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Stan tout-puissant

Par Adrien Candau
4 minutes
Stan tout-puissant

Très modérément apprécié par les fans d'Arsenal, l'Américain Stan Kroenke, qui détenait auparavant 67% des parts du club, devrait sous peu devenir le seul et unique actionnaire des Gunners. Un cavalier seul qui inquiète forcément outre-Manche.

Il était une fois deux seigneurs qui régnaient sur les comptes d’Arsenal. Depuis la fin des années 2000, les blases de Stan Kroenke et du Russe Alicher Ousmanov étaient sempiternellement prononcés dès qu’il s’agissait d’évoquer à la fois les dépenses et la machine à cash qu’est devenu le club du Nord de Londres. Un duo qui devrait prendre fin en août 2018 puisqu’Ousmanov a annoncé qu’il allait vendre ses 30% de parts du club à l’Américain. Voilà donc Stan The Man avec bientôt 100% du capital d’Arsenal dans sa poche extra large. Un coup de force qui fait baliser un bon paquet de fans des Gunners.

Business à la Kroenke

L’ex milieu de terrain londonien Paul Merson a été l’un des premiers à mener la charge, en disant tout haut ce que certains marmonnent déjà tout bas : « C’est l’argent qui parle dans le football et Kroenke ne veut simplement pas en dépenser, il veut seulement en faire. » De fait, depuis sa prise de contrôle majoritaire d’Arsenal en avril 2011, Kroenke s’est surtout construit une réputation de businessman à la fois éloigné des réalités du terrain – il n’assiste qu’à très peu de matchs et n’interviendrait pour ainsi dire jamais pour donner son avis sur le versant sportif – et très proche de ses sous.

En atteste le petit nombre de transferts dépassant la barre des trente millions d’euros conclus depuis que l’Américain détient en majorité Arsenal : sept. Soit près de deux fois moins que des clubs théoriquement concurrents comme Manchester United et Chelsea sur la même période. Pourtant, Arsenal n’est pas franchement un club de pauvres. Il appartient même à une super élite, où il devance financièrement des puissances européennes du calibre de la Juventus ou Liverpool, dont les revenus dépassaient légèrement les 400 millions d’euros en 2016-2017. Ceux des Gunners frôlent quant à eux les 490 millions de recettes.

Duel de milliardaires

Mieux : depuis que Kroenke chapeaute Arsenal, pas une année ne s’est écoulée sans que le club ne génère des profits substantiels. L’année dernière, le club faisait même état d’un résultat avant impôt record d’un peu plus de cinquante millions d’euros. Une gestion profitable et raisonnée. Un peu trop, même, au yeux de l’autre gros actionnaire des Gunners, Alicher Ousmanov, qui endossait le beau rôle auprès des supporters en dégommant Kroenke sur la place publique dès 2013 : « J’estime impensable que les actionnaires soient aussi bien rémunérés alors que nous avons perdu des joueurs clés tels que Robin van Persie, Mathieu Flamini ou Patrick Vieira… J’ai essayé de prendre le contrôle total du club mais ça n’a pas été possible car certaines personnes préfèrent faire du profit…  »

Foot de consommation

Finalement, le milliardaire russe s’est donc résigné à laisser Kroenke embrasser les pleins pouvoirs. Au grand désespoir du dernier gardien du temple des Gunners, l’Arsenal Supporter Trust (AST), une assemblée d’actionnaires supporters minoritaires. Détentrice de 3% des actions d’Arsenal et d’un contre-pouvoir symbolique à opposer aux financiers qui tiennent désormais les rênes du club, l’AST sait que ses jours sont comptés. La loi britannique sur les OPA oblige en effet Kroenke à racheter les dernières actions qui lui manquent afin de posséder l’intégralité du capital du club. « C’est légalement inévitable, mais voir Arsenal sous la coupe d’un seul et unique individu, c’est triste et inquiétant, juge Nigel Phillips, le porte-parole de l’AST. On sait bien comment fonctionne Kroenke. Quand il y aura de l’argent disponible, il va le récolter et le sortir du club…  »

Pour les membres de l’AST, le putsch de Kroenke achève aussi le processus de transformation d’Arsenal en tant que club théorisé et pensé comme un produit et une entreprise de consommation standard : « Avant, même les plus petits actionnaires avaient les moyens de parler avec les grands lors de l’assemblée annuelle. D’échanger, de discuter…, reprend Phillips. Mais ils ne veulent plus de supporters actifs qui s’impliquent dans la gestion du club. Ils veulent des fans qui achètent. Qui consomment. » Des critiques passant sans doute loin, très loin des considérations de Stan Kroenke, qui doit sans doute se dire que les chiffres sous ses yeux sont autrement plus convaincants : lors du premier semestre 2017-2018, Arsenal a affiché un résultat net positif à hauteur de 23 millions d’euros, contre 11,6 millions à pareille époque l’an dernier. Business as usual.

Dans cet article :
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Par Adrien Candau

Propos de Nigel Phillips recueillis par AC, ceux d'Ousmanov et Paul Merson issus du Guardian et de Goal.com

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