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Sidibé, bien plus qu’un bouche-trou
Titulaire indiscutable dans le couloir droit de l’équipe de France depuis maintenant presque deux ans, Djibril Sidibé est bien plus qu'une solution par défaut.
« Pour avoir été sélectionneur des Espoirs plusieurs années, j’ai constaté une pénurie à ce poste, un manque même au niveau de la formation. » René Girard est juste l’une des nombreuses voix qui s’élèvent pour pointer du doigt le manque de compétitivité de l’équipe de France au niveau des latéraux. À gauche, Benjamin Mendy fait figure de titulaire indiscutable et indispensable avec seulement quatre sélections dans les jambes et une énorme blessure qui le tient encore éloigné des terrains. Derrière, Layvin Kurzawa, Lucas Digne, Theo Hernandez et Jordan Amavi ne se distinguent pas plus l’un que l’autre. À droite, c’est Djibril Sidibé qui tient le rôle de titulaire sans conteste. Benjamin Pavard, Sébastien Corchia, Christophe Jallet et Mathieu Debuchy ne tiennent guère la comparaison.
« J’avais le sentiment à un moment que les consultants et autres observateurs le considéraient comme une solution par défaut chez les Bleus, se désole Jean-Marc Furlan, celui qui l’a lancé en pro à Troyes. Mais au fil des matchs et des saisons, il va leur montrer qu’il est bien plus que ça. » S’il y en a bien un qui n’a pas de doutes à son sujet, c’est Didier Deschamps. Avec 845 minutes de jeu, le Monégasque est le joueur le plus utilisé par le sélectionneur lors des éliminatoires, devant le gardien et capitaine Hugo Lloris. « S’il était vraiment une solution par défaut, Didier Deschamps aurait été assez malin pour tester d’autres joueurs à son poste. Or, il a fallu qu’il se blesse pour qu’il ne joue pas » , abonde Jean-Marc Furlan.
Grande capacité d’adaptation
L’été dernier, la très séduisante équipe de Monaco, championne de France et demi-finaliste de la Ligue des champions, se fait saigner sur le marché des transferts. Kylian Mbappé, Bernardo Silva, Tiémoué Bakayoko et Benjamin Mendy, entre autres, partent à prix d’or. Falcao, Thomas Lemar et Fabinho, également très courtisés, ne sont pas loin de partir également en échange d’un gros chèque. Finalement, le seul titulaire à passer un été plutôt calme est Djibril Sidibé. Bonhomme très discret, il ne jouit pas d’une cote énorme, contrairement à bon nombre de ses coéquipiers. Après un début de saison plus compliqué à cause de quelques blessures, certains se demandent même si le jeune Almamy Touré ne devrait pas plus le titiller dans la hiérarchie. Mais Sidibé, sûr de sa force, reste calme et revient en force, notamment en 2018 où il impressionne. « À Monaco, il fait une très, très belle saison. Et en équipe de France, il répond toujours présent » , appuie Frédéric Antonetti, qui l’a connu à Lille.
La vérité, c’est que contrairement à ce qu’elle croit, la France n’a pas à se faire de souci concernant le poste de latéral droit, si Djibril Sidibé est apte à disputer la Coupe du monde. « Djibril a une énorme capacité d’adaptation, c’est un chef de guerre sur le terrain. Déjà, un latéral qui peut jouer des deux côtés au très haut niveau, ça prouve la qualité du joueur. C’est un grand stratège » , explique Jean-Marc Furlan qui l’a repositionné dans le couloir à Troyes alors qu’il évoluait en tant que défenseur central chez les jeunes. Une facilité à s’adapter à plusieurs postes, mais aussi à plusieurs niveaux. Tout au long de sa progression linéaire, Sidibé a franchi les caps un à un sans difficulté. De Troyes à Lille, de Lille à Monaco et la Ligue des champions, l’équipe de France… Il a à chaque fois été performant tout de suite. Cette fois-ci, le prochain cap est une compétition internationale avec les Bleus. « S’il progresse à chaque fois, c’est parce que l’enjeu n’a pas de prise sur lui. Plus le niveau monte, mieux il joue. Une finale de Coupe du monde, il assurera, car il a énormément de sang-froid » , assure l’actuel entraîneur de Brest.
Une vraie marge de progression
Apparemment, Djibril Sidibé aurait encore une énorme marge de progression, alors qu’on pouvait penser il y a quelques mois qu’il avait atteint son niveau maximal. « Ses qualités, on les connaît. Il est capable de répéter les efforts à très haute intensité, mais il a aussi une qualité technique au-dessus de la moyenne pour un défenseur et est très décisif dans les trente derniers mètres, résume Antonetti. Mais il faut encore qu’il gagne en concentration sur les situations défensives. C’est un garçon très intelligent, qui en est conscient » . Des qualités indéniables sur le plan offensif qui peuvent parfois être gâchées par des lacunes défensives dans le placement. « Quand on le regarde, on trouve des zones où il peut progresser. Et puis, pour n’importe quel sportif ou être humain, il y a une ressource cachée, même de 10 ou 15%. Il faut l’envie de travailler et la fraicheur mentale pour ça. Et je pense qu’il l’a » , abonde Jean-Marc Furlan. Que les suiveurs des Bleus se rassurent, le problème des latéraux en équipe de France est réglé pour au moins un des deux côtés.
Par Kevin Charnay