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Stefano Mauri, la forme de sa vie
Embourbé dans le Calcioscommesse depuis près de trois ans, Stefano Mauri fait fi de cette situation et réussit même à sortir la meilleure saison de sa carrière. Sa polyvalence est sa meilleure arme, et la Lazio ne peut s'en passer.
L’image de Stefano Mauri servant de punching-ball à Philippe Mexès a marqué les esprits. Pourtant, elle n’est qu’un détail dans l’excellente saison du capitaine de la Lazio. Présent au club depuis 2006, comme son compère Cristian Ledesma dont il a plus ou moins hérité du brassard depuis que ce dernier a été relégué sur le banc par Stefano Pioli, Mauri est en train de vivre la saison la plus aboutie depuis ses débuts chez les pros. D’autant que l’ami Stefano, aujourd’hui âgé de 35 ans, revient de loin, lui qui a vécu une grosse période sans, dont le point culminant fut le 11 janvier 2010. Udinese-Lazio, dernières minutes de jeu alors que le score est de 1-1, le numéro 6 reçoit un bon ballon dans la surface, mais « s’évanouit » plutôt que de tirer au but. Une prouesse technique qui lui a valu d’être hué à chacune de ses apparitions au stadio Olimpico pendant une bonne année. Mauri encaisse sans broncher et fait le dos rond. Son implication dans l’affaire des matchs arrangés n’aura finalement pas eu que du mauvais, le peuple laziale a en effet pris sa défense, s’est uni autour de lui, et le reconnaît désormais comme un capitaine tout à fait légitime. Certes, il ne sera jamais un emblème comme son pendant romanista Francesco Totti, pas besoin d’en détailler les raisons, mais il réussit à marquer son club à sa façon. À la Mauri.
Le couteau suisse version lazialo-lombarde
La polyvalence n’est pas toujours vue d’un bon œil dans le monde du football. On connaît la maxime « être bon partout, n’exceller nulle part » . Un préjugé bien souvent justifié, mais que Mauri est en train d’enterrer à lui tout seul. Le Lombard a d’abord longtemps été considéré comme un bon milieu offensif, mais bien loin des standards des meilleurs à son poste, la faute également à un style de jeu sobre et discret. Il n’est pas du genre à monopoliser le ballon, tenter des gestes techniques ou cavaler après tous ses adversaires et tend plutôt à « sortir du match » . En fait, ses efforts, il les distille avec intelligence pour frapper au meilleur moment. Le bon appel, le bon placement ou déplacement, la bonne vista, et ça fait souvent mouche. Huit fois cette saison, soit mieux que son précédent record, les sept buts inscrits avec Brescia il y a déjà onze ans.
Si Pioli ne peut s’en passer, c’est parce que Mauri sait faire beaucoup de choses à plusieurs postes différents. Il s’adapte parfaitement à la palette tactique de l’entraîneur laziale, jamais arrêté sur un seul schéma de jeu. Le natif de Monza n’a pas perdu ses qualités « d’incurseur » de début de carrière comme le démontrent ses statistiques. D’ailleurs, il évolue encore sur la ligne de trois milieux quand il le faut. Dans un 4-2-3-1, il occupe tranquillement la place de trequartista derrière l’avant-centre, excellent liant entre les compartiments. On le retrouve également à gauche, dans un rôle d’ailier sur le papier, mais avec une interprétation différente de celle de Candreva, moins percutant, plus réfléchi. Enfin dernièrement, on l’a même vu réciter le rôle de « falso nueve » à la pointe de l’attaque laziale. Un joueur trimbalé un peu partout sans que son rendement ne s’en ressente, ce qui n’était pas gagné vu sa situation extra-sportive compliquée.
Samantha oups !
Le Calcioscommesse. Le mot est lancé. Cette fameuse affaire de matchs arrangés qui secoue le football italien depuis 2011. Oui au présent, car on n’en a pas encore vu le bout. Mauri, lui, a passé dix jours au gnouf en juin 2012, un séjour qu’il n’a jamais digéré. La justice ordinaire avait besoin de l’avoir sous la main pour l’interroger, et c’est presque trois ans plus tard qu’elle le renvoie en justice pour… association de malfaiteurs. Rien que ça. Pourtant la justice sportive a déjà statué sur son cas depuis un moment. Si la demande initiale était de quatre ans de suspension pour fraude sportive concernant les rencontres Lazio-Genoa et Lazio-Lecce de mai 2011, cela s’est fini en une omission de dénonciation pour le premier et un acquittement pour le second. Six mois out en 2013, comme Conte un an plus tôt.
Et comme l’actuel sélectionneur de la Nazionale, les repentis qui l’ont « vendu » ont été considérés crédibles une fois sur deux par les organes de justice. D’où les nombreux doutes concernant son vrai rôle. Mauri clame son innocence. Samantha, ce n’est pas lui, mais bien le nom de la personne figurant sur une carte Sim qu’il possédait. Problème, la fameuse Samantha est la compagne du gérant d’une agence de paris sportifs, un ami proche de Zamperini, mouillé dans cette affaire jusqu’au cou et lui-même grand pote de Mauri. Voilà qui a tout d’une couverture pour éviter d’être pris la main dans le sac. Le calvaire n’est pas terminé, et le procès devrait débuter à la fin de l’année. Mais présomption d’innocence oblige, sa non-culpabilité est de mise. Toutefois, la situation reste pesante, ce n’est même plus une épée de Damoclès qu’il a au-dessus de la tête, mais plutôt la Soul Edge. D’où un certain mérite de réussir à se concentrer sur le terrain et même gagner des titres. C’est lui qui a soulevé la Coupe d’Italie historique remportée contre la Roma il y a deux ans. Mauri y a ainsi pris goût et a encore envie d’un joli pied de nez envers ceux qui le veulent sous les verrous coûte que coûte. Rira bien qui rira le dernier.
Par Valentin Pauluzzi