entiché du Paris FC. Et pas seulement depuis que le club est leader de Ligue 2.
Quand on est leader de Ligue 2 avec 7 points d’avance après 10 journées, on se dit « cette fois, c’est la bonne » ? Ouh là, malheureux ! Pas trop vite ! (Rires.) Non, évidemment qu’on y pense. Après chaque match, je regarde le classement évoluer et je fais mes calculs. On gère ça en petits commerçants. Il s’est passé un vrai truc avec l’arrivée de René Girard (en janvier 2020). Avant lui, Baždarević a apporté beaucoup au club, il ne faut pas l’oublier, mais il a fallu se sortir de la saison horrible de l’an dernier où on s’est sauvés miraculeusement. Mais cette année, on a fait un super recrutement, avec notamment Gaëtan Laura. Il y a tous les ingrédients pour faire quelque chose.
Et pendant ce temps le @ParisFC est (toujours) en tête de la @Ligue2BKT !!! Avec 7 points d’avance… (le décompte, incontestable, est + simple qu’aux États-Unis….) ? ⚽️ ?
— Thomas Sotto (@ThomasSotto) November 7, 2020
Comment devient-on un inconditionnel du Paris FC ?C’est mon fils de 10 ans qui m’a fait basculer. À la base, je suis fan de tennis et j’avais un abonnement beIN pour suivre les tournois Masters 1000. Puis mon fils a pris goût aux matchs de Ligue 2 le vendredi soir. Je l’avais emmené quelques fois au Parc des Princes, mais ça n’avait pas pris, il s’emmerdait. Donc il y a deux ans, je nous ai pris des billets pour le Paris FC. Et là, on a directement accroché. Avant le confinement, on se faisait tous les matchs à domicile et on suivait ceux à l’extérieur à la télé. L’organisation familiale est dictée par le Paris FC.
Qu’est-ce qui a plu à votre fils ?Je pense qu’il cherchait un club d’attache, un club affectif. Puisqu’il joue gardien avec ses potes, mon fils s’est aussi pris de passion pour Vincent Demarconnay. C’est l’âme de l’équipe, ça se sent, ça se voit même dans les petites vidéos que le club diffuse après sur les réseaux sociaux. On a récupéré son maillot et on s’échange des petits messages pour faire un petit débrief après chaque match.
C’est rare que ce genre de passion soit transmise par le fils. En général, c’est dans l’autre sens que ça se fait…Il m’a influencé, c’est vrai, je n’avais jamais été un supporter dans l’âme, mais là, je suis tombé dedans à fond. Quand il n’est pas là, je regarde quand même les matchs et je suis l’actualité du club. Il a rallumé la petite flamme du foot qui sommeillait en moi. J’ai retrouvé une sorte d’amour du foot « primitif » . Moi, je suis vieux, donc avant ça, mes dernières extases, c’était France 98 et l’Euro 2000. Plus jeune, j’ai aussi été marqué par deux clubs : le Marseille des années Tapie, parce que là il y avait une aventure humaine, et le Racing Club de Lens, pour qui j’ai toujours eu une tendresse folle. Sinon, je ne m’intéressais qu’aux gros matchs. Mais au Paris FC, il se passe un truc. C’est une aventure humaine avec des joueurs qui sont extrêmement accessibles, qui vivent une vraie histoire. Chaotique, certes, comme avec le barrage pour la montée (perdu face au RC Lens aux tirs au but, N.D.L.R.), mais ça l’aidera à se structurer et se stabiliser le moment venu.
Vit-on les mêmes émotions lors d’un match de Ligue des champions et, au hasard, un PFC-Rodez ?Elle est à charge, votre question ! (Rires.) Ce n’est pas la même émotion en matière de jeu. En Ligue 2, il y a même des moments où on s’emmerde, faut le dire. Mais on en est plus accrocs. Là, je veux qu’ils montent. Donc il y a cette boule au ventre quand on est mené par Caen. Bon, je n’en suis pas au niveau de pathologie que quand je suis un match de Roger Federer, mais il y a des bons moments quand même.
