Taiwo, taillo taillo !

29 avril 2006, Saint-Denis, Stade de France. Sixième minute de la finale de Coupe de France, entre le Paris Saint-Germain et l’Olympique de Marseille. Edouard Cissé récupère le ballon dans les pieds de Taiwo, transmet à Kalou qui viole Fabien Barthez devant 80 000 personnes. Un but qui n’aurait jamais vu le jour si le défenseur nigérian avait laissé sortir ou dégagé le cuir, au lieu de tenter une sortie en solo. Pour ses détracteurs, ce Taiwo-là respire encore. Pour le reste, le Nigérian est allé au-delà pour devenir le meilleur arrière gauche de France.

Une chose est sûre en 2009 : Taye Ismalia Taiwo est, au même titre que Mandanda, Cana et Niang, un joueur indispensable à l’Olympique de Marseille, voire l’élément le plus régulier cette saison sous le maillot blanc ciel. Recruté pour une cuillère de bouillabaisse en 2005, le natif de Lagos aura mis le temps avant d’exprimer pleinement son potentiel. Longtemps, on le soupçonnera de n’être justement qu’un potentiel. A savoir : un pied gauche terrible, un physique sans concession, une puissance qui ne se dément pas, mais également dans ses bagages, une conception très évasive du replacement, de la prise de risques et une perception très personnelle du concept de centre.

Aujourd’hui, le latéral gauche a corrigé bon nombres de ses défauts, jusqu’à en faire des atouts. Toujours doté de cuisses insolentes, d’une capacité de débordement et de percussion rare en Ligue 1, Taiwo fait désormais montre d’une technique plus juste, lui permettant de se sortir de petits espaces, d’éliminer un adversaire autrement qu’en poussant loin son ballon, et d’une précision l’autorisant à déposer la gonfle dans les zones érogènes de la surface de réparation.

À plusieurs reprises cette saison, par exemple contre Bordeaux, le week-end dernier, il a prouvé que revenir défendre ne lui faisait plus peur au prix de retours autoritaires dans ses seize mètres, même si son placement reste perfectible. Puis, par gourmandise, il s’est même offert un jeu de tête, toujours utile sur phase arrêtée. Bref, pas un hasard si, avec Bonnart et Mandanda, Taiwo est l’un des joueurs les plus utilisés par Eric Gerets. Revers de la médaille, après les échecs Givet et Erbate, le Belge n’a aucune doublure crédible, à moins de bouleverser toute sa ligne de défense pour pallier une éventuelle absence.

Si certains s’obstinent à le réduire à ses errances d’antan, à le rabaisser au rang d’un défenseur moyen et trop porté vers l’avant, d’autres reconnaissent les progrès effectués depuis deux ans, comme Jean Fernandez, ancien entraîneur de l’OM aujourd’hui à Auxerre, sur le site Sportweek.fr : « C’est le meilleur arrière gauche de L1, c’est un monstre physiquement et il a toutes les qualités pour s’imposer dans un grand club de Ligue des Champions. Il n’a rien à envier à Abidal à Barcelone ou Evra à Manchester » . Parce qu’il faut se le dire, Taye Taiwo partira sans doute à la fin de la saison. Certainement pour l’Angleterre, et pour une valeur cent fois plus élevée que lors de son arrivée selon Pape Diouf. Avec le temps et un peu de patience, le Ballon de Bronze des Championnats du Monde des moins de 20 ans 2005 (derrière Messi et son compatriote Mikel) est donc une belle réussite pour la cellule de recrutement phocéenne. Et sinon, quelqu’un a des nouvelles d’Edouard Cissé et de Bonaventure Kalou ?

Daniel Green