- La vie des supporters de Montpellier
Supporter du Montpellier Hérault SC : mode d’emploi
Les supporters de France à l’honneur sur sofoot.com. Nous sommes partis à la rencontre de ceux qui font vivre nos stades, qui célèbrent pour leur club, qui pleurent pour leur club. Bref, ceux qui vivent pour leur club. Aujourd’hui, c'est au tour du Montpellier Hérault Sport Club. À l'heure où bien des supporters français regrettent la « perte d'identité » de leur club, les Pailladins chérissent au contraire la dimension familiale, l'authenticité et la proximité perpétuées au MHSC, presque dix ans après un titre de champion de France inoubliable.
#1 - Dony
Dony
34 ans, ultra à la genèse de l’Armata Ultras au début des années 2000 et capo du groupe depuis 2010
« L’un des premiers matchs que je suis allé voir à la Butte, c’était contre Monaco en 1999. On perd 3-2, Toifilou Maoulida et Olivier Sorlin marquent deux buts exceptionnels pour Montpellier. À Monaco, il y avait Fabien Barthez dans les cages. À l’époque, on vient d’être sacré champion du monde, j’ai douze ans et la tribune chante : « Barthez, ta femme est juste là devant nous, elle nous suce le bout« . Barthez était bon client. Il nous faisait des doigts d’honneur, mais il ne le prenait pas mal du tout, il rigolait même en entendant le chant.
Moi, j’ai toujours aimé le foot depuis petit. Chez nous, on nous disait qu’il fallait supporter Marseille. Les parents, les profs, les copains à l’école… Il y a toujours eu cette espèce de fausse identité marseillaise en tant que sudiste. Je n’ai jamais compris ça. Pour moi, il fallait supporter l’équipe de sa ville. Alors, après les cours, j’allais à la Mosson avec mes potes du quartier des Arceaux. Le virus m’a contaminé tout de suite. J’ai toujours aimé le fait que tu sois jeune, vieux, riche, pauvre, peu importe ton métier, quand on entre en tribune, on est tous égaux. C’est quelque chose que l’on ne retrouve nulle part ailleurs dans la société. Au fil des années, on se rend compte qu’on côtoie des ingénieurs, des avocats, des RMistes… C’est comme une famille.
On a créé le groupe de l’Armata Ultras, on était une dizaine de collègues. Ce qui nous importait, c’était de pouvoir faire les déplacements et « bâcher » le nom de notre groupe partout. On a toujours eu vocation à rester un petit groupe. Au pic, l’année du titre, on a dû monter à une trentaine de membres, grand max 34 ! Les souvenirs en déplacements, il y en a beaucoup… Le plus marquant, pour moi, c’est le dep’ à Athènes pour jouer l’Olympiakos en Ligue des champions. On jouait à Troyes le samedi. Déjà, en parcage à Troyes, on avait tous la tête à Athènes. Depuis Troyes, on est directement allé à l’aéroport à Milan. Et de Milan, on a pris l’avion pour Athènes, où on est resté toute la semaine.
L’avant veille du match, on est allé voir le derby Pana-AEK. En Grèce, comme c’était un derby, les supporters visiteurs étaient priés de rester chez eux. Nous, on arrive près du stade olympique, on était une vingtaine, on commence à boire un coup et là, on voit 200 mecs du Pana nous foncer dessus ! En fait, ils prenaient le métro et on était juste devant les escaliers. On les suit. Ils s’arrêtent au bout de trois arrêts. Tout à coup, on voit 200 mecs de l’AEK arriver 50 mètres plus loin. Tout le monde avait des fumigènes, des fusées de détresse, des cocktails Molotov, ça pétait à tout-va… C’était cinq minutes de guérilla urbaine, on était dans un autre monde !
Le soir du match Olympiakos-MHSC, on s’est fait molester gratuitement par la police quand on est entré en tribune. Parce qu’on chantait, ça ne leur a pas plu, les flics nous ont chargés. Même si on a eu un peu mal, avec le recul, je peux te dire qu’on était comme des poissons dans l’eau. La police en Grèce, c’est pas la même que chez nous. Les matraques sont en bois et les boucliers en plastique. Il y a eu quelques crânes ouverts, mais on en garde un bon souvenir dans l’ensemble… Cette adrénaline, la visite de l’Acropole, le fait qu’on soit en T-shirt en plein mois de novembre : c’est ça qu’on veut revivre un jour lors d’un déplacement en Europe.
