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Thiago Motta, le sablier
On le dit en fin de cycle, vieilli, lassé... Pourtant, souvent, le PSG a aussi eu besoin d'un grand Thiago Motta pour faire des grands matchs. Parce que l'Italien est un homme qui laisse du temps au temps.
Thiago Motta est un maître. Comme ceux que l’on peut voir dans Fort Boyard sous leur capuche et leur tenue tout droit sortie de Game of Thrones : un maître du temps. En effet, sa façon de jouer au football s’écoule selon un principe tout simple. L’Italo-Brésilien fait gagner du temps à son équipe et en fait perdre à l’équipe adverse. Et ça, mieux que personne. Pour faire gagner du temps aux siens, Thiago joue simple, souvent en une touche, souvent vers l’avant, et parfois à travers cette fameuse passe « Ligue des champions » , qui permet de trouver un attaquant pile poil au cœur du dispositif adverse, là où très peu de joueurs rêveraient de trouver un coéquipier. Lors du match retour contre Chelsea, Thiago délivre ainsi deux avant-dernières passes décisives. En une touche pour Zlatan qui avait effectué un appel de l’axe vers l’extérieur avant de servir Rabiot. Et en une touche ensuite vers Di María, qui n’était même pas encore vraiment parti, et qui n’avait plus qu’à centrer vers Ibrahimović. Si on était mauvaise langue, on pourrait même dire que sa balle perdue sur le but de Chelsea est elle aussi une avant-dernière passe décisive.
À la recherche de Verratti
Les pertes de balle, justement, sont le péché mignon de Motta. Car Motta aime bien avoir le temps, ou en tout cas déteste qu’on le presse et ne plus l’avoir. C’est pour ça aussi qu’il adore glisser vers Verratti quand on le chatouille de trop près, afin de pouvoir se replacer pendant que le petit Italien joue avec la baballe, avant de trouver le bon endroit pour avoir la liberté d’ajuster la bonne transmission. Pour ça aussi que sans Marco, Thiago ressemble à un aveugle sans son chien (pas pour rien qu’il y a toujours dix mètres entre eux : la taille de la laisse). Il ne voit plus, car il n’a plus le temps de bien voir. Gagner du temps en attaque, au pire en retrouver, et donc en faire perdre à l’adversaire quand c’est enfin son tour d’avoir la balle. Provocations, coups de vice, insultes, tirage de maillot, simulations, discussions, coups de pression ; on pourrait croire que Thiago Motta fait tout ça pour faire perdre ses nerfs à l’adversaire, mais ça, c’est juste la cerise sur le Brandão. Le but véritable, au-delà du plaisir sudiste de voir ses adversaires perdre le nord, est toujours le même : l’horloge.
Le numéro double
De fait, Motta est le maître quand il s’agit de couper un contre adverse. Le maître plus ultra quand il s’agit de juger en temps réel si la situation demande (ou non) de faire faute, de se sacrifier au nom de tous, et d’éviter à son équipe une situation d’infériorité numérique. Mieux, de donner le temps à son bloc de se replacer. Oui, Motta est le maître de la faute tactique. Celle qui donne l’heure sur le terrain. Pas pour rien que Thiago Motta joue avec le numéro huit, ce numéro double, rond, plein, éternel, infini. Le huit, ce chiffre dont la forme se rapproche de celle… du sablier.
Par Simon Capelli-Welter