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Tanguy Ndombele, enfin à l’heure anglaise
Transféré à Tottenham durant l’été 2019 contre 62 millions d’euros (et dix de bonus), Tanguy Ndombele avait vécu des débuts tonitruants sous Pochettino, marquant un but dès la première journée de Premier League. Et puis l’arrivée de José Mourinho sur le banc des Spurs à la suite du limogeage de l'Argentin en novembre 2019 transformait petit à petit le rêve du Français en cauchemar. Mais ça, c’était avant. Rayonnant depuis le début de la saison, Tanguy a bien grandi.
Les statistiques sont parfois trompeuses. Tanguy Ndombele n’a inscrit que deux buts et n’a délivré que deux passes décisives cette saison. Mais se limiter à ces chiffres ne rendrait pas hommage au milieu français, qui illumine la capitale anglaise de son talent. Passé par Amiens et Lyon avant d’atterrir à Tottenham, Ndombele n’a laissé que des bons souvenirs en France. Romain Poyet, l’entraîneur adjoint d’Amiens, n’est pas surpris de la réussite du Français : « Je ne suis pas du tout étonné de sa forme actuelle. Il a vraiment quelque chose en plus. Je suis un grand fan de Tanguy. On l’a connu à Amiens quand il avait 16 ans, il commençait à venir s’entraîner avec le groupe pro. Quand il est venu dans le groupe, on a tout de suite vu en lui des qualités incroyables. » Même son de cloche chez Antonin Da Fonseca, l’actuel responsable de la performance à l’OL, qui a vu Ndombele évoluer à Lyon pendant deux saisons : « Tanguy, c’est un joueur exceptionnel. » Avant de mettre tout le monde d’accord sur son cas, le Français a quand même enchaîné les galères en Angleterre.
Dur de quitter le cocon
En arrivant chez les Spurs, Tanguy Ndombele a d’abord sorti une prestation convaincante et a marqué un but pour son premier match face à Aston Villa. Malgré tout, Mauricio Pochettino avait alors envoyé un premier message d’alerte en août 2019 : « C’était une performance fantastique. Mais pour être honnête, il y a beaucoup à améliorer. Il n’a montré que 30 ou 40% de son potentiel. » Pour s’imposer, l’international français allait devoir s’adapter et cravacher. Une première étape compliquée pour le joueur de 23 ans, pas forcément adepte de la salle de sport, comme l’explique Romain Poyet : « Il a dû changer depuis Amiens, mais c’est vrai qu’il fait partie des gens très doués et très talentueux. Du coup, il en faisait peut-être un peu moins à l’entraînement… » Comme à Lyon, Ndombele a alors vécu une transition compliquée et a eu du mal à trouver son rythme en Angleterre. Les blessures se sont enchaînées, et Mourinho a perdu patience après une défaite contre Southampton en début d’année : « Il est tout le temps blessé. Il est blessé, pas blessé, il joue un match, la semaine suivante il est blessé… Ensuite, il rejoue un match, on a plein d’espoirs, et c’est ainsi depuis le début de saison. C’est un souci. Vous pensez que le joueur est dans un processus d’évolution, mais aujourd’hui, il n’était pas prêt. » Mais comme à chaque fois, Ndombele n’a pas cédé à la panique, a encaissé les critiques, a appris et est retourné bosser comme il l’a expliqué au micro de Canal + : « Cette saison, ça se passe plutôt bien avec le coach et chacun a mis son ego de côté.(…)J’ai fait des erreurs, mais aujourd’hui, ça se passe bien. On a laissé ça derrière nous et on essaye d’avancer. »
« Sa nonchalance peut énerver… »
Si l’ancien milieu de l’OL a mis autant de temps à s’adapter, c’est peut-être aussi dû à sa personnalité. Pour obtenir le meilleur de Ndombele, il faut d’abord le comprendre. Romain Poyet : « Sa nonchalance peut énerver certains entraîneurs, mais après, on se rend compte qu’il est comme ça. J’ai déjà entendu des recruteurs dire qu’il était chiant à l’échauffement, qu’il traîne les pieds. Oui, il peut renvoyer cette image-là, mais quand tu apprends à le connaître, tu te rends compte que, malgré ça, il est capable de choses exceptionnelles sur le terrain. » Antonin Da Fonseca explique la même chose : « Quand on a appris que Mourinho devenait le coach de Tottenham, on était en plein entraînement avec l’OL. On s’est regardé avec certains joueurs et on a souri, parce qu’on savait comment ça allait se passer. Tanguy, c’est un mec entier, il est pareil avec tout le monde. Il peut arriver certains matins en rigolant et dire à l’entraîneur qu’il est fatigué et qu’il ne se sent pas de faire une grosse séance. » Ndombele ne change pas et reste le même avec les joueurs, les entraîneurs ou les membres du staff. Un trait de personnalité qui n’est pas toujours facile à accepter pour ses entraîneurs, mais une qualité énorme pour l’adjoint d’Amiens : « C’est presque aux entraîneurs de s’adapter à Tanguy, et si vous le faites, il vous le rendra sur le terrain. »
Liberté, régularité et sommet
Repositionné en numéro dix par Mourinho, le Français flambe aujourd’hui chez les Spurs. Ce changement de poste lui permet plus de liberté, et le milieu peut maintenant exprimer toutes ses qualités. Ce faux lent est capable d’éliminer, de casser des lignes ou de jaillir dans les pieds pour récupérer des ballons, comme il l’avait montré lors de sa masterclass avec l’OL contre le PSG. Pour définitivement s’imposer, le joueur français manque encore de régularité. C’était déjà le cas à Amiens selon Poyet : « Je l’attaquais souvent gentiment sur le fait qu’il pouvait faire un truc incroyable et banaliser la passe derrière. Je le titillais sur sa faculté à valoriser ce qu’il avait fait avant. Aujourd’hui, il lui manque un peu de régularité, même si c’est en train de se mettre en place. » Mais encore une fois, le joueur en est conscient, comme il l’a glissé aux micros de beIN : « Je suis d’accord avec le fait de gagner en régularité. En sélection, il y a de très bons joueurs à mon poste. Mais je ne m’avoue pas vaincu, et on verra à la fin. » Et la fin est souvent la même : Ndombele retourne les sceptiques.
Par Julien Bialot