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« Waldemar Kita tue la magie de la Coupe de France »
Waldemar Kita, le président de Nantes, a refusé de laisser la recette du match contre Drancy (N3) lors des 32es de finale de Coupe de France. Sa justification : un manque de « savoir-vivre » de la part du club de Seine-Saint-Denis. Toufik Belkhous, élu du District 93, revient sur l’évènement au nom du département.
Comment avez-vous perçu la démarche de Kita de récupérer la recette de la billetterie après le match de Nantes contre Drancy ?
C’est son droit le plus élémentaire de ne pas laisser, mais on (le District 93, NDLR) trouve que le geste n’est pas élégant et on aurait pu penser qu’un président de Ligue 1 puisse l’être. Mais je trouve que ses mots après, c’est de la diffamation par rapport au club de Drancy. Et le « manque de savoir-vivre » est de leur côté : je n’ai que rarement vu des vestiaires laissés dans cet état. Nous sommes dans un monde de plus en plus individualiste, son geste ne fait pas du bien au football, encore moins au football amateur.
À la suite de cet évènement, le district de Seine-Saint-Denis se mobilise, mais quel est le fond du problème ?
En fait, il tue la magie de la Coupe de France. Avec mon club d’Aubervilliers, on avait laissé notre recette à un club de R3. Drancy avait fait la même chose au tour précédent. Ce que je veux dire, c’est que cette tradition, on l’applique nous-mêmes quand on rencontre des clubs de division inférieure, parce qu’on connaît les problématiques d’un club au quotidien. Bien sûr qu’on aurait aimé que ce geste soit perpétué, on sait en plus qu’il est coutumier du fait (Nantes avait fait exactement pareil lors de l’édition 2023 face à l’ES Thaon, équipe de N3, NDLR), mais ce qu’on veut mettre en lumière derrière ça, c’est que la Coupe de France est vraiment une bouffée d’oxygène pour les clubs. Au-delà même des clubs, pour les familles, les spectateurs, c’est une fête populaire, de véritables célébrations, comme à Bobigny face à Angers ou à Drancy, où les organismes ont assuré la réception professionnellement et qualitativement.
En réalité, le combat n’est pas motivé uniquement par l’aspect financier…
Ah non, mais sûrement pas. On n’ira jamais mendier 13 000 euros, on ne parle plus tant de ça. Là, c’est l’attitude ingrate de Kita qu’on souligne. D’autant plus que lorsqu’il s’agit d’aller récupérer dans le 93 des joueurs pour alimenter leurs équipes et centres de formation, ils sont bien contents. Donc voilà, reconnaissance et bienveillance sont des mots importants, que Monsieur Kita a totalement oublié. Et puis, par ce manque de respect, il décrédibilise et tue l’image du club, des éducateurs. Alors que la magie de la Coupe, c’est la rencontre, la rencontre de tout le monde, de tous les niveaux. C’est un moment de rassemblement, et c’est ça qu’il n’arrive apparemment pas à comprendre. Avec son geste, il éloigne deux mondes qui ont besoin de se rapprocher. Kita a dit « on n’est pas des vaches à lait ». Certes, mais là, il n’y a aucune reconnaissance du monde amateur et de ce qu’on apporte au monde pro. Voilà, c’est tout.
Existe-t-il une solution pour éviter ce genre de rupture ?
Oui, j’ai une idée sur le sujet, qu’il faut faire germer auprès des élus et des instances. La fédération fournit des dotations financières après chaque tour de qualification, mais qui ne sont jamais suffisantes pour un club amateur. Imaginons que ce club doive faire une location de terrain, prévoir de la sécurité et organiser un pot de l’amitié à la fin. Lorsqu’un club amateur tire un gros, la joie ne dure que quelques instants. Dans les quatre minutes qui suivent tu te dis direct, « c’est le début des problèmes ». Aucun club ne rentre dans ses comptes, même en prenant en compte la dotation. Alors, il faudrait réfléchir à ce que la FFF défraye de ces trois charges financières les clubs hôtes amateurs, et ce, dès le 7e tour lorsque les Ligue 2 entrent en lice. Je suis persuadé que ce dispositif peut voir le jour, et réduire les inégalités entre le monde pro et amateur, et ainsi permettre aux petites équipes de continuer à rêver.
Propos recueillis par Benjamin Gaillardin-Claeys