En 2011, Montpellier s’est qualifié pour la finale de Coupe de la Ligue contre l’OM. Mais à l’Armata, on boycotte la Coupe de la Ligue depuis les années Ligue 2. Cette année-là, la demi-finale, c’était à domicile contre Paris. Ni nous, ni la Butte n’allions au stade. On affichait même des prospectus dans la ville pour expliquer pourquoi on ne venait pas. Ça n’a pas été facile pour tout le monde d’accepter ça, mais tout le monde l’a accepté. Oui, on a craché sur une finale au Stade de France, sur un déplacement d’envergure, mais ce n’est pas une finale qui allait nous faire oublier nos principes.
Le même jour, l’équipe de water-polo de Montpellier jouait à Aix-en-Provence, alors on a fait le déplacement là-bas. Dans la piscine municipale, on se met à chanter tout du long. On pousse le délire à fond avec des messages du style : « mouillez le maillot !« , « il rentre quand, Camara ?!« … Et puis, Montpellier gagne, on envahit le terrain – donc on saute tous dans la piscine ! On était une vingtaine à plonger en calebard, je crois même qu’il y en a un qui a fini à poil dans la piscine !
Pour moi, le MHSC, je vais parler vulgairement… non, pas forcément. On a un petit côté « kara », c’est du patois local qui veut dire franc du collier, brut de décoffrage. À l’image de Loulou, qui reflétait bien les gens qui parlent avec leur cœur, un peu crûment. On est le seul club de France où les dirigeants sont les créateurs, la famille Nicollin. Ça, c’est une chance exceptionnelle. On est un club à identité locale, où il y a une dimension familiale et qui est très bien géré. Il y a énormément de gens du cru au sein du club, dans le staff technique. À l’heure actuelle, on est sur une mauvaise série, on a aussi perdu le derby – ça nous a fait chier, et on l’a dit aux joueurs, pas méchamment -, mais on va continuer à supporter. Il n’y aura pas d’insurrection comme à Marseille. Les entraîneurs et les dirigeants, ils ne vont pas nous dire comment il faut chanter, nous on ne va pas leur dire comment ils doivent faire leur boulot… Sauf si tout le monde s’en fout et que ça part en couille, mais ce n’est pas la mentalité du club de Montpellier. Nous, les supporters, on continuera à les aimer et les encourager.
#2 - Marie-Laure
Marie-Laure
41 ans, supportrice depuis « les années fac » et photographe aux entraînements
« Quand j’étais petite, je regardais toujours le foot espagnol avec mon grand-père, parce qu’on ne renie pas ses origines. Avec mon père, on allait souvent voir des matchs de villages. Sauf que mon papa est supporter de l’OM, il m’a élevé à l’OM de Tapie… La passion pour ma Paillade est venue lors des années à la fac. Mon premier match à la Butte, c’était un cadeau d’anniversaire. Tu es avec tes copines, tu y vas après un bon resto, déjà, tu as tout pour être bien. Et là, tu découvres l’ambiance, cette chaleur qui monte. Tu entends les chants, les cris – les insultes, bien sûr. Et, surtout, tu vois cette cohésion de supporters, ce groupe uni qui pousse derrière son club. Alors, les cinq premières minutes, tu observes, et puis, après, tu poses ton cerveau et tu te laisses entraîner.
