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« Signer en Allemagne est la meilleure décision de ma vie »

Propos recueillis par Aymeric Le Gall
11 minutes
« Signer en Allemagne est la meilleure décision de ma vie »

Après plusieurs saisons en Ligue 2, Romain Brégerie évolue aujourd'hui en Bundesliga, chez le promu d'Ingolstadt. Près de cinq ans après son départ de France, le défenseur central formé aux Girondins se sent aujourd'hui comme un poisson dans l'eau outre-Rhin. Voyez plutôt.

Lors de ta première interview pour So Foot, tu faisais office de petit nouveau en Allemagne. Aujourd’hui, tu t’y sens chez toi ? Oui complètement, je me suis parfaitement acclimaté au pays, à la culture et au foot allemand. Il m’a fallu un peu de temps. Votre titre à l’époque, c’était « Mon allemand est catastrophique » (rires). Maintenant, je dirais que c’est beaucoup mieux et ça facilite grandement les choses.

Tu as galéré à apprendre l’allemand ? Un peu, oui. Mais j’ai eu la chance de rencontrer très tôt ma future femme qui est allemande, et elle m’a bien aidé. Ça a été mon grand professeur parce qu’à part ça, je n’ai eu que trois cours de deux heures en tout et pour tout. C’est forcément plus facile quand tu parles la langue à la fois en dehors, mais aussi à la maison. C’est un gros plus par rapport aux autres Français qui rentrent chez eux et ne parlent qu’en français à la maison. Chez moi, je regarde la télé en allemand. Même FIFA est en allemand !

Ton expérience là-bas va au-delà du sport ? Complètement.

Ma femme est allemande, on a une petite fille franco-allemande, c’est sûr que l’impact de ce transfert va au-delà du foot.

C’est le fait d’un gros hasard puisqu’à un moment, après Metz, j’ai failli signer à Nantes, mais ça a capoté sur la fin. Du coup, la décision de venir à Dresde a complètement changé ma vie et ça a été la meilleure décision que j’ai prise. Ma femme est allemande, on a une petite fille franco-allemande, c’est sûr que l’impact de ce transfert va au-delà du foot.

Qu’est-ce qui domine dans ton esprit au moment de rejoindre l’Allemagne ? Énormément d’excitation au niveau footballistique. Et même si je signais en deuxième division, je savais qu’il y avait quand même un engouement énorme pour ce championnat. Après, c’est sûr que le changement a été radical. Je suis parti à Dresde, à 70km de la Pologne, t’es quand même sacrément à l’Est ! Mais ça faisait partie du jeu, je voulais découvrir une autre culture. C’était un peu comme si j’étais étudiant et que je prenais mon sac à dos pour partir à l’étranger. J’ai pas mal de potes qui ont fait ça pendant leurs études et ça m’a donné envie moi aussi d’aller découvrir autre chose.

Qu’est-ce que tu retiens de tes trois saisons à Dresde ? Que du positif, même si je suis parti sur une note négative (le club a été relégué en D3 lors du dernier match de la saison, à domicile, contre Bielefeld, déclenchant la colère des supporters du clubs, ndlr). Jusque-là je n’avais encore jamais vécu une descente, c’est le pire sentiment sportif que tu puisses connaître. Ça restera le gros point noir de ma carrière. J’ai vécu tellement de moments extraordinaires là-bas que finir sur ça, la tête basse, ça me fait vraiment chier. En tant que footballeurs, on a le sentiment d’avoir un vrai impact sur le moral des gens, et là, on les a rendus malheureux…

Parle-nous de l’ambiance ce jour-là. C’était chaud ? Ouais. Ils sont tellement à fond, parfois même extrêmes dans leurs sentiments, que forcément, ça peut être chaud. Après, pour ce qui est de la banderole, ça ne représente que les sentiments d’une infime minorité et ils n’étaient certainement pas 30 000 à vouloir nous couper la gorge !

Tu as ressenti quoi sur le terrain ce jour-là ? Je n’avais encore jamais vécu un match comme ça.

L’arbitre décide d’arrêter le match. Cette coupure est super étrange à vivre, car on reste sur le bord du terrain et on a le temps de prendre conscience de ce qui est en train de se passer.

