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Steve Mandanda et Marseille : ce n’est qu’un adieu
Cette fois, c'est pour de bon : Steve Mandanda n'est plus un joueur de l'Olympique de Marseille. Il s'est engagé mercredi soir avec le Stade rennais, mettant un point final à son aventure longue de quatorze ans avec l'OM, qu'il aura bouclée avec une saison en demi-teinte et un départ feutré. Dommage, au regard de la trace que laissera l'icône à Marseille.
Il y a les films, et la réalité. Au cinéma, quand Steve s’évade, c’est le monde entier qui est pendu aux images qui défilent sur le grand écran. Dans la réalité, l’histoire retiendra que quand Steve s’en est allé, il l’a fait bien plus discrètement. Sans méli-mélo contractuel, sans fioritures médiatiques. Sans hésitation, non plus. Il est même ardu d’imaginer quel autre joueur que lui aurait pu tirer sa révérence de la sorte, de manière aussi nette, qui plus est pour quitter un club tel que l’Olympique de Marseille. Mais aurait-il vraiment pu en être autrement ? Aussi satisfaisant qu’il soit à l’arrivée, dans le cas de son immense gardien, l’exercice 2021-2022 du dauphin de Ligue 1 laissait peu de place à un autre scénario que celui de la rupture en bons termes. Et tant pis si celui-ci, avec 613 matchs au compteur, est le recordman de capes sous la tunique blanc et ciel.
Après matchs à défendre les couleurs olympiennes, notre numéro part pour un nouveau challenge. Bonne chance pour la suite de ta carrière @SteveMandanda https://t.co/rW2LNYvclW pic.twitter.com/MjZ1YTp0RG
— Olympique de Marseille (@OM_Officiel) July 6, 2022
Mandanda de dépôt
Cette ultime saison a en effet été à l’OM ce qu’une phrase bien sentie entre deux arguments est à une bonne copie de bac de philosophie : une transition, qui devait par essence laisser des joueurs sur le bas-côté. Une nouvelle direction, mais surtout un nouvel entraîneur à la tête bien brûlée et un concurrent recruté sur mesure ont posé leurs valises à la Commanderie. Il n’en a pas fallu plus pour que Steve le patriarche se retrouve sur le banc des remplaçants, cantonné à un rôle de doublure de Pau López. L’arrivée de l’Espagnol avec son profil de super-relanceur a suffi à l’orage Jorge Sampaoli pour choisir de retirer le jusqu’alors indéboulonnable Mandanda du onze phocéen ; un choix qui en avait consterné certains. Nul doute que l’intéressé s’en est ému, nul doute qu’il en a souffert. Nul doute non plus que le champion du monde 2018 est resté exemplairement impliqué tout au long de la saison, au point même de redevenir le Capitaine Courage de son club de toujours au moment où tout pouvait mal finir, à trois journées de la fin du championnat.
La dernière des dernières notes du Fenomeno avec son OM est donc loin d’être fausse, puisqu’elle sonne comme une qualification en Ligue des champions dans un match de gala face à Strasbourg à domicile, avec le brassard enfilé. Mais il n’y avait pas là de quoi remettre en selle pour un an supplémentaire le grand Steve, qui a préféré sauter dans le supersonique wagon rennais, sitôt qu’il a été libéré de son contrat par la direction marseillaise mercredi soir. Et le départ en coup de vent de Jorge Sampaoli, le responsable de sa mise au frais, n’y pouvait rien changer.
Pas la fin du Mand’
Une séparation après une longue et intense relation, juste interrompue par une parenthèse ratée à Crystal Palace lors de la saison 2016-2017, comme pour mieux être accueilli à bras ouverts au retour. L’événement, de toute façon, s’annonçait douloureux. Pourtant, point de cérémonie larmoyante au Vélodrome, pour le départ définitif du gardien du temple marseillais. Au vu des modestes adieux qui lui ont été faits, le goût d’inachevé de l’année passée est d’autant plus amer. D’un autre côté, les mots paraissent suffire pour saluer Steve Mandanda, même ceux d’un communiqué concis, voire minimaliste. On peut y voir de l’ingratitude de la part du club, après tous les services que leur a rendus le natif de Kinshasa. On peut aussi y déceler une forme de sobriété, plutôt en phase avec celle dont on affublait à loisir le partant. C’est bien d’amour dont il faut parler pour décrire la relation entre Steve Mandanda et l’Olympique de Marseille. Mais à la différence de pas mal d’autres qui se sont nouées au stade Vélodrome, c’est un amour qui s’est construit sur le temps long, sur la pérennité, sur la fidélité et la solidité, autant de valeurs que l’homme a incarnées, sur le terrain comme en dehors. Un lien d’une stabilité à toute épreuve, de laquelle sont nées des marques d’affection extraordinaires, telles que peu de joueurs en connaissent : le chant des supporters à sa gloire est de celles-là.
La mauvaise foi peut beaucoup de choses, mais dans le cas présent, elle ne sera d’aucune aide aux amoureux de l’OM. Impossible d’essayer de reprocher à M. Mandanda un quelconque manquement, pour tenter maladroitement de se consoler de son départ. C’est une légende du club, sportivement et humainement, qui s’en va, et qui emporte dans son sillage toute une époque dorée. Reste qu’à Marseille, à tout jamais, Stevie Wonder n’est plus uniquement le nom d’une légende de la musique.
Par Paul Citron