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Tanguy Nianzou Kouassi : « J’ai trouvé à Séville ce que je cherchais »
Parti du PSG à 17 ans, puis du Bayern Munich cet été après deux saisons contrastées, Tanguy Nianzou est devenu à 20 ans un défenseur central qui compte dans le Séville FC de Jorge Sampaoli, 17e de Liga. Il assume ses choix de carrière et mesure le chemin qu’il lui reste à parcourir avant de prétendre à l’équipe de France.
Quel bilan fais-tu de tes premiers mois au Séville FC, où tu es arrivé cet été ?Je peux faire mieux. Je me suis bien intégré. La première phase, c’était ça avant tout : apprendre à connaître mes nouveaux coéquipiers, la ville, apprendre l’espagnol, s’adapter à un autre football, aux méthodes d’un nouvel entraîneur (Julen Lopetegui, remercié le 5 octobre, et remplacé par Jorge Sampaoli, NDLR). Donc j’ai été plutôt dans l’apprentissage de ce nouvel environnement pour commencer. Et maintenant, je sens que ça va de mieux en mieux à tous les niveaux.
T’es-tu déjà senti aussi important dans un club ?Important, je ne sais pas. On ne peut pas dire que je suis titulaire non plus. Personne ne l’est dans l’absolu, quel que soit le poste, donc je ne me sens pas installé si c’est la question.
Mais tu enchaînes beaucoup plus les matchs qu’au PSG (2019-2020) ou au Bayern Munich (2020-2022) en tout cas…Je joue un peu plus, c’est vrai (16 matchs toutes compétitions confondues, avec une blessure au quadriceps de la jambe droite qui l’a privé de 5 rencontres, NDLR), mais je ne veux pas rester sur mes acquis et me dire : « Je suis titulaire, c’est bon, je peux me reposer un peu. » Non, ce n’est pas comme ça que ça marche. Surtout pas. Je dois faire plus, chercher à progresser encore en travaillant.
À quel niveau ?Au niveau de la concentration surtout. Je suis conscient que j’ai parfois des sautes de concentration, qui peuvent m’amener à perdre un ballon sans raison, lors de certains matchs.
Comment expliquer la première partie de saison compliquée du Séville FC, seulement 17e en Liga et reversé en Ligue Europa après avoir été éliminé dès la phase de groupes de la Ligue des champions ?
Je ne sais pas vraiment, mais on ne peut pas nier qu’on n’a pas été à la hauteur de ce qu’on voulait faire. On va essayer de faire beaucoup mieux et de se faire respecter sur le terrain lors de la deuxième partie de saison. On est d’ailleurs bien partis avec cette victoire contre Getafe (2-1, dimanche dernier, NDLR). On a des top joueurs, comme Ivan Rakitić, des champions du monde (Marcos Acuna, Gonzalo Montiel et Papu Gómez, NDLR)… C’est vrai, on n’a rien à faire là, et on va le démontrer sur le terrain.
À quoi ressemblent les séances d’entraînement de Jorge Sampaoli ?Elles sont intenses ! C’est ça qu’on aime. Il a la grinta. Il veut des duels, du pressing, mais aussi qu’on garde le ballon, qu’on joue tranquillement. Mais à la perte de balle, c’est contre-pressing direct. Et si tu ne cours pas, tu es en danger. (Rires.) On va te crier dessus, te rentrer dedans. À moi, il me demande de ne pas perdre le ballon, d’être serein, de trouver la passe d’élimination pour faire avancer le jeu. De prendre des risques, mais au bon moment, pour résumer.
Il aime jouer avec trois défenseurs centraux. Ça te convient ?Il peut jouer avec une ligne de trois, quatre, cinq. Ça peut vraiment changer en fonction de l’adversaire. C’est le football moderne, il faut savoir s’adapter en permanence.
Dans quelle position te sens-tu le plus à l’aise ?Je suis capable de m’adapter à tout. À trois ou à quatre, ça ne me dérange pas. Je peux aussi dépanner au milieu, comme ça m’est arrivé au Bayern, mais pas encore ici. Mais je reste un défenseur central, le poste auquel j’ai été formé.
Qu’est-ce qui t’a décidé à partir du Bayern Munich, où tu as pourtant grappillé du temps de jeu lors de ta deuxième saison (22 matchs, toutes compétitions confondues) ?Je voulais passer encore plus de temps sur le terrain, pour pouvoir progresser. Pendant deux saisons, ça a été un peu difficile. Et je suis heureux de mon choix, parce que j’ai trouvé ce que je cherchais ici, à Séville : j’ai plus souvent l’occasion de me montrer et d’élever mon niveau.