Un nul nous suffisait pour nous sauver – ou au moins aller en barrages – et, au bout d’une demi-heure, on se retrouve à 11 contre 10. On se dit que ça va le faire, mais on prend un but juste avant la pause, puis un deuxième à 20 minutes de la fin. Là, ça commence à vraiment chauffer, les supporters sont fous, ils commencent vraiment à péter les plombs. T’as des bombes agricoles qui explosent de partout, des fumigènes, la banderole. Les joueurs adverses vont pour tirer un corner, mais un énorme pétard explose à côté d’un joueur, et l’arbitre décide d’arrêter le match. Cette coupure est super étrange à vivre, car on reste sur le bord du terrain et on a le temps de prendre conscience de ce qui est en train de se passer. J’étais capitaine et je voyais que les joueurs avaient les yeux grand ouverts, un peu perdus.

Et puis le match reprend… Oui, mais au lieu de filer le ballon aux adversaires, l’arbitre nous le rend ! C’est chelou, mais sur le moment, c’était le cadet de mes soucis. Notre arrière gauche prend la balle, met un long ballon devant, déviation de la tête, et Mickaël Poté arrive face aux buts et hop, 2-1 direct ! Et là, un bruit dans le stade… Tu ne t’entends même plus parler. On se retrouve ensuite à 10 contre 10 avec des espaces de malade sur le terrain, c’était du grand n’importe quoi ! Plus de tactique, plus rien, tout le monde jouait avec son cœur, le cerveau débranché. Impossible de faire passer des consignes à tes potes, personne ne captait quoi que ce soit, on était blindés d’adrénaline. Je n’ai encore jamais revu ce match, mais un jour, je le ferai et je risque de bien rigoler tellement c’était le bordel.

Finalement, vous parvenez à égaliser ? Oui. Là, c’est pas du bruit qu’il y avait, c’est pire que ça, un truc indescriptible. Je ne savais pas s’il fallait que je chiale, je hurlais comme un fou, j’avais des frissons alors qu’il faisait 32 degrés. Là, je vais voir le coach pour discuter de la réorganisation tactique – on n’était plus que trois derrière -, mais lui aussi est fou à lier sur son banc, et je vois qu’il ne réorganise rien… Tous les gars étaient bouillants. J’essaye de replacer mon arrière droit, mais deux minutes après, on se mange un contre et je vois que le gars n’est déjà plus là… Aujourd’hui encore, je suis incapable de te dire où il pouvait bien être ! Du coup, leur latéral gauche déborde, il centre, 3-2… Là ce n’est pas un bouclier que tu te prends sur la tête, c’est une enclume.

Vidéo


Pourquoi avoir ensuite choisi Darmstadt ? Mon objectif, c’était de rester en Allemagne. Le mercato débute, je reçois pas mal d’offres, mais aucune d’Allemagne. C’était bizarre parce que jusque-là, j’étais plutôt bien coté dans le pays, j’avais une bonne réputation. Et là, du jour au lendemain, plus rien. Je n’ai pas compris. Sur la fin, Darmstadt me contacte pour me dire qu’ils étaient intéressés. Ils voulaient être honnêtes avec moi et m’ont proposé de venir voir les installations pour que je sache où j’allais mettre les pieds. Un peu comme ce que disaient les trois joueurs du Gaz’ sur votre site. Le club ne veut pas mentir aux joueurs, c’est un peu « viens voir dans quoi tu t’embarques avant de dire oui parce qu’il faut être prêt pour ça ! »

Et tu étais prêt ? Oui. C’est vraiment un retour aux valeurs premières du foot, et ça m’allait parfaitement. Les petits vestiaires à l’ancienne, ça me suffit, on vient tous de là. C’était un bon gros retour aux sources et, à l’arrivée, ça a permis de créer un vrai esprit d’équipe. On n’avait pas salle de muscu, on faisait nos abdos dans des petites salles où t’avais des vélos et des caisses de bières d’entreposés. Sans mentir, hein, un cagibi, le truc (rires) ! Mais ça nous paraissait normal. J’ai connu des installations nickel comme au Haillan (à Bordeaux, ndlr), c’est super, mais au bout du compte, est-ce que c’est vital pour être un bon footballeur ? Non.

Après ça, tu as eu beaucoup de propositions ? Ouais, j’ai eu pas mal de trucs. C’est toujours un peu comme ça dans le foot. Même si c’est vrai que sur le plan personnel, j’ai fait une très belle saison, au fond je suis toujours le même joueur qu’un an avant. J’ai un peu plus d’expérience, j’ai accumulé de la confiance, mais de là à voir une telle différence de traitement d’un an à l’autre ! J’ai eu de belles offres, mais encore une fois, c’est en Allemagne que le challenge paraissait le plus complet.

C’est étonnant de te voir signer dans le club contre lequel tu as lutté pour le titre la saison dernière en D2, non ? Ça a été une décision compliquée à prendre, mais j’y ai longuement réfléchi.