Les jours de match à la Mosson, quand je me lève, je stresse déjà. Je sors mon maillot – en général, c’est le rose -, ma carte d’abonnement, mon écharpe et, après, je regarde l’heure, toutes les 30 secondes. En général, j’appelle deux copines, Camille et Sophie. On mange ensemble, on passe l’aprem’ ensemble et après, on va au match ensemble. On arrive au stade super tôt, le temps de se garer, d’aller boire un coup au bar comptoir du CCS, de dire bonjour à tout le monde. On est tous contents de se retrouver. Au stade, j’ai commencé à la Butte, puis je suis allé en Gévaudan, la tribune latérale. Sauf que quand tu te mets à chanter, à crier, et que tu t’aperçois que tout le monde te regarde, tu te dis : « OK, bon bah, je crois que l’année prochaine, je vais repartir à la Butte ! ». Maintenant, cela fait cinq, six ans que je suis installée à la Butte. Je suis toujours à la même place, un peu décalé à gauche du but en le regardant depuis ma place, au deuxième rang. Je suis à la fois près des ultras, mais pas non plus au cœur du groupe, pour éviter les pogos. Les ultras sont torse nu, moi, je garde mon maillot. Mais une fois, en plein mois de décembre, tellement j’avais chaud, j’ai posé la doudoune, le pull… Ma copine m’a dit : « tu comptes t’arrêter ? » J’ai fini en débardeur !
J’essaye aussi d’aller à Grammont, au centre d’entraînement, au moins une fois par semaine. Enfin… ça, c’était avant le confinement ! Ça m’est même arrivé de changer mes horaires de boulot pour assister à des entraînements, où je prends des photos. Mes clichés ont commencé à être « connus » grâce à Rémy Cabella. Il s’en est servi sur ses réseaux sociaux. On doit être – grand maximum – une dizaine de supporters réguliers aux entraînements. Du coup, on se connaît tous. Tu arrives, tu fais la bise, tu refais le dernier match… Les autres supporters réguliers sont tous des papys. Plus que des souvenirs de matchs, les anciens vont plutôt te raconter des anecdotes de la semaine, du style : « tiens, on a croisé Garry Bocaly à Carrefour, à la hâte »… Moi, j’ai grandi avec les traditions camarguaises. Loulou Nicollin, je l’ai rencontré lors d’une course de taureaux dans les arènes de Marsillargues. Je l’ai entendu rouméguer comme il savait si bien le faire. À l’époque, à la fin des années 1990, je ne savais pas du tout qui c’était. Et c’est cette ambiance festive, chère à nos fêtes de villages, où tout le monde se connaît à la fin, c’est ce que j’ai retrouvé au stade et au centre d’entraînement. Jamais je n’aimerais un autre club que ma Paillade. »
#3 - Paul Mirabel
Paul Mirabel
25 ans, supporter, humoriste et sûrement descendant de William Prunier
« Mon premier souvenir avec le MHSC remonte au collège. Un jour, tout le monde parlait du fait que le club n’était plus qu’à un match d’un retour en Ligue 1. Du coup, j’ai réquisitionné mon père pour aller au stade. Pour être honnête, avant d’arriver à la Mosson ce jour-là, je ne savais même pas quelles étaient les couleurs du club. J’ai découvert tout ça le 29 mai 2009, le jour où Montpellier est remonté en Ligue 1 face à Strasbourg : un match de fou ! Marveaux qui reprend un coup franc de Tino Costa sur le premier but, Tino Costa qui envoie un nouveau coup franc au fond sur le deuxième, Johann Carrasso qui se brise le genou en arrêtant un penalty et qui est remplacé par Jourdren… On monte en Ligue 1 et c’est comme ça que je rencontre la nouvelle femme de ma vie : la Paillade.
Après ce soir de montée, je me suis abonné. Je pense que j’ai fait toutes les tribunes au cours de ma vie. Je passais parfois ma place à des potes pour tester d’autres endroits de la Mosson, sauf le Kop, parce que je trouvais que c’était un peu trop dangereux. Le meilleur moment, ça ne peut pas être autre chose que le Montpellier-Lille de 2012, 37e journée de Ligue 1. À la dernière minute, Giroud centre pour Aït-Fana qui marque dans le but vide, ça fait 1-0, Montpellier se qualifie pour la phase de poules de la Ligue des champions et prend trois points d’avance sur le PSG… Il faut comprendre que la Mosson a l’un des pires taux de remplissage de Ligue 1 et que cette saison-là, jusqu’à la 35e journée, il n’y avait personne au stade. Les gens ont mis 35 journées à se rendre compte qu’il se passait un truc de fou à Montpellier ! Mais pour ce match contre Lille, c’était blindé. D’ailleurs, pendant le match, les projecteurs ont lâché, ce qui arrive une fois tous les 100 000 matchs. Dernier détail : lors du challenge Orange, à la mi-temps, un joueur est parti du rond central en jonglant, il a marqué avec un retourné acrobatique… Il y a eu trop de choses improbables dans la même soirée !
