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Si les footballeurs étaient des bodybuildeurs
Ce week-end, c'est Mister Olympia, le Superbowl du bodybuilding. Une compétition exceptionnelle où les hommes les plus musclés de la planète s'huileront le corps et porteront des slips à paillettes en contractant. Et certains présentent des similitudes troublantes avec les joueurs de ballon.
Phil Heath – Cristiano Ronaldo
Phil Heath n’est pas n’importe qui. Avec son mètre 75, ses 130 kilos de barbaque, ses bras de 58cm et ses cuisses de 80cm, le bonhomme est du genre à faire du boucan quand il se déplace. Mais Phil Heath est surtout un champion qui ne se cache pas, une grande gueule qui adore sa propre personne et qui ne vit que pour gagner des titres. Pourtant, au départ, Heath n’était qu’un basketteur universitaire anecdotique, jusqu’au jour où il a pété un plomb en s’enfermant dans sa salle de muscu pour devenir le meilleur culturiste du monde. Depuis, il a tout gagné et a remporté les six derniers titres de Mr. Olympia. S’il fait la passe de sept ce week-end, il rejoindra Arnold Schwarzenegger dans l’histoire de son sport.
Il n’en fallait pas plus à Phil Heath pour s’acharner sur les réseaux sociaux en postant des #ChasingArnold en pagaille et en annonçant en parlant de ses adversaires qu’il allait « tous les tuer » . Exactement comme Cristiano Ronaldo, compétiteur acharné et obsédé par le Ballon d’or, les trophées et les récompenses en tout genre. Et en prime, Phil Heath a un petit surnom que Cricri adorerait porter lui-même : The Gift. En revanche, entre les pubs de CR7 et les compétitions de Heath, impossible de savoir lequel des deux passe le plus de temps en slip.
George Best – Rich Piana
« Vivre vite, mourir jeune, faire un beau cadavre » , un adage qui pourrait clairement être la devise de ces deux têtes cramées. L’un comme l’autre ont vécu une vie faite d’excès et de folies, avec à l’arrivée une mort brutale, mais tristement prévisible. Du côté du Nord-Irlandais, ce sont les beuveries et l’amour de la fête qui ont fait le boulot, jusqu’à ce que l’alcool ne lui fasse définitivement la peau à 59 ans. De l’autre côté de l’Atlantique, les poisons de Rich Piana se nommaient hormones de croissance, testostérone, stéroïdes anabolisants, etc. Du coup, il a fini dans le coma le 10 août dernier et est décédé deux semaines plus tard à l’âge de 46 ans. Moche. Le scénario semblait pourtant écrit, puisque depuis qu’il ne faisait plus de compétition, Rich Piana était devenu un des youtubeurs les plus suivis du monde du bodybuilding et qu’il postait de nombreuses vidéos pour détailler sa consommation de produits dopants. La liste des substances était impressionnante, les doses colossales, et tout le monde se demandait combien de temps son corps gonflé à bloc tiendrait. Aujourd’hui, on imagine que ces deux personnages charismatiques trinquent là-haut, l’un avec une pinte dans la main, l’autre avec un milk-shake de protéines.
Dexter Jackson – Gianluigi Buffon
Gigi prend de l’âge, Gigi est toujours beau, Gigi est toujours fort, Gigi nous enterrera tous. Mais Gigi a quel âge déjà ? Trente-neuf ans ? Même pas quarante ? Petit joueur, va. Dexter Jackson, lui, aura quarante-huit ans en novembre et a encore moins de rides que Buffon. Il a aussi un tout petit peu plus de muscles que l’Italien et enchaîne les compétitions comme si de rien n’était avec une régularité hallucinante. Sacré Mister Olympia en 2008, Dexter Jackson était encore sur le podium l’année dernière et celle d’avant. Avec Buffon, il est donc à classer dans la catégorie des vampires qui ne vieillissent pas et sur qui le temps n’a aucune emprise. Pour boucler la boucle, les deux larrons sont des gentlemen à l’état d’esprit irréprochable. Mais au lieu de se marrer en comptant les bougies sur leurs gâteaux d’anniversaire et en jouant les jouvenceaux, Gigi et Dexter feraient mieux de se méfier et de regarder dans le rétroviseur. Buffon y verrait le double mètre de Donnarumma débouler à pleine vitesse pour lui prendre sa place, et Jackson une nouvelle génération de bodybuildeurs en train de marcher d’un pas lourd vers ces podiums qu’il adore squatter.
