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Tagliaglioli : « Ici, personne n’a peur de prendre le balai »

Propos recueillis par Maxime Brigand
7 minutes
Tagliaglioli : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Ici, personne n&rsquo;a peur de prendre le balai<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Jean-Michel Aulas additionne les tweets, Loulou Nicollin collectionne les maillots, et lui a construit son rêve. À 77 ans, Fanfan Tagliaglioli, co-président du Gazélec Ajaccio, s'apprête à vivre son dépucelage dans l'élite. Rencontre avec un authentique, entre coups de balai et Tony Chapron.

Quelques mois après la fête, le Gazélec s’apprête à vivre sa première soirée de Ligue 1. Comment allez-vous président ?

Honnêtement, tout va bien. On est bientôt fin prêts. Notre directeur sportif, Christophe Ettori, et le coach Thierry Laurey ont fait un recrutement ambitieux dans la continuité de celui effectué la saison dernière. Pareil pour le stade Ange-Casanova, il est beau. Il sera définitivement prêt pour la réception d’Angers le 22. Durant l’été, on est passé à 5000 places assises contre 2900 jusqu’ici. On va continuer les travaux tout au long de la saison pour atteindre progressivement les 8000. Je vous promets, le stade est beau, il l’est vraiment.

Quel objectif s’est fixé le Gazélec pour cette saison ?

Bien sûr, notre ambition est de se maintenir. Vous savez, pour nous, être ici c’est déjà incroyable. Un maintien serait comme un titre de champion. Jusqu’ici, une montée en Ligue 1 était inespérée et un jour, tu te réveilles et tu y es. Le soir de l’accession, c’était le plus beau jour de ma vie. Maintenant, on va se battre.

Justement, comment le club a-t-il préparé son budget ? Sur une dix-septième ou une dix-huitième place ?

On s’est fixé ensemble un budget pour jouer la quatorzième-quinzième place. On attend de voir combien de clubs vont descendre et on a signé, nous aussi, la motion de censure pour contester la décision de la FFF d’annuler le choix de la Ligue concernant une descente à deux clubs. On soutient le fait qu’il n’y ait que deux descentes en Ligue 2, c’est dans notre intérêt.

Comment s’est passé l’été à Mezzavia ?

L’engouement est extraordinaire, en Corse tout le monde est fier de nous. Avec un budget aussi dérisoire, les Corses nous soutiennent c’est normal. On vit dans un petit rêve. Le président du Sporting de Bastia m’a appelé pour me féliciter, Bernard Tapie aussi et m’a même proposé de nous aider un peu. Mon ami Courbis m’a téléphoné aussi. Aujourd’hui dans les rues à Ajaccio, des gens s’arrêtent encore pour me féliciter.

L’an dernier, le club avait engagé un recrutement d’expérience. Pujol, Bréchet et Ducourtioux étaient arrivés. Pendant le mercato, le Gazélec a déjà recruté Kader Mangane, l’expérience est encore une priorité ?

On a souhaité conserver l’ossature principale de l’équipe qui est montée. Douze ou treize joueurs de l’effectif sont restés et en plus, on a ajouté des gars qui connaissaient déjà le haut niveau. Kader Mangane était à Rennes il n’y a pas si longtemps, Sylla aussi avec Toulouse. Cette semaine, il y a aussi Alexandre Coeff qui est arrivé en prêt de l’Udinese, ce qui étoffe notre effectif en qualité. Encore 2-3 joueurs et le recrutement sera terminé.

Y-a-t’il une volonté de garder également une touche corse à l’effectif ?

Malheureusement, aujourd’hui c’est compliqué. La plupart des joueurs issus de l’île n’a pas le niveau de la Ligue 1. On essaye de garder cette identité avec des gars comme Poggi, Filippi, Sinapi. Après vous savez, il n’y a plus de joueurs marseillais à Marseille. La même chose à Paris.

Autre anomalie, le Gazélec est le seul club, Ligue 1 et Ligue 2 confondues, à ne pas posséder pour le moment la licence-club. Est-ce en cours de régularisation ?

On est aussi en attente. Normalement, lorsqu’à la fin du mois tous les travaux seront terminés, on devrait rentrer dans les critères de la Ligue et atteindre les fameux 6500 points. On toucherait directement presque 3 millions d’euros et quand on connaît notre budget, ça nous ferait du bien. Cette saison, avec cette licence, on atteindrait un budget de 13,8 millions d’euros, soit je pense le plus faible de l’histoire de la Ligue 1. Paradoxalement, au moment où le plus gros a le plus important de l’histoire.

