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Thierry Laurey-Strasbourg : partir un jour….

Par Nicolas Kssis-Martov
Thierry Laurey-Strasbourg : partir un jour….

Remplacé par Julien Stéphan, Thierry Laurey n’entraînera plus les Strasbourgeois la saison prochaine après cinq ans de bons et loyaux services. D’ailleurs, rarement une expression n’aura mieux résumé un homme sur le banc, son rapport à son effectif et son club. Et la place particulière qu’il occupera désormais dans le cœur des supporters, qui n'ont pu lui dire au revoir comme il se doit.

Le communiqué du club se révèle pour le moins laconique. Il dit pourtant l’essentiel. « Le Racing Club de Strasbourg Alsace a décidé de ne pas prolonger le contrat de son entraîneur, Thierry Laurey. Après cinq années marquées par une montée en Ligue 1, une victoire en Coupe de la Ligue, et quatre maintiens, une page se tourne. » Oui, une page se tourne. Il va falloir imaginer Strasbourg sans lui. Et regarder comment Julien Stéphan saura prendre la relève, à charge pour lui d’égaler a minima le service minimum, éviter la relégation, assuré par son prédécesseur.

Arrivé dans la capitale alsacienne, après avoir dirigé un Gazélec qui semblait si peu à sa place en Ligue 1, Thierry Laurey récupère un Racing qui venait tout juste de remonter en Ligue 2, après avoir failli mourir. Il lui a permis de retrouver l’élite et de s’y maintenir, c’était en effet sa principale mission, du moins au regard des moyens qui lui étaient octroyés. Il suffit d’ailleurs de scruter le budget et l’effectif pour saisir l’exploit. Il parvint même à remporter une Coupe de la Ligue en 2019, qui permettra de savourer de nouveau un avant-goût européen, le temps de quelques matchs en tours préliminaires de Ligue Europa, un parcours achevé au pied du mur contre l’Eintracht Francfort. Naturellement, Marc Keller a remercié le bonhomme pour « son professionnalisme et à son engagement ». D’autre mots aussi qui semblent lui coller à la peau. D’autres mots qui disent en creux des limites.

Le sens du devoir

En effet, Thierry Laurey s’en va peut-être d’ailleurs aussi à cause de cela. Certainement pas en raison de ses colères ou de ses réactions en conférence de presse. Il rendait les coups. Comment le lui reprocher ? Strasbourg ne veut plus simplement être un miraculé, mais un prétendant permanent à la première moitié du tableau, voire à la nouvelle « conférence » de l’UEFA. Le choix de l’ancien coach de Rennes, auréolé d’une Coupe de France, témoigne de cette ambition « première moitié de tableau » . Bref, l’honnête et méritant Thierry Laurey, qui de lui-même déclarait qu’il ne saurait pas diriger une grande équipe avec des stars pas plus qu’il ne saurait conduire une voiture de course, s’en va donc sur la pointe des pieds.

Bien sûr, il s’avère tout à fait possible, ou légitime, de crier à l’injustice. L’image qu’il renvoyait, parfois avec sa propre complicité comme avec son récent discours sur la dictature du « beau jeu » après une rencontre terne contre des Marseillais particulièrement atones, occultait ses désirs et intentions de départ, autrement dit de combler le public avec du « spectacle » . Par exemple ce 2 décembre 2017, où les Strasbourgeois triomphent du PSG de Neymar, tout puissant à l’époque, lors d’une rencontre de feu au cœur d’un glacial hiver alsacien. Même émotion lorsque que le club se sauve in extremis et à la dernière journée grâce à un coup franc inespéré et sublime de Dimitri Liénard.

Capitaine Conan

Son football était à l’échelle de son équipe. Il s’y adapta. « Je n’aime pas parler de philosophie de jeu, racontait-il. Quand tu diriges un club du top 10 européen, tu peux imposer ta philosophie, car on va te donner les joueurs pour le faire. C’est plus compliqué dans un club moyen. Tu passeras plus de temps à t’adapter à ton effectif et à trouver un dispositif qui fonctionne par rapport à tes joueurs. » Ce qui n’empêche qu’à Strasbourg, y compris à la 15e place, on vibrait, d’angoisse parfois certes, mais jamais d’ennui. La lutte pour le maintien sonnait aux accents du serment de Kouffra, et le stade, le club, les joueurs et son entraîneur faisaient corps. Dans la tranchée. Contre tous. Et Thierry Laurey était toujours en première ligne : « Sur Neymar, je me suis pris un ouragan. Je n’en veux pas à Neymar parce qu’il dribble, mais parce qu’il chambre et insulte. Si je suis monté au créneau, c’est parce que les joueurs sont venus m’en parler après la rencontre. Et moi, je défends mes joueurs avant tout. » Et surtout le Racing Club de Strasbourg.

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