Une semaine après, je suis allé place de la Comédie avec mes meilleurs potes pour voir le match du titre, à Auxerre. Forcément, même si j’avais cours le lendemain, on a fait la fête toute la nuit. Dans l’équipe championne de France, il y avait Giroud, Belhanda, Stambouli, Yanga-Mbiwa… Des joueurs qui font que tu vas au stade. Il y a plein de fois où j’ai été au stade uniquement pour voir Cabella, Boudebouz ou Belhanda. Aujourd’hui, c’est pareil avec un Delort. C’est un peu cliché, mais il a tout : il est né dans le coin, c’est un guerrier, un mec humble… Il représente exactement ce qu’est Montpellier dans mon esprit.
Entre 2010 et 2014, moment où je suis monté à Paris, je n’ai pas loupé un match à domicile. Avec du recul, aujourd’hui, ce qui me manque le plus dans la vie, c’est la Mosson. J’adore voir du foot dès que possible donc je suis allé au Parc trois ou quatre fois lors des sept dernières années, mais c’est incomparable. Pour moi, c’est comme voir un film et voir ton film préféré. La Mosson, ça me ramène à beaucoup trop de choses : un trajet, des images, un mec qui fait des merguez, un voisin de tribune… Mes voisins de tribune, c’est des personnes que je ne voyais que pendant 90 minutes, avec qui je partageais des choses que je ne partageais pas avec d’autres gens et je ne connaissais même pas leur prénom, ni leur vie. Mais on se voyait tous les 15 jours. Aujourd’hui, c’est plus compliqué avec les représentations, mais mes retours à Montpellier sont coordonnés en fonction des matchs du MHSC. C’est impossible que je rentre alors que le club joue à l’extérieur. Je ne vois pas l’intérêt de rentrer sans la Mosson. L’avantage du confinement, c’est que ça m’a permis de pouvoir revoir des matchs puisque lors des trois dernières années, je devais souvent me contenter des résultats et de résumés vu que je jouais tous les soirs. Maintenant, j’ai retrouvé un peu de temps avec la femme de ma vie.
À voir : Zèbre de Paul Mirabel, à Paris au théâtre du Rond-Point du 26 mars au 17 avril 2021, ainsi qu’au Splendid à partir du 21 avril.
crédit photo : FIFOU
#4 - Lionel et David
Lionel et David
61 et 34 ans, père et fils supporters à plus de 7000 km du stade de la Mosson
Lionel et David sont installés à Winnipeg, dans l’immensité du Canada, à mi-chemin entre Vancouver et Toronto. Le papa a émigré en Amérique du Nord en 1982, son fils y est né. En visio depuis une pièce de la maison familiale ornée d’une collection de maillots du MHSC, tous les deux racontent la même passion dévorante – l’un avec l’accent montpelliérain, l’autre avec l’accent local. Dehors, un manteau neigeux recouvre le sol. « Alors, aujourd’hui, il ne fait pas très froid, informe Lionel, le papa. Je dirais -5°. On pourrait presque manger dehors… » En hiver, avec le climat continental, le ressenti peut descendre jusqu’à – 40°. D’où l’intérêt du bonnet bleu et orange siglé MHSC sur la tête de David, son fils.