Le point noir, c’est quand même Charléty, ce stade ouvert aux quatre vents pas franchement accueillant.Objectivement, c’est le pire stade du monde. Il y a cette piste d’athlé, ces tribunes trop grandes… Mais en même temps, il y a ce noyau de supporters qui est là et qui incarne le club. Dans 10 ou 15 ans, quand le PFC sera en Ligue des champions, ils se diront : « Nous, on était là dès le début. » Ce sont les vrais.
À force de regarder alternativement vers le haut et vers le bas, est-ce qu’on ne se fait pas des torticolis en suivant le Paris FC ?(Rires.) Non, mais c’est vrai que l’an dernier, c’était l’angoisse totale (19e à la trêve, 17e avant l’arrêt du championnat, N.D.L.R.). À un moment, on s’est même demandé avec mon fils si on n’était pas des chats noirs. À chaque fois qu’on allait au stade, ils n’arrivaient pas à gagner.
Que répondre à ceux qui reprochent au Paris FC de ne pas avoir d’identité propre comme pourraient l’avoir le PSG ou le Red Star ?Alors déjà, je ne mettrais pas le PSG et le Red Star dans le même sac. Le Red Star a son identité propre, alors que le PSG, je ne suis pas sûr qu’il n’ait pas perdu la sienne. En tout cas, je ne la vois plus. C’est un très grand club qui s’est construit une très belle équipe, mais il n’y a plus cette filiation. Pour le Paris FC, il faut venir voir pour comprendre, voir les joueurs entre eux. L’an dernier, il y en a un qui n’est pas rentré dans le truc, c’est Jérémy Ménez. On sent qu’il n’a pas adhéré, et ça se voyait dans sa façon de jouer. Mais quand vous regardez Laura, Pitroipa, Mandouki, Lopez… On sent qu’il y a un groupe, une aventure humaine et un partage avec les supporters. Ok, ils sont 500, mais ils sont à fond. On peut reprocher plein de choses au Paris FC, mais pas de ne pas avoir d’âme ou de personnalité.
Y a-t-il la place pour deux clubs à Paris ? Même si l’ombre immense du Parc des Princes plonge sur le stade Charléty, je n’ai aucun doute là-dessus. Aucun. À partir du moment où les deux sont capables de proposer du beau jeu, un état d’esprit… Ça fait des années qu’on se raconte des histoires à ce sujet. Mais entre l’Inter et l’AC Milan, ça se passe très bien.
Là, on parle d’une rivalité séculaire. N’est-ce pas trop tard pour la créer à Paris ?Il faut bien la commencer un jour, cette rivalité. Mais honnêtement, moi ça me va très bien d’être dans l’ombre et d’avancer à bas bruit.
Comment accueillez-vous l’arrivée de Bahreïn comme sponsor principal du club ? N’y a-t-il pas le risque de perdre son identité comme vous le reprochez au PSG ? Je vais vous faire une réponse de Normand. C’est une excellente nouvelle parce que dans le foot, aujourd’hui, il faut des moyens. Mais oui, j’espère que le club ne perdra pas son âme dans tout ça. Si c’est pour faire un deuxième PSG qu’on appellerait PFC, ça n’a aucun intérêt. Le PFC a un ancrage populaire qui fait sa force et s’il perd ça, ce sera compliqué. Et là, il n’y aura pas la place pour deux clubs à Paris. Si les deux clubs racontent la même chose, ça ne marchera pas. Le PSG était là avant, est plus fort, et personne n’en sortira grandi.
Le président Pierre Ferracci a dit que « Bahreïn est prêt à faire un effort supplémentaire en Ligue 1 ». Si vous pouviez choisir, qui serait le Pastore du PFC ? Je n’ai pas de compétences de recruteur, mais si le PFC monte demain, je fais revenir Silas Wamangituka. Il était super bon avec ses grands compas et on a dû le laisser partir en Allemagne parce que le club n’avait pas les moyens de le garder. Et là, ça ferait sens.
