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Tactique : comment le PSG a implosé à Madrid

Par Maxime Brigand
Tactique : comment le PSG a implosé à Madrid

Pendant 60 minutes mercredi soir, le PSG a joué un match intelligent au Bernabéu et a appuyé sur les plaies ouvertes d'un Real à l'agonie. Puis, les Parisiens, arrivés à Madrid sans la moindre victoire à l'extérieur en C1 cette saison dans les chaussettes, ont implosé, confirmant qu'un match de phase de finale de Ligue des champions ramène le foot à son essence la plus pure : celle d'un sport qui sait basculer dans l'irrationnel lorsque l'histoire l'exige.

Mardi après-midi, Neymar, cheveux en pagaille et regard vif, s’est pointé derrière un micro pour planter son regard en direction d’un écran, où un journaliste est venu lui présenter une addition – 7+3 – sous le nez. D’un coup d’un seul, le Brésilien s’est alors transformé, laissant son sens du tragique et sa vision chevaleresque des nuits européennes le porter : « C’est spécial pour tout le monde de jouer face au Real en Ligue des champions. On a tous envie de bien jouer, de marquer l’histoire du PSG. Ce que nous voulons le plus, c’est gagner cette compétition. Si nous jouons en équipe, nous pouvons le faire. Nous allons faire la même chose que nous avons faite à l’aller. Nous devons faire le match de notre vie. » Partante, l’Europe du foot a alors serré sa ceinture et noué sa serviette, prête à en prendre plein les mirettes, à voir le PSG vainqueur logique de la manche aller débouler couteau entre les dents sur le Bernabéu là où Carlo Ancelotti a espéré tout haut voir son Real proposer un match « intelligent » pour « ne pas devenir fou » et « rester en vie » autant que possible. Pendant trois semaines, les staffs se sont fait des nœuds à la tête, et les collectifs ont affiné leur plan. Puis, la Ligue des champions a une nouvelle fois soufflé son monde.

Durant un peu plus de 60 minutes, ce Real-PSG a été une bataille tactique plaisante, nettement dominée par des Parisiens intelligents dans leur gestion des débats et assez lucides pour profiter des espaces ouverts par des Madrilènes plus agressifs qu’au Parc des Princes, mais aussi parfois plus déconnectés sur quelques séquences, les sprints de la première ligne de pression blanche n’étant pas toujours suivis par l’ensemble du onze. Ainsi, de nombreuses plateformes se sont ouvertes autour de Kroos pour les « déséquilibristes » que savent être Neymar, Messi, Verratti et Mbappé. Pendant une heure, les deux premiers cités, dans le dur pour créer par le dribble à Madrid, ont plutôt bossé sans ballon – Neymar, positionné en faux 9, a notamment fait un travail de couverture sérieux sur Kroos lors du début de match avant de lever le pied alors que Messi a gratté plusieurs ballons chauds en première période – et se sont parfaitement étagés dans le sillage du hibou italien et de Paredes pour faire parler leur qualité d’archer afin d’envoyer Kylian Mbappé labourer les grands espaces. D’abord malin, le PSG, sans victoire à l’extérieur en C1 cette saison, a longtemps maîtrisé son match, alternant séquences de possession réfléchies et transitions dévastatrices, et a eu le luxe de profiter à plusieurs reprises de ballons mal perdus par un Real souvent impatient et pas toujours bien réparti lors des phases avec ballon (Asensio souvent trop intérieur et dos de Carvajal transformé en piste de décollage, ce qui est risqué lorsque l’avion s’appelle Kylian Mbappé). Le but inscrit en première période par la gâchette française au bout d’une ouverture téléguidée de Neymar est d’ailleurs venu sanctionner ces soucis de quadrillages. De son côté, le PSG n’a pas pu recopier son organisation défensive de l’aller – un un-contre-un généralisé sur la relance madrilène avec un trois-contre-trois assumé derrière – et a principalement choisi de placer Messi et Neymar à l’intérieur pour mieux fermer l’axe tout en appuyant sur la proximité des deux lanceurs à la récupération. Le 4-3-3 parisien, plutôt haut mais structurellement incapable de gérer l’intégralité de la largeur, a également accepté de subir quelques renversements de Kroos (qui a bouclé la nuit avec un 100% de réussite dans ce registre) et un paquet de centres (13 sur la première heure). Malgré un Marquinhos rapidement glissant, Pochettino a majoritairement vu ses gars gérer, subir des frappes hors de la surface et l’Argentin a pu un temps souffler : mercredi soir, à 22h10, ses hommes menaient 1-0 et étaient passés, à deux reprises, tout près de sanctionner pour de bon un piège du hors-jeu madrilène tenu par un fil fragile.

Le carré Messi-Neymar-Paredes-Verratti a été la clé de la nette domination tactique du PSG lors de la première heure de jeu. Sur cette séquence, on voit bien le souci d’étagement des membres du quatuor et la volonté parisienne d’occuper les flancs de Kroos. Un 4v3 a souvent pu être mis en place dans le cœur du jeu.