L’aventure
Lionel : « Je suis parti de Montpellier en 1982. J’avais fait mon service militaire et fini mes études… Mes tantes m’ont proposé de les rejoindre à Montréal, j’y suis allé. C’était l’été, ça m’a plu. À l’époque, il suffisait de signer un papier pour pouvoir immigrer quatre mois après. Mon père – qui m’a transmis la passion du club – était pâtissier à Montpellier. Alors, à Montréal, j’ai commencé par travailler dans des pâtisseries. Puis, j’ai lu dans la presse qu’ils recherchaient des enseignants en français dans l’ouest canadien, à Winnipeg. Alors, je suis parti à l’aventure. J’ai commencé à enseigner et j’ai rencontré ma femme. David est né, on n’est plus reparti. »
La transmission
David : « Mon premier souvenir ? William Prunier et Bruno Martini – qui nous a quittés. Papa m’avait emmené à l’entraînement. À chaque fois qu’on partait en vacances à Montpellier, on prenait le temps d’aller voir l’entraînement au moins une fois par semaine. »
Lionel : « En tant qu’enseignant, j’avais mes vacances en juillet-août. Donc, quand on revenait en France, le premier mois, il n’y avait pas de match. Alors, je disais à David : « Allons à Grammont !« . C’est une passion par l’exemple. À chaque voyage, on ramenait des maillots. On les portait. Quand on dit « porter les couleurs », ce n’est pas une expression vide de sens. »
David : « Au lycée, j’avais toujours le maillot de Montpellier floqué PlayStation. Les gens d’ici ne connaissaient pas Montpellier, mais ils me disaient : « PlayStation, c’est cool !« . »
Le son et l’image
Lionel : « Cela fait maintenant cinq ans que je suis à la retraite. Les jours de match, l’emploi du temps se fait en fonction du match. Si je vais promener notre chienne, j’y vais un peu plus tôt le matin. Quand j’enseignais, je regardais la rediffusion. J’étais tranquille, je savais que les gens de Winnipeg n’allaient pas me donner le résultat. Avec le décalage horaire, les matchs débutent parfois à 6 heures du matin, comme dernièrement face à Brest. Là, je me lève sans problème. »
David : « Même si on a les moyens, on ne peut pas capter les images de la Ligue 1. Il n’y a aucune chaîne qui retransmet le championnat (il y a un match par semaine sur TV5 Monde, mais la plupart du temps, c’est celui du PSG). Comment on se débrouille ? Avec le streaming pour voir le match, et la voix de Philippe Sers sur le Facebook du club – ou bien France Bleu Hérault avec Geoffrey Dernis et Bertrand Queneutte. Il y a toujours un petit décalage de 30 secondes entre le son et l’image, mais peu importe, on est heureux. »
Lionel : « Pour vivre cette passion avant Internet, c’était à distance et avec une semaine de retard. Fox Sports faisait des résumés hebdomadaires des grands championnats de foot – les buts et les meilleures actions. C’était très succinct, je suivais cela religieusement. Mais comme c’était le samedi matin, on voyait le match qui avait eu lieu le week-end précédent ! En outre, mon frère était journaliste au Midi Libre. Il découpait les articles sur le club (comptes-rendus, portraits…). Même si je connaissais déjà le résultat des matchs, cela me faisait plaisir de recevoir les résumés sur papier quelques semaines après. Ici, l’hiver, quand il fait nuit à 16h30, on se réchauffe aux exploits du MHSC. »
Le culte
David : « En 2009, on joue la montée en Ligue 1 contre Strasbourg lors de la dernière journée. À l’époque, je voulais devenir prof, je faisais mon stage dans un collège. J’ai suivi le match sur un ordinateur dans un coin de la classe. C’était dans l’après-midi. Je n’ai quasiment pas fait cours, j’étais scotché devant l’écran. J’avais dit aux élèves de faire du rattrapage, ou je ne sais quoi. Quand le coup de sifflet final a été donné et qu’on a été promu en Ligue 1, grâce à Courbis, je suis sorti de la salle de classe, je ne savais même pas où j’allais, mais j’étais heureux… J’ai hurlé ! J’ai tapé sur les casiers ! Là, ils ont vraiment eu peur… Mais comment expliquer à un Canadien la joie d’être promu en première division ? Au hockey, il n’y a pas de Ligue 1 et de Ligue 2. Les relégations, ça n’existe pas. »