Quand tu as vécu une aventure comme celle qu’on a vécue à Darmstadt, ce n’est jamais facile de prendre la décision de partir.

J’avais signé un an à Darmstadt et je voulais désormais trouver quelque chose sur la durée. Il y a eu énormément de facteurs qui sont entrés en ligne de compte : ma femme était enceinte, on voulait un cadre de vie propice et ça m’a paru à ce moment-là être la meilleure destination. Après, quand tu vis une aventure comme celle qu’on a vécue à Darmstadt (tout juste promu de 3. Bundesliga, Darmstadt a déjoué tous les pronostics en accédant en une saison à la Bundesliga, ndlr), ce n’est jamais facile de prendre la décision de partir.

Tu as dit dans une interview qu’en signant à Ingolstadt, c’est la première fois de ta carrière que tu pensais d’abord à toi. Ça veut dire que ce n’était pas le cas avant ? C’est vrai qu’en prenant un peu de bouteille, tu te rends compte que les joueurs sont parfois considérés comme des pions. Sans vouloir cracher dans la soupe, bien sûr, mais quand on parle de foot-business, ce n’est pas pour rien. On sent que c’est vraiment la base du truc et que les clubs ne font pas de cadeaux. Donc au bout d’un moment, quand t’as la chance de faire une très bonne saison et qu’un projet t’intéresse, t’hésites moins à sauter le pas. Je suis quelqu’un qui s’attache facilement aux gens, et jusqu’ici, je prenais ça en compte avant de prendre une décision. Là, c’est peut-être la première fois que j’ai été un peu plus égoïste, j’ai mis mes émotions de côté et j’ai d’abord pensé à moi et à ma famille.

Ton agent disait qu’il regrettait un peu ton choix de signer à Ingolstadt. Tu confirmes ? Ouais, c’est vrai. En plus, on a eu quelques gros morceaux qui nous ont approchés après Ingolstadt. C’est sûr que sur le plan financier, ce n’était pas la même histoire, mais si j’avais fait ma carrière sur l’argent, je ne serais pas non plus allé à Dresde et à Darmstadt. Ce n’est pas pour ça que je joue… pour l’instant. Je ne te dis pas que dans trois ans, je ne vais pas signer dans un club chelou, mais ce n’est pas mon objectif aujourd’hui. Après, je peux comprendre qu’il n’ait pas été chaud au début. Mais ma carrière est loin d’être terminée, on a encore le temps !

En signant à Ingolstadt, tu avais des certitudes à propos de ton temps de jeu ? Non. C’est difficile de savoir, tu n’as jamais trop de garanties en matière de temps de jeu. Jusqu’ici dans ma carrière, j’ai quasiment été 100% du temps titulaire dans mes clubs, donc c’est sûr que c’est difficile de passer à un statut où t’es moins sur le devant de la scène. Je ne te dis pas que je n’aimerais pas jouer plus et que je suis complètement satisfait de ma situation, mais l’objectif n°1, il est collectif, c’est le maintien.

Surtout qu’à Darmstadt, t’avais acquis un statut important au sein du groupe. C’était osé de signer à Inglostadt, non ? Oui. Mais même si c’est difficile, et parfois très difficile, dans la tête, il faut savoir garder confiance et continuer à bosser. Et puis, j’ai toujours besoin de nouveaux challenges pour ne pas me reposer sur mes lauriers.

En parlant de challenges, tu es entré plusieurs fois à des postes qui ne sont pas les tiens (attaquant, milieu), non ? Oui, c’est vrai que c’est assez original.

J’étais tellement content de jouer que le coach aurait pu me mettre n’importe où sur le terrain, je m’en foutais.

Et dans un sens tant mieux, car si j’avais dû ne jouer qu’à mon poste, j’aurais eu encore moins de temps de jeu à mon actif cette saison. Et puis j’étais tellement content de jouer que le coach aurait pu me mettre n’importe où sur le terrain, je m’en foutais.

Tu as récemment joué au Signal Iduna Park de Dortmund. Ça fait quoi ? Franchement, j’ai vu pas mal de stades dans ma vie, mais celui-là, c’est le n°1, il n’y a pas photo. In-cro-yable. T’as vraiment la sensation que c’est un temple dédié au football. Il est énorme, t’as même l’impression qu’il pèse sur toi. Quand j’étais gamin et que je mettais des reprises de volée dans mon jardin, je m’imaginais être à Lescure. Alors là… Si on joue au foot, c’est avant tout pour vivre des moments comme ça.

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Propos recueillis par Aymeric Le Gall

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