Mais 22 matchs en une saison au Bayern, à 19 ans, c’est plutôt pas mal, non ?Oui, mais entre jouer cinq matchs et jouer toute une saison, il y a une différence. Je voulais plus. La concurrence était top au Bayern, parce qu’elle était saine, mais au bout d’un moment, tu as envie de jouer. Et donc la solution était de partir.
Qu’as-tu appris en Bavière ?À prendre la bonne décision au bon moment. J’avais tendance à faire des choses dans le mauvais timing à mon arrivée au Bayern, ce qui pouvait notamment déboucher sur des pertes de balle. J’ai aussi progressé au niveau de la mentalité. Je suis arrivé à 18 ans. La France, ce n’est pas l’Allemagne. Là-bas, c’est de la 1re à la 90e minute. On court, on presse, du début à la fin du match. Et une petite séance d’entraînement, ça n’existe pas. On se donne à fond, tout le temps, même sur une séance après un match. Et puis côtoyer au quotidien Thomas Müller, Robert Lewandowski ou Joshua Kimmich, qui m’impressionne beaucoup, ça fait forcément progresser.
Avec le recul, est-ce que tu regrettes d’être parti du PSG à 17 ans ?Pas du tout. Je n’ai aucun regret. Le Bayern a été une étape importante dans mon parcours. Ça m’a appris que rien n’est acquis, et qu’il faut toujours travailler pour avoir ce qu’on veut. Tu peux clamer partout « j’ai envie de jouer » , mais sans le travail, ça ne sert à rien.
Tu as joué six matchs lors de ta première saison en Allemagne. Ce temps de jeu, tu aurais pu l’avoir aussi à Paris, tu ne crois pas ?Avec des si, on refait le monde. Si j’étais resté, peut-être qu’il se serait passé autre chose. Je suis parti, donc on ne pourra jamais le savoir.
Pourquoi être parti, justement, sans la garantie d’avoir plus de temps de jeu et sachant que la concurrence n’était pas moins féroce qu’au PSG ?Pour le projet du club, qui nous a plu à moi et à mon entourage. Et c’est vraiment sans regret.
Le 14 février, il y a un PSG-Bayern en huitièmes de finale aller de la Ligue des champions…(Il sourit.) Et je vais évidemment le regarder, comme tout le monde. Ça va être un grand match, que le meilleur gagne. Mon cœur balancera pour… le ballon. (Rires.) Je serai supporter des deux équipes.
Comment as-tu vécu la Coupe du monde, toi qui es passé par toutes les catégories de jeunes en équipe de France ?Comme un fan devant sa télé, à supporter des amis. On était tous derrière eux. Les Argentins ont mérité leur victoire, il n’y a rien à dire. En tant que français, je n’ai pas été chambré par mes coéquipiers champions du monde, ça va. Quand ils sont revenus ici, ils ont parlé en bien des joueurs français et savent qu’ils ont eu chaud aussi en finale. Ils ont tremblé. Ça s’est joué à peu de choses finalement.
Varane, Konaté, Upamecano, Hernandez, Kimpembe, Saliba, voire Fofana et Kalulu… Le vivier français est riche à ton poste. Comment l’expliquer ?Il y a un niveau exceptionnel, c’est vrai. On a pu le voir à la Coupe du monde encore. Comment ça se fait ? Je ne sais pas. Mais nos centres de formation sont très bons, ça, c’est sûr. Les défenseurs centraux français, aujourd’hui, sont difficiles à passer, mais savent aussi relancer, dribbler, ils savent tout faire.
Es-tu loin des Bleus ?Je ne me pose pas la question et n’essaye pas de me comparer aux autres. J’essaye de travailler du mieux possible de mon côté et de progresser. Je me concentre là-dessus avant tout. La sélection nationale, c’est évidemment un objectif pour tous les joueurs, mais ce qui doit arriver arrivera. Je ne réfléchis pas à ça.
Tu n’as que 20 ans. Est-ce qu’on l’oublie et est-ce que les attentes qui t’entourent sont démesurées ?Elles ne le sont pas du tout, parce que je me dois d’être au niveau. Ça ne me dérange pas. On me demande de jouer comme quelqu’un d’expérimenté et c’est ce que j’essaye de faire. Ça ne me fait pas peur.
Propos recueillis par Thomas Broggini, à Séville