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Terence Kongolo, l’art de survie

Par Matthieu Rostac, à Amsterdam
9 minutes
Terence Kongolo, l’art de survie

Le 3 juillet dernier, l'AS Monaco a décidé de confier à Terence Kongolo (23 ans), transfuge du Feyenoord Rotterdam, la lourde tâche de succéder à Benjamin Mendy au poste de latéral gauche. Mais le dada de Kongolo, c'est la défense centrale. Parce qu'il aime prendre des coups. Portrait d'un futur grand qui a eu la bonne idée de prendre son temps dans l'un des tous meilleurs centres de formation d'Europe.

Lorsque le 13 juin dernier, Eljero Elia annonce qu’il signe à İstanbul Başakşehir, les supporters de Feyenoord ne gueulent pas trop. Certes, l’ailier a été l’un des piliers de l’incroyable saison du dernier championnat néerlandais mais à 30 balais, une dernière pige pour aller goûter à la Turquie, ça ne se refuse pas. Et puis, Elia est un homme de La Haye, pas de Rotterdam. Quinze jours plus tard, le Feyenoord annonce avoir vendu Rick Karsdorp à l’AS Roma. Réaction des supporters ? Un petit grognement, rien de plus. Il faut dire qu’une vente à 14 millions d’euros – record du club -, ça ne se refuse pas. Mais quand la vente de Terence Kongolo à Monaco est confirmée quelques jours plus tard, c’en est trop pour les fans de la Trots van Zuid, même si le club récupère 13 millions dans la transaction. Parce que ce troisième départ d’un titulaire, couplé à la retraite de Dirk Kuyt, ponctue la saignée subie par le club rotterdamois alors que le mercato venait à peine de lancer officiellement les hostilités. Aussi parce que Terence Kongolo est un de ceux qui représentaient l’âme du Feyenoord, et ce à seulement 23 ans.

« Au Feyenoord, il est rentré comme un enfant et ressorti comme un homme »

Né en 1992 en Suisse de parents congolais, Terence Kongolo est avant tout un echt rotterdammer. En 2002, après une petite saison au sein du club amateur RVV Hillesluis, Kongolo marche 1,5 kilomètre de plus pour venir poser son sac au Varkenoord, le centre de formation du Feyenoord, et y restera quinze saisons – dont sept en équipe professionnelle. Stanley Brard, directeur du Varkenoord de 2005 à 2013, se rappelle encore de ce long coton-tige qui ne laissait passer personne en défense : « À douze ans, il avait déjà les qualités qui sont les siennes aujourd’hui : une bonne passe, un tête de plus que les autres (il mesure 1,88m, ndlr) et de l’abnégation. C’était un garçon très taiseux, à l’écoute et très appliqué. Il s’entraînait dur. Au fur et à mesure qu’il grandissait, il prenait en confiance. Vous savez, un jeune joueur, ça reçoit l’influence – positive ou négative – d’une multitude de gens alentours. Terence, lui, a toujours choisi sa voie, pris ses propres décisions. Au Feyenoord, il est rentré comme un enfant et ressorti comme un homme. »

« Il a fait la circulation pendant tout le match »

Au fil des saisons, Kongolo prend du galon, obtient ses premières sélections en équipe nationale des Pays-Bas U17. Damiën Hertog est aujourd’hui l’adjoint de Mario Been à l’APOEL Nicosie mais de 2010 à 2011, il fut celui de Jean-Paul Gastel chez les U19 de Feyenoord, avant de prendre les rênes de cette équipe pendant les deux saisons suivantes. « La première fois que j’ai vu Terence Kongolo jouer, il était encore chez les U17 du club. Il faisait partie de cette génération incroyable (Vilhena, Aké, Achahbar, Rekik, ndlr)qui composait la moitié de l’équipe nationale hollandaise des U17 qui a remporté l’Euro en 2011. C’est un vrai plaisir de travailler avec des mecs comme ça parce qu’ils sont plein de vie, plein de joie mais quand ils mettent le pied sur un terrain, ils n’en ressortent pas sans avoir gagné. Le crédo de Kongolo, c’est : apprécie ce que tu fais mais travaille dur pour », rembobine le technicien de 42 ans. Avant de reprendre, admiratif : « Durant l’été 2011, on a joué un tournoi en Allemagne contre les Brésiliens de Paranaense. Terence jouait défenseur central, imprenable ce jour-là. On avait beaucoup de blessés, de joueurs absents pour diverses raisons et on manquait de puissance offensive. Il m’a dit :« Coach, je peux monter ? »Je lui ai répondu :« Allez, fais-toi plaisir! »Il a fait la circulation pendant tout le match, il était partout. Un vrai leader. »

