Sur les traces de Pontcharra Saint-Loup

Un énième coup de téléphone. Cette fois, c’est la Fédé, en direct de Paris. Le brave homme s’interroge sur l’AOP, l’autorisation d’ouverture au public. En réponse, la présidente du Football Club de Pontcharra Saint-Loup (FCPSL) fait la moue. Annick Di Stéfano apprendra très vite qu’aucun village du coin ne possède dans ses tiroirs ce fameux document qui permet d’accueillir, dans le bon droit, un match de ce niveau. « Au 6^e tour, on a enregistré plus de 800 entrées autour de notre stade. Pour ce match, la réglementation nous bloque à 299 billets. Quand je pense qu’on n’a pas fait payer au tour précédent… Depuis qu’on le sait, on cherche un terrain qui pourrait nous accueillir » , souffle la présidente, un brin fatiguée. Parce que si l’aventure est belle pour cette équipe de Promotion d’excellence, l’accumulation des matchs n’est pas qu’un doux rêve. « On est heureux bien entendu, mais on dépense tellement d’énergie avec la coupe. L’objectif principal est bien de monter en Excellence » , rappelle Annick. En récompense, 1500 euros de la Fédération française de foot (FFF), une somme qui servira à payer les frais, comme la présence des dirigeants à Paris lors du tirage.

Sidney Govou en guest star ?

Comité national olympique et sportif, Mickaël Landreau et Marc Lavoine la main dans le sac. Pour l’entraîneur du petit poucet, Frédéric Tricaud, mais aussi pour l’ensemble du club, l’espoir est de choper une Ligue 2, genre Dijon, Clermont ou encore Bourg-Péronnas. Pas de bol, ce sera le FC Limonest, formation de la banlieue chic lyonnaise. « C’est un tirage mitigé, on espérait un match de rêve face à une équipe professionnelle » , regrette l’entraîneur. Parce que cette équipe de Limonest est une écurie évoluant en Honneur, leader de sa poule et des ambitions affichées de CFA2, la fessée peut être cruelle.

Face aux pros, l’honneur est toujours sauf. Dans cette équipe, le coach Jean-Michel Picollet arbore un 16^e de finale de coupe avec Villefranche-sur-Saône contre l’ASSE (2010), pour une élimination aux penaltys. Mais aussi Definod, milieu de terrain la saison dernière à Bourg-Péronnas lors de la montée en Ligue 2 et surtout, un certain Sidney Govou. Insatiable de foot, le finaliste de la Coupe du monde 2006 avec les Bleus prend encore du plaisir à 36 ans sur les terrains régionaux. Autre fait marquant pour le FC Limonest, une élimination au 7^e tour l’an passé contre le FC Sochaux (5-2). Alors oui, présentée comme ça, la montagne paraît plus que casse-gueule.

Un événement aussi rare que des truites dans la rivière locale

À Pontcharra, on regarde passer la Turdine, une rivière changeante selon les humeurs des usines de textile avoisinantes. Enfin ça, c’était avant, parce qu’il paraît que dorénavant des poissons oseraient l’expérience. L’église, le Café de la place, le Sporting bar, tout est là, comme un décor de Jour de fête. Après quelques saisons galères, le club de foot se fait mousser de nouveau : 370 licenciés, des équipes dans toutes les catégories, une section fille ancrée depuis 1970, un nouveau terrain synthétique et dans les vieux tuyaux, le latéral Serge Blanc passé chez les débutants. Au palmarès, une finale de Coupe du Rhône (2000) et un 6^e tour de Coupe de France contre les Minguettes en 1987. Alors ce match contre le FC Limonest, c’est un événement aussi rare qu’une truite pêchée dans la rivière locale.

Quand la FFF se garde des droits d’auteur

À 19 ans, planté en défense centrale, Tanguy Flachez, fils de, ne se prend pas la tête : « Bien sûr que ça va être la fête, mais on va d’abord jouer un match de foot pour le gagner. En coupe, tout est possible. » Son père Maxence, aujourd’hui en charge de la CFA de l’OL, et joueur d’une demi-finale de Coupe de France avec Grenoble contre Rennes en 2009, veille au grain. « Il joue le samedi avec l’OL, alors mon père vient nous voir le week-end. Il me conseille, notamment sur mes placements, mais ça ne va pas plus loin. Je suis des études de bio, le foot ça reste un loisir, on verra bien après… » , poursuit Tanguy.

Des discussions entre clubs pour un accord initialement trouvé sur le terrain de Marcy-l’Étoile, autre banlieue chic de Lyon. Un terrain certifié AOP pouvant accueillir 2000 spectateurs. Mais ça, c’était avant les événements du week-end dernier et une annulation le matin même du match. Dans la précipitation, c’est finalement à Limonest que Pontcharra Saint-Loup accueillera ce 7^e tour. Un défi rendu encore plus improbable. Au terme de la rencontre, la Fédé se gardera 50% de la recette, le reste étant à partager entre les deux acteurs. Si la Coupe de France est un réservoir de belles histoires à raconter, elle n’est pas seulement qu’une fête à savourer sans compter.