- Coupe de France
- Louhans-Cuiseaux
Thierry Njoh Eboa : « Quand il manque quelqu’un dans un mini-bus, tu t’en rends compte quand même ! »
La magie de la Coupe. Si Louhans-Cuiseaux s'est qualifié pour le huitième tour en éliminant l'ASM Belfort (1-3), le chemin de la victoire n'a pas été sans embûche. En route pour le stade Roger-Serzian de Belfort, le club de Saône-et-Loire a oublié son latéral gauche Thierry Njoh Eboa (27 ans) sur une aire d'autoroute, à une centaine de kilomètres de la destination. Les dirigeants du club de National 2 ont dû faire demi-tour pour retourner le récupérer. Initialement titulaire, Njoh Eboa n'a finalement pas totalement brillé par son absence puisqu'il a pu faire son entrée à l'heure de jeu. Entretien à quai, après une pause pipi qui a un peu duré.
Salut Thierry. Est-ce que tu peux nous raconter ce qu’il s’est passé ?On s’est arrêté sur l’aire de repos après un peu de trajet. On n’était pas dans un car, mais dans des minibus et moi, je suis mis dans le coffre. Je dormais, et j’avais ma veste par-dessus moi. Quand on s’est arrêté à l’aire de repos, il y a un collègue qui m’a vu sortir et aller aux toilettes, mais j’ai laissé ma veste dans le coffre. Et pendant que j’étais aux toilettes, l’intendant a demandé : « C’est bon il y a tout le monde ? On peut y aller », et les autres ont répondu : « Oui, oui il y a tout le monde. » En fait, ils pensaient que j’étais revenu et que j’étais en train de dormir en dessous de ma veste. Quand je sors des toilettes et que je me retrouve sur le parking, je pensais que c’était une blague. Je fais le tour de l’aire de repos, je vois qu’il n’y a vraiment personne, donc je me rends compte qu’ils sont partis. J’appelle mon collègue qui m’a vu aller aux toilettes, là il se retourne, il soulève la veste et voit que je ne suis pas en dessous et dit : « Merde, on a oublié Thierry. » Je lui ai répondu : « Mais tu vois quand même quand il y a le corps d’un être humain en dessous de la veste, il ne faut pas abuser. » Les minibus ont continué d’aller au stade, et les dirigeants sont revenus me chercher. Je suis arrivé environ trente minutes avant le coup d’envoi, et le coach avait déjà rempli la feuille de match, donc il m’a dit : « Tu devais débuter, mais je ne savais pas à quelle heure tu allais arriver, donc j’ai mis quelqu’un d’autre. »
Tu dormais dans le coffre ? Oui oui, pendant que le minibus roule, on a le droit d’aller dans le coffre.
Mais tu es allé aux toilettes tout seul ?Oui j’étais tout seul, les autres achetaient des petits trucs tranquille et j’étais le seul encore aux toilettes.
Ça faisait combien de temps que vous rouliez quand vous vous êtes arrêtés ?Ça faisait un peu plus d’une heure. Louhans-Belfort, c’est deux heures et il restait 50 minutes avant qu’on arrive au stade.
Qu’est-ce tu t’es dis quand tu t’es rendu compte qu’ils t’avaient oublié ?Je ne comprenais pas comment on peut oublier quelqu’un, sachant que dans le minibus, c’est petit, il y a six-sept places, donc tu remarques vite quand il manque quelqu’un. J’ai halluciné un peu, mais bon, on a gagné le match, donc après, on en a rigolé.
Tu faisais quoi en attendant qu’on vienne te chercher ?J’ai dû attendre peut-être 25-30 minutes, et il faisait froid en plus, donc je me les gelais. Je discutais tranquillement avec le monsieur de la station service. Il a vu mon survêtement et il m’a demandé : « Tu vas arriver à temps pour le match ? C’est contre Belfort en plus, donc j’espère qu’ils vont arriver à temps. » Et puis je faisais les 100 pas. Avec les dirigeants, on en a parlé dix-quinze minutes pour chercher le pourquoi du comment ils ont pu m’oublier.
Ça t’est déjà arrivé un truc pareil dans ta carrière ?Non, c’est la première et j’espère la dernière fois. (Rires.) Étonnement, vu que l’anecdote tourne un peu, j’ai pas mal de retours de personnes de plusieurs clubs à qui c’est déjà arrivé. Je suis loin d’être le premier.
En arrivant au stade, comment ça s’est passé ?Ça n’a perturbé personne, on s’est mis dans le match malgré tout. Je me suis échauffé avec les remplaçants et je n’ai pas dérangé les autres. On gagne et on se qualifie pour le prochain tour. On va recevoir une grosse équipe de N2, Fleury-Mérogis, j’espère qu’ils auront les jambes lourdes en faisant le trajet jusque Louhans (rires) et qu’on va se qualifier pour le prochain tour.
Ça te fait quoi d’être mis en lumière à ce moment-là de ta carrière pour une histoire pareille ?Sincèrement, je préfèrerais l’être pour mes performances que pour des âneries pareilles. Je croise les doigts pour qu’au prochain match, je sois décisif pour qu’on parle de moi pour le côté sportif, pour un beau but ou une passe décisive, et pas pour ce genre de choses. Pour être honnête, je n’en aurais peut-être pas parlé s’il y avait eu une contre-performance. Mais là on a gagné, en plus avec la manière, donc tout est bien qui finit bien. Je ne pensais pas que ça irait jusqu’à être raconté à l’étranger, il ne doit pas se passer grand-chose en ce moment, c’est pour ça. (Rires.)
Propos recueillis par Alexandre Delfau