Justement, ce « gros » , le PSG, vous allez le retrouver au Parc des Princes dès la deuxième journée.

Oui et c’est un honneur. Jamais j’aurai pensé un jour rencontrer le PSG en championnat. Quand j’ai découvert le calendrier, je croyais encore que je rêvais. Mais on n’a pas à rougir, très certainement on va perdre à Paris mais on se battra à fond avec nos valeurs. Vous savez, j’ai longtemps travaillé là-bas. Paris c’est un peu mon village aussi. Après, je suis plutôt un supporter de l’OM même si le Gazélec passe avant tout. Ce club est dans mon cœur, il coule dans mes veines. Je l’ai dans le sang.

C’est aussi ce qui fait votre force, cette image à part. Qui sont les supporters du Gazélec concrètement ?

Déjà nous, on n’a pas de spectateurs. On est un club populaire dans tout son sens. On a des supporters historiques, à Ajaccio mais aussi en Haute-Corse. En CFA, en National, en Ligue 2, c’était les mêmes. Pour la Ligue 1, 80% du stade sera occupé par des abonnés. On ne vendra pas beaucoup de billets supplémentaires. Le Gazélec est le club historique en Corse, c’est la première équipe a avoir ramené un trophée : un championnat de France amateur en 1963. Ces joueurs aussi, présents dans l’équipe à cette époque, on ne les oublie pas. C’était des amis d’enfance. Beaucoup ont disparu maintenant, et les quelques survivants viennent encore à Ange-Casanova.

Comment fonctionne le club en interne ? L’année dernière, on avait déjà évoqué son petit nombre de salariés.

Le Gazélec, c’est une grande famille. On est vraiment dans le cadre d’un club familial. Je suis président oui, mais les autres sont comme moi ici. Toutes les décisions sont prises à la majorité, que ce soit du domaine des infrastructures ou de l’argent. On est tous passionnés comme vous et moi. J’ai 77 ans hein, je suis en fin de carrière. Mais ici les jeunes prennent le relais. Personne n’hésite à poser la pelouse, à nettoyer le stade, les vestiaires, on n’a pas honte de passer le balai. On est humain.

Quel regard portez-vous sur le travail de votre entraîneur, Thierry Laurey ?

C’est un bon coach, engagé et qui prend son travail à cœur. Il est même plus qu’un entraîneur, c’est un manager. On a constitué progressivement autour de lui un bon staff, un vrai staff de Ligue 1. Et il est surtout accompagné de Christophe Ettori, notre directeur sportif, qui fait un travail monstre.

Cette montée, est-ce également l’occasion de prendre une revanche sur les instances du football français qui vous avaient empêché de monter en D2 en 1999 ?

On peut parler de revanche. D’ailleurs, l’article qui nous avait empêché de monter a depuis été supprimé. Le prétexte était qu’une ville de moins de 100 000 habitants ne pouvait accueillir deux clubs professionnels. C’est une connerie de règlement qui nous a fait perdre à l’époque nos joueurs majeurs, que ce soit Mickaël Pagis ou Pascal Olmeta. On s’est vite retrouvé sans équipe, sans rien. Alors se sortir de cette période est encore plus fort, c’est là que l’on voit la force de nos dirigeants. On aurait pu tout arrêter à ce moment là.

Il y a eu aussi ce projet de fusion avec l’AC Ajaccio, l’autre club de la ville…

Oui, mais c’est une idée assez difficile à mettre en œuvre. On en avait même reparlé en 99. Le projet d’une fusion avec l’ACA a toujours été repoussé et jamais appliqué, c’est du passé maintenant. La rivalité entre les deux clubs est avant tout sportive, on a aucun problème. Parfois, le jardinier de l’ACA vient nous filer un coup de main, on se connaît tous à Ajaccio vous savez. C’est sain.

Il y a quelques jours, un match a encore été arrêté après des échauffourées face à Cagliari. En 2013, le Gazélec avait déjà connu des problèmes en Ligue 2 avec l’arbitre Tony Chapron. Les problèmes hors terrain sont-ils vraiment derrière le club ?

Avec Cagliari, c’est toujours la même chose. On le sait. Après, en ce qui concerne Tony Chapron, il est toujours discuté partout où il passe. Chez nous, ça a été la même chose dès qu’il est venu. Maintenant, j’ai gagné mon procès. C’est du passé.
Dans cet article :
PSG : rêvons dans l’ordre
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