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Shevchenko rage, ô désespoir

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Shevchenko rage, ô désespoir

Mercredi, l'Ukrainien défie l'Inter Milan avec le Dynamo Kiev. L'occasion de revenir sur une drôle de trajectoire, si longtemps majestueuse et si brusquement misérable. Une chute de tension qui ne doit rien au hasard et qui prend peut-être racine là où on ne le soupçonnait pas.

L’image était passée inaperçue et pourtant, elle dit tout ou presque du cas Andrei Shevchenko. Début 2008, l’Ukrainien fait son entrée en cours de jeu pour l’une de ses rares apparitions à Stamford Bridge sous le maillot de Chelsea. Ballack décale tranquillou Sheva qui a un boulevard sur le flanc gauche, pas un chat, même pas une ombre de chat à vingt mètres à la ronde. Mais l’ancien Ballon d’Or France Football fait n’imp’, conduit la sphère comme un vulgaire minime et rend la balle direct à l’adversaire qui passait par là. Et en voyant ça, on a compris : ce n’est pas à Chelsea que Shevchenko a entamé sa descente aux enfers mais… à Milan. Si, si, vous avez bien lu, c’est bel et bien sous le maillot rossonero que le plus beau joueur de l’histoire du football ukrainien est allé se fourvoyer. De là où il repose désormais, le regretté Valeri Lobanovski a lui aussi compris. Triste forcément, surtout pour lui, Valeri.

L’héritier du football total de Lobanovski

Car sous la férule du maître du football soviétique (avant l’éclatement de l’URSS, c’était déjà lui qui faisait la pluie et le beau temps), Shevchenko a appris tout ce que l’on peut savoir du football au Dynamo Kiev. Il faut s’en souvenir, le serial buteur jouait quasiment meneur de jeu et portait le numéro 10. Dans la poule du RC Lens en Ligue des Champions, saison 1998/1999, tous ceux qui ont vu le prodige faire des déboulés à Bollaert, ou mieux à Wembley face à Arsenal, se souviennent : un gars racé capable de prendre la balle dans son propre camp et d’éliminer le tout-venant, le dribble soyeux, la course stylée. Toujours en 1999, un soir de mars au Stade de France face aux Bleus, on se souvient aussi de sa prise de balle diabolique dans ses trente mètres sur une relance à la main de son gardien, dribble en pivot pour effacer Desailly (pas rien à l’époque) et rush solo de derrière les fagots sur plus de 70 mètres avant le contre in extrémis de Thuram. Il y avait du Ronaldo (le vrai, hein!) chez ce type-là, le sens collectif en plus, un brin d’explosivité au démarrage en moins. Comment diable Kiev avait-il façonné un talent aussi complet dans le registre créateur-buteur, sorte d’Arshavin puissance mille ? C’est Andrei lui-même qui, à l’époque, avait apporté la réponse dans un entretien à l’Uefa. « Au Dynamo, on vous fait travailler tous les secteurs du jeu, on ne bosse pas que sur les points forts. L’idée, c’est qu’il faut être capable de tout réaliser sur un terrain. L’attaquant ne doit pas être qu’un buteur, il doit pouvoir orienter le jeu et même défendre alors que les milieux et même les défenseurs doivent pouvoir se mettre en position de conclure. Il y a une tradition du football total à Kiev et plus largement en Ukraine » . Tu m’étonnes ! Les heureux veinards qui ont pu voir la démonstration du Dynamo en 1986 (déjà conduit par maître Lobanovski) à Gerland face à l’Atletico Madrid (3-0) en finale de Coupe des vainqueurs de Coupes peuvent en attester : il y avait de l’Ajax chez ces diables d’Ukrainiens. Une dizaine d’années plus tard, Shevchenko en était le plus parfait héritier. Et rien ne laissait présager qu’à Stamford Bridge, à même pas 32 ans, le prodige ne saurait même plus effectuer une simple conduite de balle sans se mettre en danger ?

Schizophrène en Italie

En cet été 1999, avec l’Europe entière à ses pieds, Sheva fait le grand saut vers l’Occident, direction l’AC Milan, champion d’Italie sortant. Et l’Ukrainien ne fait pas semblant et dégaine d’entrée de jeu son savoir-faire : 24 pions direct, par ici le titre de capocanoniere de Serie A, rebelote la saison suivante (le titre de meilleur buteur en moins). Et cette performance proprement ahurissante aurait dû nous mettre la puce à l’oreille : jamais Shevchenko n’avait réalisé de pareilles performances dans le championnat d’Ukraine pourtant très inférieur. C’est que le garçon, en bon élève de Lobanovski, apprend à la vitesse de la lumière. Et qu’a-t-il appris d’aussi précieux en Italie ? Que là-bas, le football n’y est pas total et que chacun doit assurer son rôle. En clair, les défenseurs défendent, les attaquants marquent et… basta ! Sheva enregistre le truc illico. Lui qui était un jeune maître du décrochage loin des cages adverses squatte désormais les trente derniers mètres, avec une interdiction formelle de s’écarter de la boîte, les ballons finiront bien par arriver (meilleure attaque ces années-là). Au Milan Lab, c’est l’Ukrainien qui obtient les meilleurs scores sur les simulations pour mesurer le temps de réaction, utile pour anticiper la trajectoire des ballons qui arrivent. Et pour se fondre davantage encore dans sa nouvelle fonction de buteur exclusif, Sheva se renforce musculairement pour mieux faire son trou dans la zone embouteillée de la surface. Efficace indéniablement mais très vite, Andrei perd sa fluidité de course et gestuelle. Résultat : sept saisons durant, Sheva régale donc les tifosi à coups de stats de dingue (127 buts en championnat), à défaut de régaler la chique. Suffisant pour se faire offrir un Ballon d’Or en 2004 (meilleur réalisateur de Serie A une seconde fois) mais usant, très usant, surtout dans le contexte ultra-exigeant de Serie A. Alors bien sûr, on pourrait rétorquer que Trezeguet, lui, y trouve son compte. Mais c’est logique : “Trezegol” n’a pas d’autre raison d’être, soit il marque, soit il meurt car il ne peut exister autrement. Loin d’un Shevchenko, joueur dans l’âme, sans doute tiraillé entre son ADN profond et ses nouveaux impératifs. Une sorte de schizophrénie (petite déprime en 2002-2003 d’ailleurs) qui aura eu raison de son talent, bien avant l’heure. Bien avant sans doute son départ à Londres qui, à bien y regarder, ressemblait finalement plus à une fuite qu’à un véritable pari sportif.

A moins que l’explication ne soit à chiner le 26 avril 1986 quand la centrale de Tchernobyl explosa à quelques kilomètres de Dvirkivchtchyna, petit village d’un enfant de neuf ans appelé Shevchenko, touché par les radiations forcément. Suffisant peut-être pour lui avoir conféré quelques super pouvoirs, suffisant aussi, allez savoir, pour lui avoir injecté une dose de poison de lente destruction. Fantaisiste mais pas si fou. On ne sait pas encore tout sur les effets secondaires générés par cette catastrophe et le mystère reste finalement entier. Un peu comme celui de Shevchenko…

Brest, capitale des Côtes d’Amour

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