Exemple d’une bonne combinaison parisienne autour de Toni Kroos et de la perméabilité du bloc madrilène sur certaines séquences des 60 premières minutes de jeu : libre de toute pression, Verratti trouve Mbappé dans le demi-espace droit, alors que Neymar va occuper la zone du demi-espace gauche…

… Mbappé va trouver son coéquipier brésilien, qui peut ensuite profiter de l’espace laissé par Militão…

… et peut armer sur Courtois.

Autre bonne séquence : laissé libre face au jeu, Paredes peut toucher Mbappé dans le dos de Kroos, alors que Messi est déjà dans le demi-espace droit. Dos au jeu, le Français résiste à la pression d’Alaba…

… va s’appuyer sur Messi…

… et attaquer directement l’espace ouvert par le défenseur central autrichien.

La grande proximité du trio Neymar-Mbappé-Messi a également permis à Mendes et Hakimi d’occuper les couloirs sur certaines périodes. Comme à l’aller, on a retrouvé Danilo en couverture d’Hakim sur ces phases avec ballon. Celle-ci a débouché sur une ouverture de Kimpembe vers Mendes et un but refusé à Mbappé pour un micro hors-jeu du latéral portugais.

L’odeur de l’essence

C’est alors qu’autre chose a surgi au nez de millions de curieux. Il n’y a soudain plus eu de tableau noir. Il n’y a soudain plus rien eu. Le Santiago Bernabéu n’offre aucun droit à l’erreur, et encore moins un soir de match décisif de Ligue des champions. Les ampoules ont alors explosé une première fois dans la foulée d’une erreur de Gianluigi Donnarumma (ou d’une faute de Benzema sur Donnarumma non sifflée, c’est selon), confirmant qu’une gamelle européenne du PSG commence souvent par une histoire de gardien, puis, après que le PSG a réussi à calmer un temps la tempête (notamment à l’aide d’une phase de possession de 49 passes échangées !), Luka Modrić a décidé de ressortir sa planche de surfeur des moments brûlants. Un match retour de C1 ramène le foot à son essence la plus pure, et c’est ce qui rend ces rencontres aussi uniques : soudain, d’un coup d’un seul, on ne parle plus d’équilibre, mais de vulnérabilité, qu’elle soit physique ou mentale. Un match retour de C1 se gagne à la capacité d’une équipe à absorber les secousses sans trembler et à, comme l’espérait Ancelotti avant le coup d’envoi, sa faculté à « rester en vie ».

Mercredi soir, le Real n’a jamais posé le genou à terre et, lorsque Luka Modrić a intercepté une passe de Neymar devant sa surface à un quart d’heure de la fin, qu’il a baissé la tête pour mieux démarrer sa mobylette au cœur du milieu parisien avant de propulser un Vinicius lancé à pleine vitesse et qu’il a ensuite trouvé Karim Benzema entre Marquinhos et Nuno Mendes, plusieurs récits sont remontés dans les têtes. Celui du miedo escenico de Bernabéu, un concept popularisé par Jorge Valdano que Mauricio Pochettino a réveillé il y a quelques jours pour évoquer la peur que peuvent parfois faire ressentir les planches madrilènes. Celui de Juanito, qui lâcha en 1986 ces mots : « Quatre-vignt-dix minutes au Bernabéu, c’est très long. » Dans la foulée de l’égalisation de la 61e minute de jeu, porte qu’il fallait à tout prix laisser fermée, ce sont ces récits qui se sont réveillés : le Real, qui a gagné en qualité technique et en volume avec l’entrée de Camavinga, a soudainement su équilibrer son pressing, reconnecter ses lignes et n’a plus offert la moindre miette (le PSG n’a d’ailleurs frappé qu’une fois, sur coup franc, lors de la dernière demi-heure). Une fois encore, le rêve parisien a pris la fugue au terme d’une seconde période où le bloc défensif du PSG, incapable de trouver la moindre parade émotionnelle à la glissade, a été très passif et, une fois encore, on parlera d’occasion manquée (peut-être notamment de celles de l’aller). Il n’y a parfois pas d’autre explication qu’un simple « c’est le football… ». Comme Marco Pantani, rêveur à bicyclette aimant répéter en son temps qu’il existe « toujours une fenêtre ouverte » au nom du romantisme, Carlo Ancelotti, qui a une nouvelle fois vécu les bourrasques en roi mâchant un chewing-gum avec les mains dans les poches, a cru au destin d’un club avec lequel il a déjà traversé plusieurs vagues. Le Real Madrid se moque de la pente et du scénario pré-écrit : c’est une broyeuse sur vingt-deux jambes, portée par un Karim Benzema revenu à 100% et auteur d’un triplé lui permettant de dépasser Alfredo Di Stéfano au classement des meilleurs buteurs de l’histoire de sa boutique. Benzema qui, il y a quelques années, affirmait jouer au foot pour « montrer autre chose aux gens » et « jouer pour ceux qui aiment le foot et vont au stade pour voir autre chose ». Cette autre chose s’appelle l’irrationnel.

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