Lionel : « Ce jour-là, je pouvais voir le match en direct, mais par superstition, j’ai attendu le soir pour mettre la rediffusion. Et quand j’ai vu le résultat, je me suis effondré sur le lit, je pense que j’ai pleuré de joie. C’était la délivrance. On avait traversé la mer Morte, on arrivait en Terre sainte : Montpellier revenait en Ligue 1. Quand on a été sacré champions de France en 2012, sur le moment, devant la télé, j’explose ! Mais après, je ne peux pas défiler dans les rues de Winnipeg et klaxonner. Les gens, ils appelleraient la police… J’aurais aimé être là quand les joueurs ont défilé dans les rues ou à la présentation de l’Hexagoal, place de la Comédie. À mon âge, je n’aurais pas pris de risques pour monter tout en haut des pylônes autour de la place ou au sommet de la statue des Trois Grâces, mais j’aurais bien aimé être là. D’un autre côté, ma passion du foot, je la vis un peu comme une religion, j’ai besoin de recueillement. Lorsque je suis les matchs de Montpellier, il ne faut pas de bruit autour, pas d’interruption, pas de téléphone qui sonne. Et surtout pas de nourriture devant le match. Je ne mange pas une pizza quand je vais à la messe. Je ne bois pas une bière en écoutant le curé. Donc pas de pizza ou de bière pendant le match. Comme dans une église. »
Les pèlerinages
David : « En 2009, je suis revenu à Montpellier, pour me rapprocher de ma grand-mère. Je travaillais au Flunch à Pérols. De temps en temps, il y avait des joueurs qui passaient comme El Kaoutari. Je leur disais : « moi, j’ai fait 7 000 km pour venir vous voir jouer, ne lâchez rien les gars !« . Je ne sais pas si le message est passé dans le vestiaire, mais deux saisons après, on a été sacrés champions ! En 2017-2018, je suis revenu à Montpellier. C’est là où j’ai vraiment découvert la Paillade, en allant au stade à chaque match à domicile. Les chants, je les connaissais plus ou moins, mais là, je les ai appris par cœur. C’était encore mieux que ce que j’aurais pu imaginer. Au Canada, je n’avais jamais vu des gens qui sautent et qui chantent. Tu ne peux pas t’en rendre compte avant… Tu le sens dans le ventre quand tu es en train de chanter. J’aimerais d’ailleurs remercier Bastien, Mouss, Bouba, et Monsieur Socorro… Je suis arrivé à la Butte un peu comme un cheveu sur la soupe, mais grâce à eux, je me suis senti à la maison.
Je suis aussi allé aux premières portes ouvertes de Noël du club. J’ai laissé mon CV à Laurent Nicollin. C’était – et c’est toujours – un rêve de travailler un jour pour le MHSC. Il n’y a pas eu de suite, mais j’ai eu le plaisir de rencontrer le président, de lui serrer la main et de le féliciter pour son bon travail. Pour quel poste je postulais ? Kitman. Mettre les bons numéros, les shorts, les chaussures… tout simplement. Et, en plus, je parle anglais, un peu espagnol, un peu portugais… Le club n’a pas donné suite, il n’y a pas de soucis, je me régale d’être supporter ! »
Les hérétiques
Lionel : « Pendant la finale de la Coupe du monde, les mecs, ici, jouaient au baseball. Ils n’étaient pas devant leur télé. Le baseball, c’est quoi ? On mâche du chewing-gum et on jette une balle… Mais, attention, ça marche dans les deux sens. Un jour, je suis allé faire du ski de fond dans un parc à cinq minutes de chez nous. Le parc était désert ! « Mais qu’est-ce qui se passe ? » C’est plus tard que j’ai compris qu’ils étaient tous devant la télé pour voir du hockey sur glace : le Canada jouait contre les États-Unis en finale des JO. »
La succession
David : « Pour l’instant, je n’ai pas d’enfant. Ce n’est pas encore « au four », comme on dit ici ! Mais j’ai déjà tout prévu : les gants, les chaussons… C’est une question de temps. »
Lionel : « Garçon ou fille, on transmettra la passion. »
Propos recueillis par Maxime Brigand et Florian Lefèvre
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