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« Si on retourne la situation, on entre dans l’histoire »
Rudy Gestede a beau avoir une chanson dédiée, le début de saison d'Aston Villa lui reste en travers de la gorge. Mais avec l'arrivée de Rémi Garde et sa confiance naturelle, il croit encore au maintien. Et surtout à l'opportunité de marquer les esprits en organisant un sauvetage inédit.
Depuis un peu plus d’un mois, Rémi Garde est arrivé sur le banc d’Aston Villa. Qu’est-ce que cela a modifié dans la manière de travailler au club ?Il nous apporte son plan de jeu, sa vision des choses, très différentes de celle de Tim Sherwood. Il y a un peu plus de rigueur et de travail tactique. Un jeu plus continental, avec des passes courtes, de la solidité défensive avant tout et des contres dès que la situation se présente. Sa vision des choses, c’est un jeu plus proche d’Arsenal, même si on n’en a pas encore la qualité, un jeu fait de transmissions rapides, mais où on ne balance pas.
Tu as des qualités très adaptées au foot anglais, notamment ton jeu de tête. Tu vas moins pouvoir t’appuyer dessus…Exactement, il y a moins de centres, de longs ballons, donc je dois m’adapter et modifier mon style. Maintenir le ballon haut, faire le pivot, c’est quelque chose que je faisais déjà avant, mais je dois travailler un peu plus mes déplacements pour prendre la profondeur ou aller dans les intervalles. Ce ne sont pas mes qualités premières, mais il faut se plier aux choix du coach.
Rémi Garde a parlé d’interdire la langue française dans le vestiaire, pour éviter que toute la colonie francophone ne se coupe des joueurs anglais. Vous suivez à la lettre ou pas ?C’est vrai, il a demandé ça rapidement. Je n’ai pas de problème avec ça, car cela fait un moment que je suis en Angleterre. Mais pour la petite communauté française, c’est mieux pour l’ensemble du groupe qu’on parle anglais plutôt que de rester dans notre coin. Personne ne galère, tout le monde fait les efforts pour parler. Moi, j’ai toujours parlé à tout le monde, même aux Espagnols. En tout cas, pour les nouveaux venus, cela permet de progresser plus vite en anglais, mais aussi de s’acclimater plus vite à la vie ici ainsi qu’au championnat. Cela paraît une petite chose, mais de pouvoir communiquer en anglais sur le terrain, dire à son partenaire « ça vient derrière toi » , « je suis là » , il y a un minimum à avoir. Quand tu ne peux pas parler la langue sur le terrain, c’est plus compliqué. Plus vite ils parleront anglais, plus vite ils se sentiront bien.
Vis-à-vis des joueurs anglais, la demande de Rémi Garde est très intelligente…Tim Sherwood demandait déjà cela, mais venant d’un Français qui vient d’arriver, cela a plus d’impact sur les joueurs français et c’est aussi apprécié des joueurs anglais. C’est une bonne initiative qui montre qu’il ne compte pas s’appuyer que sur les Français pour réussir…
Rémi Garde a débuté avec Villa par un nul encourageant face à Manchester City, 0-0, mais depuis, il n’y a pas eu une seule victoire. C’est quoi le problème de fond à Aston Villa ?Si j’avais la réponse, on n’en serait pas là. C’est un peu compliqué pour le moment, on aimerait avoir de meilleurs résultats, mais on doit rester concernés par la situation pour améliorer ce qui ne va pas. Je pense que le coach va trouver des solutions. C’est facile de dire qu’il faut continuer à travailler, tout le monde le fait, mais malheureusement, on n’a pas d’autres solutions. On doit rester soudés, mathématiquement on n’est pas encore en Championship, même si tout le monde nous y envoie. On a quatre matchs qui arrivent, il faut prendre des points pour espérer rester dans la course.
Rémi Garde en a parlé : le Boxing Day, c’est contre West Ham, deux jours plus tard vous allez à Norwich, 18e, puis recevez Sunderland, 19e… Deux finales pour continuer d’espérer ?
Même le match à Newcastle ce samedi. Avec Norwich et Sunderland, cela va être décisif pour notre saison. Avec les résultats que l’on a eus, c’est un peu compliqué mentalement, surtout à chaque fois qu’on concède le premier but. Après, on est professionnels, il y a des hauts et des bas dans le football, il faut vivre avec. Si, à la moitié du championnat, on baisse la tête à cause des mauvais résultats, on ne peut pas s’en sortir. On a de la qualité dans le groupe, technique et mentale. Ce n’est pas évident, mais tout est possible. Moi, j’ai confiance, je crois en la qualité des joueurs.
Ils sont comment avec vous, les supporters ?Pour eux, c’est délicat, Villa n’a jamais été dans cette situation, donc il y a forcément de l’attente. Mais ils restent avec nous. En déplacements, ils sont là ; à domicile, ils nous poussent. Les sifflets à la fin des défaites, c’est normal, surtout vu ce qu’on leur propose parfois. Je pense qu’avec une victoire, cela va déclencher quelque chose. Ils n’attendent que ça, nous aussi.
Aston Villa a une grosse histoire, j’imagine que les supporters mettent ça en avant ?On le sait que c’est un club historique. Avec Everton, ce sont les deux seuls clubs à n’avoir jamais été en Championship. Mais cela fait plusieurs années que le club risque la relégation. En Angleterre, il y a une relation forte avec le club, on a aussi les anciens joueurs qui sont devenus consultants dans les médias qui ne nous épargnent pas. Certains, j’ai l’impression qu’ils sont contents de voir le club dans une telle situation. On est conscients de ce qui se passe, qu’on a le plus petit nombre de points en Premier League depuis pas mal d’années. Mais si on retourne la situation, on entre dans l’histoire, il vaut mieux l’écrire dans ce sens plutôt que d’être relégués en Championship.
L’an dernier, tu martyrisais les défenseurs de Championship. La différence de niveau avec la Premier League est de quelle ampleur ?Il y a une différence technique. Tactiquement aussi. Mais en Premier League, il y a une grosse différence entre le top 8, top 9 et les autres. Une équipe comme Watford s’en sort très bien, Leicester était en difficulté l’année passée, mais là, elle survole le championnat. À part le top 4, excepté Chelsea qui n’est pas au classement correspondant à ses joueurs, il n’y a pas d’énormes différences entre la Premier League et le reste de la Championship. Je pense que sincèrement, le top de la Championship peut largement s’en sortir en Ligue 1.
Il y a quelques semaines, tu avais évoqué ton envie de découvrir St-James Park et les supporters de Newcastle. Tu t’attends à quoi samedi ?Il va y avoir une grosse ambiance. C’est un gros club anglais, comme Aston Villa ou Liverpool. Même si ce sont des clubs qui n’ont pas gagné grand-chose ces dernières années. En France, on se dit que partir à Newcastle, c’est un club moyen, mais il y a des installations exceptionnelles. Une grosse qualité de vie si on met de côté le climat, les supporters sont présents à domicile comme à l’extérieur. Le choix se fait rapidement de signer là-bas, mieux vaut être à Newcastle en Premier League que dans un club de milieu de tableau en Ligue 1.
En tant que joueur pro, les matchs du Boxing Day, tu aimes ?
C’est un rythme à prendre, je préfère ne pas avoir de coupure l’hiver et être en vacances plus tôt l’été. Je fête les réveillons en famille, cela ne me pose pas de problème, car les supporters mettent l’ambiance au stade. C’est une belle période. Le 31 décembre, je vais fêter la nouvelle année à 00h01 et me coucher à 00h02.
Propos recueillis par Nicolas Jucha