Gianluigi Jackson
Serge Nubret – Raymond Kopa
Deux athlètes nés dans les années 1930 et morts dans les années 2010. Deux pionniers avec deux surnoms qui en jettent, « Napoléon » pour l’homme au ballon, « La panthère noire » pour l’homme aux haltères. En son temps, Raymond Kopaszewski est sorti de la mine, a raccourci son nom, a fait rêver la France, est parti marcher sur l’Europe à Madrid avec Di Stéfano et Puskás, puis est rentré à Reims écrire la fin de sa légende. Être une star de son sport à une époque où les images sont en noir et blanc, faire briller le drapeau tricolore en dehors de nos frontières, évoluer à côté des plus grands, Serge Nubret l’a fait lui aussi. Le Guadeloupéen a même passé les années 1970 à se pavaner sur scène à côté de Schwarzy, maître absolu de la discipline à l’époque, et a terminé deux fois 2e de Mr. Olympia derrière le futur Terminator. Pas de Ballon d’or pour « La panthère noire » , donc. Et depuis ses exploits, aucun Français n’a réussi à atteindre de tels sommets dans le bodybuilding professionnel, alors que Kopa a ouvert la voie à Platini, Zidane et consorts.
Arnold Schwarzenegger – Diego Maradona
Ils ont commencé par être les plus grands dans leur sport respectif, puis sont devenus des icônes populaires à part entière. Des types bigger than life qui ont fait de leur vie un roman en mettant leur nez partout. Maradona qui sort de son quartier de la province de Buenos Aires pour remporter la Coupe du monde avec l’Argentine, le championnat d’Italie et la coupe de l’UEFA avec Naples et devenir le plus grand joueur du monde, c’est Arnold qui quitte son village autrichien paumé de 2000 habitants pour conquérir les États-Unis et devenir le plus grand culturiste de tous les temps, l’acteur le plus bankable d’Hollywood, puis le gouverneur de l’État le plus puissant des USA. Ce qu’on appelle des drôles de destins, même si Diego et Arnold n’ont pas toujours milité dans la même tranchée. Le Governator est devenu pote avec Ronald Reagan, tandis que Maradona était plutôt Fidel Castro. Et en matant les photos qu’Arnold a postées avec son pote Neymar, on suppose qu’il est plus Seleção qu’Albiceleste…
Lou Ferrigno – Vinnie Jones
Footballistiquement parlant, on retient peu de choses de la carrière de Vinnie Jones. Des tacles dégoûtants, une époque de fou où il cassait des os avec le Wimbledon FC, une FA Cup, des fautes tout droit sorties d’une cage de MMA, et une main délicatement posée sur le paquet de Paul Gascoigne. Lou Ferrigno a eu une carrière de bodybuildeur un peu plus prospère en chopant quelques titres, et en se hissant deux fois sur le podium de Mister Olympia à l’époque d’Arnold. Mais Lou Ferrigno et Vinnie Jones sont surtout des gros malins qui avaient préparé leur reconversion avant même la fin de leur carrière sportive.
Dès 1998, le Gallois a mis sa gueule de fou au service du cinéma, en acceptant évidemment des rôles de gros bras. Quant à Ferrigno, il a exploité son physique à fond en jouant Hulk dans la série L’incroyable Hulk de 1977 à 1982. Et pas besoin d’effets spéciaux, les producteurs de la série avaient simplement peint son énorme carcasse en vert. Lou Ferrigno prêtait encore sa voix au gros Hulk (devenu entre-temps un personnage en images de synthèse) dans les derniers films Avengers, et a aussi joué le rôle d’Hercule dans quelques films vite oubliés des années 1980. Malheureusement, l’académie des Oscars a l’air d’être passée à côté de tout ça…
L’incroyable Hulk du pays de Galles
Ronnie Coleman – Lionel Messi
Trop doués, trop faciles, trop privilégiés par mère nature. Certains athlètes ont l’air d’être nés pour réussir dans leur sport, d’avoir reçu des prédispositions uniques, et d’être programmés pour devenir des monstres. Certains appellent ça un don de Dieu, les moins pieux parlent simplement de talent pur. Loin des besogneux et de ceux qui doivent faire le double pour percer, ils dominent sans forcer comme des machines qu’ils sont. Lionel Messi et son pied gauche venu d’ailleurs sont dans ce cas. Leo n’a pas eu besoin de faire des milliers d’abdos comme Ronaldo, a l’air de ne penser à rien dans la vie à part au football, et on se demande ce qu’il aurait fait de sa vie s’il n’y avait pas eu le foot. Un peu comme Ronnie Coleman, le bodybuildeur le plus titré de tous les temps (huit titres de Mister Olympia, le record, comme les cinq Ballons d’or de Messi). Ne vivant que pour son sport et faisant très peu parler de lui en dehors de la salle de muscu, Coleman a écrasé toute une décennie et son règne interminable a empêché pas mal de bodybuildeurs d’avoir un palmarès. Sans Messi, Iniesta n’aurait-il pas récolté plusieurs Ballons d’or ? Neymar et Dybala n’auraient-ils pas eu leur chance plus tôt ? De la même manière, sans Ronnie Coleman, le pauvre Kevin Levrone aurait certainement gagné plusieurs titres de Mister Olympia et Jay Cutler n’aurait pas dû attendre 2006 avant d’être couronné. Deux obstacles impossibles à franchir, même si l’un pèse 72 kilos et l’autre 135.
Par Alexandre Doskov, et ses 43cm de tour de bras