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Thiago Silva, capitaine en pointillés
Bousculé dans son confort cette saison par Unai Emery, Thiago Silva devrait logiquement soulever un nouveau trophée mardi soir, à Saint-Denis. Mais demain, où sera-t-il ?
C’est l’histoire d’un repas entre potes, de trois minutes glissées dans le storytelling peignant voulu par la direction parisienne depuis 2012. Autour de la table, quatre ampoules de la galaxie PSG : Marco Verratti, Blaise Matuidi, Julian Draxler et Thomas Meunier. Les ficelles sont tirées et l’on voit alors la bande se marrer : quelques jours plus tôt, elle a roulé au milieu du Vélodrome (1-5) et prépare un voyage à Barcelone où elle devrait, a priori, se sentir en confiance après une démonstration donnée lors de la manche aller au Parc (4-0). Là, Matuidi prend la parole – « Franchement, pour le match retour, vous le sentez comment ? » – et ouvre une porte : peut-on se satisfaire d’une défaite ? C’est Verratti qui pose la question : « Après un match, si tu perds 5-1 et que tu es qualifié, t’es content ou pas ? » Meunier raconte qu’il serait « dégoûté » . Sinon, on souffle : bien sûr qu’on signe pour ce scénario, tant que ça passe. C’est comme si le patronus de Thiago Silva, capitaine référence, venait d’apparaître sur la table, lui qui avait estimé avant le match aller que stopper le trio Messi-Neymar-Suárez se résumait à de la concentration, « leur enlever au maximum la possession du ballon et prier Dieu » . Rien de rassurant, donc, surtout pour un monstre.
« Je voulais qu’il change »
Car, comme s’il cherchait absolument à justifier les 42 millions d’euros lâchés sur le Brésilien, c’est ainsi que Leonardo lui avait déroulé le tapis il y a maintenant six ans : « Voilà le meilleur défenseur du monde. » Au fond, on le sait, Thiago Silva n’avait pas prévu de se retrouver à Paris et serait bien resté un peu plus à Milan, mais c’est une autre histoire qu’il a raconté le soir de la remontada à Barcelone, le 8 mars dernier : celle d’un capitaine de navire habité par la peur de jouer, de partir à l’aventure et incapable de reprendre le dessus sur ses émotions. L’histoire raconte qu’Unai Emery avait vu la chose arriver et qu’il aurait même regretté, après coup, la titularisation de son capitaine au Camp Nou. Au point de prendre Presnel Kimpembe, monstrueux à l’aller, entre quatre yeux et un tableau, deux jours après la rencontre, afin de lui expliquer, statistiques à l’appui, qu’il aurait pu avoir un impact supérieur à Silva selon les informations du collectif Paris United.
Bien sûr, le Brésilien n’est pas seul responsable de cette sortie de route historique, mais il l’a incarnée, ce qu’Emery n’a jamais caché. Interrogé par SFR Sport ce week-end, le Basque, dont l’avenir est plié depuis l’élimination du PSG face au Real en Ligue des champions, a même décidé de s’en expliquer, comme s’il voulait profiter de la période pour prouver – à juste titre – que son mandat parisien ne peut se résumer à ses échecs européens et qu’il a réussi de (très) belles choses en France : « Lors des deux dernières années, j’ai eu beaucoup de discussions avec Thiago Silva, car c’était le capitaine. L’année dernière, j’attendais plus de lui. On en a parlé et je lui ai demandé des choses parce que sinon, selon moi et après en avoir parlé au président, s’il ne changeait pas, il devrait nous quitter. J’ai été plus exigeant. Je voulais qu’il change des aspects de son jeu. Et il l’a fait cette année. Il a progressé avec moi d’une année à l’autre et est devenu meilleur. »
Marcher sur des œufs
Parce que Silva a gagné en exigence, qu’il a vu son statut être secoué et qu’il a compris qu’il n’était toujours pas brûlé, même à 33 ans. Le bonhomme a encore des choses à faire à Paris, notamment dans la transmission, et ce, même si Emery a décidé de s’en passer lors du huitième de finale aller à Madrid cette saison. Dans tous les cas, ça fait bien longtemps que Thiago Silva a fini de penser que la vie fait des cadeaux, lui qui s’est retrouvé avec une tuberculose dans les pattes au début des années 2000. Personne n’est dans sa tête et le Brésilien cultive la dualité entre le capitaine dur à cuire et celui qui semble marcher en permanence sur des œufs : ainsi, il a déjà affirmé publiquement qu’il aurait aimé voir Unai Emery poursuivre l’aventure là où d’autres (Meunier, Di María) ont déjà appelé aux « grands changements » . Ce qu’on voit, sur le terrain, maintenant, c’est surtout un Thiago Silva qui est revenu à son niveau dans l’impact (son entrée à Saint-Étienne début avril alors que le PSG était mené 1-0 et venait d’être réduit à dix en est une belle preuve), mais aussi un homme qui ne sait plus vraiment où se placer sur le tableau. Avec un nouveau coach, sera-t-il toujours titulaire ? Doit-il partir avant ? Lui a répondu récemment qu’il ne passerait pas la main avant la fin de son contrat. Mais ça, ce n’est probablement plus de son ressort.
Par Maxime Brigand