Le dernier produit du meilleur centre de formation des Pays-Bas

Forcément, les prestations du défenseur central attirent les convoitises des plus grands clubs européens. Qu’il balaie d’un revers de la main. « À seize ans, Manchester United, Arsenal et Chelsea étaient sur lui. Il a choisi de rester. Vous savez pourquoi ? », questionne Brard. « Parce qu’il voulait connaître Feyenoord d’abord.« Ensuite, j’irai tout en haut », m’a-t-il dit. Et il l’a fait » évoque un Stanley Brard pas peu fier. Hertog ne dit pas autre chose : « La saison dernière, même si ça faisait plusieurs saisons qu’il était en équipe première, je me rappelle que Terence allait serrer la main de tous les coachs du centre de formation et demandait comment tout se passait. Quand on est entraineur de jeunes, voir ça, ça rend fier. Aussi fier que de les voir accomplir leurs rêves de footballeur. » Soit. Kongolo a la tête sur les épaules. Mais il sait aussi qu’il est dans le club qui possède le meilleur centre de formation depuis plusieurs années. Des joueurs comme Stefan de Vrij, Bruno Martins Indi, Jordy Clasie ou Leroy Fer ont arpenté le même chemin avant lui.

« La meilleure solution, selon nous, c’était de donner du temps et de la place aux joueurs, de leur faire confiance. Terence avait de la technique, certes, mais il était malingre lors de ses premières années au Feyenoord. On lui a donné la possibilité de travailler, de grandir », poursuit Stanley Brard. Donner le temps aux jeunes, ça ne veut pas seulement dire les abreuver de savoir via les entraîneurs mais aussi leur permettre de grandir avec leurs coéquipiers, provoquer de l’émulation et de la confiance mutuelle chez eux. Vous imaginez ? De 8 à 18 ans, ça fait une décennie passée dans un club, dans un centre de formation, avec les mêmes personnes. Ça n’a pas de prix. » Au Feyenoord, Terence Kongolo se sent naturellement « comme à la maison » selon Damiën Hertog et très rapidement, les vestiaires du Varkenoord prennent des allures de porche ou d’abribus pour l’adolescent qu’il est. « Il vivait juste à côté du centre de formation, à dix minutes à pied. Lui et ses deux jeunes frères Rodney et Fidel étaient également joueurs au club, tout le temps dans les parages. »

Copain comme cochon avec Jean-Paul Boëtius

Un autre joueur, lui aussi né en 1994, trace la même route : Jean-Paul Boëtius. Très rapidement, Terence & Jean-Pierre devient le nouveau duo comique en vogue au Varkenoord. « Ils sont arrivés en même temps au centre du formation de Feyenoord, alors qu’ils avaient à peine 7 ou 8 ans, et depuis, ils sont copains comme cochons », plaisante Hertog. « Ils étaient toujours les premiers arrivés et les derniers partis, Vilhena aussi. Ils se posaient dans le vestiaire et discutaient de tout, de football, de la vie. Parfois, il arrivait que même une heure après la fin de l’entraînement, j’entende encore du bruit dans le vestiaire.« C’est quoi ce bazar ? »Bah c’était eux, en train de se marrer et de passer du bon temps ensemble. Parfois, il fallait même les décoller du banc parce que l’agent d’entretien prenait du retard sur son travail ! »