Pourriez-vous vous impliquer au club ?Ils m’ont demandé d’être parrain de leur académie, le sport-études. Il a fallu que j’attende l’âge de 47 ans pour être recruté dans un club de foot, donc je suis très fier !
Vous faites un peu de lobbying pour le Paris FC dans les couloirs de RTL ou de France Télévisions ?Je porte un masque aux couleurs du club, mais c’est pour le clin d’œil. L’an passé, on a aussi fait un sujet dans le 20 Heures pour les 50 ans du club. J’avoue que ce jour-là, c’était comme si mon fils était le rédacteur en chef. (Rires.) Mais on ne l’aurait pas fait si ce n’était pas intéressant. Mais c’est aussi ça, le sens éditorial. Ça fait partie de notre métier de dire qu’à côté des incontournables, il se passe des choses.
N’y a-t-il jamais eu chez vous l’envie de présenter une émission de football ?Il faut savoir que j’ai été reporter pour RMC à mes débuts. J’ai fait des multiplex de foot. Ma première prestation était d’ailleurs brillante. Ça devait être un match entre le PSG et Châteauroux en 1995 (Coupe de France 1996, N.D.L.R.). Le mec qui devait couvrir normalement ce match ne pouvait pas y aller, et je me retrouve à brancher ma petite boîte au Parc des Princes en catastrophe. J’étais totalement en panique, surtout que je ne suis pas un immense spécialiste du foot, loin de là. Loko marque un but, j’ouvre mon micro hyper content, je me prends pour Eugène Saccomano : « Eeeeh but au Parc des Prince ! Patrice Loko… » J’étais tellement dans mon truc que je n’avais pas vu qu’il avait été signalé hors jeu. Et quand je vois qu’il n’y a pas d’engagement derrière, et au lieu de le dire à l’antenne, j’invente et je dis : « Ah non en fait le ballon n’est pas rentrée… » Ce qui était complètement faux. (Rires.) Pour revenir à la question, faire quelque chose dans le sport, oui, parce que j’aime ça. Mais me présenter en tant que spécialiste, non ce n’est pas moi.
Est-ce que vous parlez football avec vos invités ? Ça peut permettre de détendre l’ambiance ?Déjà, il y a plein d’invités qui me parlent eux-mêmes de Federer, en disant « J’ai lu votre livre » (Une aventure nommée Federer, paru en 2018, N.D.L.R.) ou « J’adore Roger ». Ça a pris une telle proportion que je reçois systématiquement des messages après une victoire ou une défaite de Roger. Mais plus que parler de sport, je pousse à en parler. À RTL, le sport est un peu le parent pauvre aujourd’hui. Et j’incite à faire des sujets sur le sport. Encore cette semaine, j’ai pu placer un petit mot à l’antenne en disant : « Dommage de ne pas avoir signalé les sept points d’avance du Paris FC. » Là, j’adorerais faire une émission avec Marcus et Lilian Thuram. Faire un 20h30 le dimanche avec les deux, ça serait magnifique. C’est le sport affect.
Avec cette actualité assez plombante, quel rôle joue le sport dans un JT ?Pour moi, il a un rôle tout le temps. C’est un liant. C’est de la levure qui fait monter la pâte. Ça rapproche les gens, ça met de la chaleur, ça met de la vie, ça met de l’émotion. Des émotions très fortes, très extrêmes sans être tragiques. Aujourd’hui, on est dans un monde où on se bat tous les jours avec des émotions qui sont tragiques. Le sport, lui, garde cette légèreté. Malgré les polémiques, l’argent ou les intérêts, quand on se plonge dans une grande compétition, on est bien. Ça reste « pas si grave » et on a besoin de « pas si grave » aujourd’hui.
Propos recueillis par Mathieu Rollinger