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- J27
- Rennes-Nice (1-2)
Tactique : Hicham Boudaoui, le distributeur des sables
Titularisé en relayeur à Rennes vendredi soir, le milieu algérien de l'OGC Nice a été « monstrueux » selon son entraîneur, Adrian Ursea, et salué par tous pour sa nouvelle performance complète. Mais pourquoi ? Décryptage.
Hicham Boudaoui a l’image d’une porte. Littéralement. Explications de l’intéressé : « Ma famille est originaire du Sahara algérien. Les gens du Sahara ont des habitudes et des traditions qui sont un peu différentes du reste de l’Algérie. Ils sont plus timides et plus calmes. C’est pour ça que je suis calme, peut-être trop calme. » Questionné par L’Équipe dans la quête d’un portrait il y a quelques jours, le jeune milieu algérien a peiné à masquer sa timidité, ce à quoi l’un de ses formateurs au Paradou AC, Olivier Rousset, a ajouté quelques éléments : « Honnêtement, c’est après un ou deux ans avec lui que j’ai dû entendre le son de sa voix. » Pas de panique : la porte Boudaoui peut aussi, et surtout, claquer, de manière à ouvrir et fermer les espaces, ce qu’on a vu vendredi soir sur la pelouse de Rennes où, après quelques semaines passées dans un déguisement de sentinelle, celui qui est arrivé chez les Aiglons en septembre 2019 a été installé par Adrian Ursea dans un rôle de relayeur. Résultat ? L’Algérien a renversé d’un coup de pied un gros baril d’étincelles et a rayonné sur la pelouse du Roazhon Park, jouant au passage un rôle central dans la première victoire niçoise à l’extérieur depuis un succès arraché à Lens (0-1) mi-janvier. Trois points pour un coup à trois bandes : l’OGC Nice a enfin livré un match complet, au point de réussir à gommer certaines erreurs individuelles – notamment celle de Saliba qui a amené au but de Terrier – par des éclats collectifs, Ursea voit ce lundi ses hommes pointer à sept longueurs de la zone rouge et le coach azuréen sait pour de bon qu’il tient avec Hicham Boudaoui un footballeur à part.
« Il a été monstrueux »
Par quel bout prendre la promesse du désert ? Peut-être par un fait simple : Boudaoui sait tout faire. On parle ici d’un joueur qui détient, à Nice, le record de la saison en matière de courses à haute intensité (142 sprints à plus de trois mètres par seconde), du jamais-vu « en quinze ans de carrière » selon le préparateur physique des Aiglons, Nicolas Dyon, également interrogé par L’Équipe. L’explosion d’Hicham Boudaoui, excellent lors de la préparation l’été dernier, était attendue depuis longtemps. Une blessure au genou est finalement venue interrompre le décollage en août, mais début 2021, alors que Morgan Schneiderlin a dû soigner un mollet, l’international algérien a récupéré les clés du camion avant d’être associé à l’ancien joueur d’Everton. Les chiffres de son match livré à Rennes ne mentent pas : en relayeur, Boudaoui a pesé offensivement (un tir, quatre dribbles réussis, une passe clé, quatre fautes subies, deux petites passes ratées) et a été impérial défensivement (cinq ballons récupérés, deux interceptions, aucune faute). « Il a été monstrueux, a tranché Ursea après la rencontre. Il a tenu la dragée haute à un espoir du foot français. » À savoir : Eduardo Camavinga, à qui Boudaoui a réussi à faire tourner la tête.
Placé en relayeur dans le 4-3-3 niçois, Boudaoui a été un poison permanent pour Camavinga, cherchant toujours à prendre la profondeur dans le dos de l’international français.
Cette projection a offert des angles de passe à Saliba pour toucher Kamara côté gauche, Boudaoui attirant alors dans certaines situations l’attention de Traoré.
Une fois Kamara touché, Boudaoui pouvait ensuite être trouvé dans le dos de Traoré, avec toujours un temps d’avance sur Camavinga.
De cette position, Boudaoui a fait passer quelques frissons à la défense rennaise comme sur cette séquence où, trouvé par Kamara…
… Il peut atteindre un Maolida ensuite trop timide face à Gomis.
Autre situation où Boudaoui a pris le dessus sur Camavinga : lorsque Saliba a eu le ballon, l’Algérien n’a parfois pas hésité à décrocher pour devenir un appui précieux…
… Ici, non suivi par Camavinga, il peut jouer un une-deux rapide avec Saliba, qui peut ensuite chercher Gouiri dans la profondeur.
Troisième facette de son rôle : lorsqu’il ne s’est pas projeté ou lorsqu’il n’a pas décroché, Boudaoui s’est simplement glissé dans le demi-espace gauche face au 4-2-3-1 rennais.
De cette position, il a alors pu faire parler ses qualités de dribbleur, tout en embrouillant les Bretons (ici Traoré sort sur lui, abandonnant alors Kamara, pendant que Nzonzi marche).
Boudaoui peut alors lancer Kamara dans son couloir.
C’est aussi de cette zone qu’il va décoller…
… pour obtenir un penalty dans les pieds de Da Silva.
Précieux dans le camp rennais, Hicham Boudaoui, utile dans son pressing, a aussi été brillant dans son propre camp pour couper les mouvements bretons ou pour sortir les ballons, ce qui avait déjà été le cas sur plusieurs séquences face au PSG.
À la demi-heure de jeu, on l’a ainsi vu couper Camavinga dans son élan…
Avant de remonter tout le terrain. Au bout : Maolida va toucher le poteau de Gomis.
Juste avant la pause, c’est dans sa capacité à résister à la pression qu’on l’a vu exceller. Ici, alerté par Saliba…
… il va attirer la pression rennaise avant de décaler parfaitement Kamara.
Même chose ici avant de sortir où sa talonnade permet à Nice de se sortir de la pression.
Seule tache de sa nuit rennaise, Boudaoui a été découpé par Doku en première période avant d’être de nouveau tamponné dans la foulée par Camavinga, ce qui l’a fait finir sa partie sur une jambe avant d’être remplacé par Lees-Melou. Vitesse dans la réflexion, joie dans la récupération et intelligence dans les transmissions, résultat ficelé : le job était déjà fait.
Par Maxime Brigand