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Simon Ledun, cet ancien Nîmois engagé contre la maladie de Charcot
À 24 ans, et après une courte carrière dans le foot pro en D2 australienne, Simon Ledun, passé par le centre de formation de Nîmes, a déjà raccroché les crampons. L'ancien coéquipier de Ripart et Briançon a choisi de tout lâcher pour affronter la maladie de Charcot dont est atteint son père. Avec ses deux frères, il a créé l'association Espoirs et continue de conserver un lien très fort avec le football.
« Le foot a toujours été notre vie. » Simon Ledun parle vite, avec enthousiasme et une énergie débordante. À 24 ans, cet ancien joueur professionnel a pourtant déjà mis fin à son éphémère carrière, « sans aucun regret ». Le jeune homme est actuellement à la tête d’une association de 5000 membres, d’une entreprise de textile de cinq salariés et devrait bientôt devenir président d’un club de football régional. « Impossible », pour lui, de perdre de vue les terrains qu’il fréquente « depuis ses 5 ans, du côté de Clermont-l’Hérault ». La révélation est immédiate. Simon « mange, dort, vit football », et en 2012, un essai concluant au Nîmes Olympique, alors en Ligue 2, permet au latéral droit de 18 ans de toucher du doigt son rêve. Envoyé s’aguerrir un an à Perpignan-Canet, où il croise notamment la route de l’OL de Martial et Tolisso en Gambardella (0-4), il intègre finalement le centre de formation des Crocos, dirigé par Bernard Blanquart. En U19 Nationaux, le membre de la génération Briançon-Bobichon-Valls fait même deux apparitions avec la CFA2 de Renaud Ripart. « Une bonne saison » dont profite son conseiller « pour envoyer des vidéos à plusieurs clubs ».
Mais alors que Nîmes pense à le prolonger, le jeune homme privilégie une option surprenante. Contacté par le club de Perth Glory, que vient juste de quitter William Gallas, il décide de tenter l’aventure dans « l’Australie profonde ». Prêté au deuxième club de la ville, Balcatta (D2), Simon, qui ne parle pas un mot d’anglais, s’adapte rapidement « aux entraînements à 6 heures du matin à cause de la chaleur, au jeu rugueux de ses coéquipiers et à la vie avec les veuves noires à dos rouge, une des araignées les plus dangereuses au monde ». Un « dépaysement enrichissant » et bien rémunéré – entre 2000 et 5000 dollars par semaine – au pays du soccer, que Simon abandonne une fois son contrat prolongé et la saison terminée. De retour en France pour se ressourcer, sur les conseils de son paternel, motard gendarmerie, il passe le concours, puis part disputer aux Pays-Bas les Championnats du monde militaires avec l’équipe de France futsal.
Marathon, futsal et États-Unis
Jusqu’à ce jour de juillet 2016 où la vie des Ledun bascule. À 46 ans, David, le père, est diagnostiqué « SLA » : il est atteint par la sclérose latérale amyotrophique, plus communément appelée maladie orpheline de Charcot. « Très sportif », le papa de Simon sait que celle qui touche près de 7000 personnes en France va progressivement atteindre ses neurones et entraîner une paralysie de son corps. Le médecin lui indique même que son espérance de vie « est de deux ans ». Malgré la souffrance liée à cette annonce, Simon choisit de « rompre son contrat avec Perth, pour rester aux côtés des siens et obtenir de l’aide pour l’achat du matériel médical ». Emmenée par la maman, Stéphanie, la famille commence un nouveau match. Pour lequel Simon s’appuie sur « les valeurs que lui a apportées le football : solidarité, courage, ténacité ». Avec ses deux frères, Grégoire et Maxime, eux aussi passés par la case centre de formation du côté du rival montpelliérain, ils fondent l’association « Espoirs SLA » .
Afin de médiatiser leur cause, le jeune retraité commence par courir trois marathons en trois mois : Montpellier, Paris, Stockholm, avec à chaque fois, David qui attend en fauteuil à quelques mètres de la ligne d’arrivée pour terminer la course avec son fils. Une « motivation incroyable » qui permet même à Simon de boucler ses derniers 42 km, en chaussettes, les pieds en sang. Pour récolter des fonds, le trio organise de nombreuses manifestations sportives, dont un tournoi de futsal sous les yeux de leur père et qui permet de récolter 25 000 €, pour « financer son rêve de découvrir les États-Unis en famille ». Aussi téméraires et aventuriers qu’au football, Simon et ses frères lancent aussi leur marque de vêtements, Espoir Shop. Et jouent de leurs réseaux dans le sport pour nouer des contacts avec des ambassadeurs, parmi lesquels les Brestois Irvin Cardona et Steve Mounié, qui a « même invité Simon à un Huddersfield-Liverpool ».
Documentaire et film
Tandis que David vient de sortir un livre écrit à l’aide de ses yeux, Prisonnier de mon corps, et qu’un documentaire et un film sur le combat familial sont en préparation, les Ledun continuent à vivre football. Paralysé mais lucide, ce supporter de son Havre natal ne rate pas un match de L1. De son côté, Simon va renouer avec sa passion. « Je vais devenir président du PI Vendargues (R1) ! Un club familial et avec des valeurs, où joue mon petit frère. Je veux en faire le premier club engagé de football en France. Toutes les équipes porteront le logo d’Espoirs, et chaque année, une partie de l’argent des licences ira à la recherche pour une cause. » Un nouvel hommage à son père, qui avait créé et gérait le club du Montpellier Hérault Gendarmerie.
Par Ken Fernandez
Prisonnier de mon corps, de David Ledun (avec Emmanuel Razavi et Cécile Martin Cocher), éditions Bold/Amphora.