Les deux larrons montent en équipe professionnelle à peu près au même moment, Kongolo en mai 2012 et Boëtius en octobre 2012, retardé par un genou blessé. Si l’ancien ailier du FC Bâle et de Genk parvient à s’imposer dans l’effectif, Kongolo a un peu plus de mal, barré par De Vrij, Martins Indi et Mathijsen en défense centrale, avant qu’un genou en vrac ne mette entre parenthèses sa saison 2012-2013. La saison suivante, suite aux méformes de Mathijsen et Nelom, Kongolo alterne entre le poste de défenseur central et d’arrière gauche. Après une sélection surprise au Mondial brésilien, puis les départs de De Vrij et Martins Indi au mercato, le joueur d’alors 20 ans s’installe pour la saison en défense centrale aux côtés de Sven van Beek. Les arrivées combnées du nouveau coach Van Brocnkhorst et du Brésilien Eric Botteghin poussent à nouveau Kongolo vers le couloir gauche où Nelom est toujours aussi peu sécure. Nouvelle saison pleine, au point que Feyenoord imagine laisser partir son défenseur, principale manne financière pour renforcer l’équipe, pour 8 millions d’euros. Heureusement pour Feyenoord, il n’en sera rien, Kongolo sera l’un des hommes du titre en Eredivisie la saison dernière et partira pour 5 millions de plus sur le Rocher.

« Terence, il veut survivre »

« Je pense qu’il est meilleur comme défenseur central. Il est rapide, certes, mais pas assez rapide pour être un arrière gauche d’élite », analyse Stanley Brard. Ceci dit, je suis extrêmement surpris de ce qu’il a réussi à accomplir au poste d’arrière gauche à Feyenoord. Mais encore une fois, ça dit quelque chose de la mentalité de Terence : un jeune joueur qui ne joue pas à son poste va avoir tendance à discuter, se plaindre. Terence ne se plaint pas, il est content de jouer et fait le boulot quoi qu’il en soit. » Même son de cloche venant du côté de Hertog, qui verrait bien Kongolo devenir l’un des futurs cadres Oranje aux côtés de Virgil van Dijk : « Terence a sans doute plus de potentiel que Stefan de Vrij ou Bruno Martins Indi mais il doit encore prouver. Il est grand, physique et surtout, il a encore de la marge pour s’épaissir, pour prendre de la masse musculaire. Il sait aussi jouer sale quand il le faut. Être défenseur de haut niveau aujourd’hui, c’est de la survie et Terence, il veut survivre. »

Alors, survivra-t-il à l’AS Monaco, un club qui constitue cette marche supplémentaire dans la carrière d’un joueur en devenir et que semblent avoir raté Depay et Janssen ces dernières années ? « Monaco est réputé pour permettre à certains joueurs de passer un nouveau cap dans leur carrière donc je pense que Kongolo a choisi le bon club pour franchir une nouvelle étape », assure Hertog tandis que Brard parle d’un « excellent choix. À l’heure actuelle, c’est l’une des meilleures formations européennes et ça ne sera probablement pas le dernier arrêt de sa carrière. » Reste à savoir si Kongolo pourra s’adapter à ses nouvelle pénates après avoir vécu toute sa carrière au sein du même giron.

En shorts de bain sur le Rocher

Dans tous les cas, la compétition ne semble pas faire peur au défenseur international batave et la perspective de venir se frotter à des artistes de Ligue 1 comme Nicolas Pallois ou Florent Balmont sur les terrains de France et de Navarre, voire à ceux d’Andrea Raggi et Kamil Glik en Principauté, n’effraie pas le moins du monde Kongolo. « On ne dirait pas, mais Terence, c’est un joueur dur sur l’homme. Même avec ses coéquipiers à l’entraînement. Il aime l’engagement, la compétition. D’ailleurs, son principal atout, c’est son jeu en un contre un. Pendant les matchs, je l’ai déjà vu alpaguer son vis-à-vis parce qu’il parlait trop avec l’arbitre ou l’entraineur :« Moi, je ne plaisante pas. Si tu veux me battre, travaille et tais-toi ! » », rigole encore Stanley Brard.

Quel que soit le déroulé et l’issue de son passage sur le Rocher, Kongolo fera au moins un heureux dans les mois prochains : son ancien coach Damiën Hertog. « Je disais toujours à Terence et Jean-Paul :« Quand tu joueras dans un grand club européen, en France, en Italie ou en Espagne, je viendrais te rendre visite avec mon short de bain. » Et eux me répondaient :« Carrément, coach, faut venir! » », plaisante l’entraineur-adjoint de l’APOEL. « Va vraiment falloir que je songe à le faire maintenant. La plage à Monaco, c’est le pied. Donc Terence, si tu me lis, on se voit bientôt à Monaco en short de bain! »

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