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Shelvey, le chauve a trouvé son mojo

Par Romain Duchâteau
Shelvey, le chauve a trouvé son mojo

Joueur au talent certain, Jonjo Shelvey semble parti pour enfin pleinement s'épanouir cette saison à Swansea. Symbole de cette réussite actuelle, son rappel chez les Three Lions, trois ans après sa première sélection. Une belle récompense pour celui qui, lors de son passage à Liverpool, galvaudait ses qualités à cause de son impulsivité et paraissait destiné à rejoindre les espoirs déchus du foot anglais. Mais le milieu de terrain est un homme avec de la ressource. Et ceci depuis tout petit.

C’est le lot de tous les jeunes joueurs. Grandir, s’aguerrir et apprendre de ses erreurs. Jonjo Shelvey n’a que vingt-trois ans, mais a déjà beaucoup appris au cours de sa courte carrière. Surtout depuis son passage à Liverpool (2010-2013), qu’il a vécu comme un échec personnel. À Anfield, le milieu de terrain anglais n’a jamais pris l’envol escompté. Trop irrégulier dans ses prestations, trop instable, trop nerveux. L’opportunité qui s’offrait à lui est devenue un rendez-vous manqué. Alors il s’est d’abord remis en selle en terre galloise, à Swansea. En toute quiétude et discrétion. Avant de se marier avec la chanteuse Daisy Evans en juin dernier, un peu plus d’un an après la naissance de sa fille. Le déclic.
« J’ai le sentiment d’avoir énormément mûri, confessait-il il y a quelques jours. Je peux le sentir. Je suis marié et j’ai un enfant maintenant. Ça fait une vraie différence. J’ai plus de stabilité dans ma vie, plus de sécurité à la maison. Ce fut après mon enterrement de vie de garçon que j’ai pris conscience qu’il était temps de me mettre au travail. Je ne suis plus un gamin. J’ai réalisé que j’avais vingt-trois ans et que je devais commencer à jouer au foot correctement. » Une remise en question qui a déjà payé. Auteur d’un début de saison séduisant en championnat et profitant des absences de Wilshere et Henderson, le bonhomme a été récompensé avec un rappel chez les Three Lions. Près de trois ans après avoir honoré sa première sélection. Oui, les choses sont bel et bien en train de changer pour Shelvey.

HLM, alopécie et Voldemort

Avant de porter la tunique prestigieuse de Sa Majesté, avant d’arpenter les terrains de Premier League, avant même de penser au football, il y a eu une tout autre vie. Bien moins confortable et plus modeste à Harold Hill. Un quartier malfamé situé dans l’Est de Londres, où les meurtres et les balles rythmaient son quotidien. « Là où j’ai grandi, dans Harold Hill, c’était rude et ça l’est encore aujourd’hui, racontait-il en 2013. On habitait dans une HLM, à proximité des commerces, et il y avait toujours des problèmes, des gens qui se faisaient poignarder. Un Noël, j’étais dans un pub avec mon père et j’ai regardé tout autour de moi. Puis j’ai vu un impact de balle dans la télévision et j’ai dit : « Papa, on peut y aller ? » Mon père vit toujours au même endroit, ma mère et ma sœur vivent à Brentwood, plus loin. Ma sœur est tombée enceinte et je ne tenais pas à ce que son bébé grandisse au même endroit, alors je lui ai acheté une maison. » C’est donc dans ce contexte social plutôt défavorable que Jonjo Shelvey s’est forgé. Là, aussi, qu’il a connu ses premiers émois avec le ballon rond dans la rue. Mais en même temps qu’il commence à caresser le cuir, le jeune Anglais doit composer avec un physique atypique.
Car il contracte une alopécie, à savoir une accélération de la chute des cheveux et des poils. « C’est quelque chose avec lequel je suis né, s’épanchait-il encore. Je suis tombé dans les escaliers quand j’étais bébé et je me suis fracturé le crâne. Je pense que cela n’a fait qu’empirer les choses. Je pense que j’ai toujours été stressé comme gamin, et l’alopécie peut être causée par le stress. J’ai donc essayé un tas de choses pour espérer guérir. J’ai notamment essayé cette pommade que vous frottez sur votre tête ou le bonnet de laine que tu mets trois mois durant. Mais au quatrième jour, mon crâne était juste en train de rôtir. Je l’ai finalement enlevé et je me suis dit : « Si vous n’aimez pas ça, ne venez pas me parler. » » Mais si l’enfant de Romford s’est rapidement accommodé de cette fatalité, le regard des autres n’a pas toujours été évident à appréhender. Comme quand il évoluait dans la catégorie des jeunes, à Arsenal (2001-2002) : « Quand j’avais neuf ans et que j’étais là-bas, j’avais l’habitude d’aller à l’entraînement avec une casquette de baseball, car j’avais tellement peur de ce que les gens pensaient, alors que je grandissais. Je me souviens d’une fois où je marchais avec ma sœur à Romford, et les gens n’arrêtaient pas de me regarder fixement parce que j’avais le crâne chauve. Ma sœur s’emportait à ce sujet et demandait aux gens pourquoi ils me fixaient ainsi. Maintenant, je suis arrivé à un moment où je n’ai même plus besoin de me raser. C’est juste ce que je suis, je suppose. » Avec le temps, il a même appris à en rire. En témoigne ce chant qui lui a été consacré par les supporters de West Ham, en avril 2013, en référence à sa ressemblance avec Voldemort, personnage emblématique de la saga Harry Potter au physique ingrat : « He’s coming for you, He’s coming for you, Harry Potter, He’s coming for you ! »

« Je savais qu’en gardant la tête froide, j’avais la capacité de faire quelque chose de ma vie »

Dans sa jeunesse, des railleries, Shelvey en a ramassé une litanie. Mais, sur le terrain, le gamin a mis très vite tout le monde d’accord. Talentueux mais moins que son frère aîné qui a préféré emprunter une voie faite de femmes, de boîtes de nuit et d’alcool, il s’est accroché afin de vivre son rêve. « Il aurait été facile pour moi de prendre le même chemin, mais j’ai toujours voulu me consacrer à quelque chose. Je savais qu’en gardant la tête froide, j’avais la capacité de faire quelque chose de ma vie » , assurait sans ambages le milieu de terrain. À Charlton, où il a débuté (2008-2010), en Championship, ses qualités n’étaient déjà pas passées inaperçues. « À l’époque, il ne faisait que des petites entrées au cours des matchs, mais il s’entraînait avec nous. C’était un joueur que j’aimais beaucoup, confie Hameur Bouazza, actuel joueur du Red Star et son ex-coéquipier chez les Addicks. Le jeu qu’il pratique aujourd’hui, c’était déjà le cas à Charlton. Il joue toujours simple, toujours vers l’avant et possède une bonne vision de jeu. Je me souviens que lorsque je faisais des appels, il me mettait les ballons exactement là où je les souhaitais. On sentait qu’il avait quelque chose. Son profil me fait un peu penser à celui de Lampard ou Gerrard. »
Stevie G, justement, Shelvey a eu l’occasion de le côtoyer au plus près durant trois années à Liverpool (2010-2013). « Il a tant représenté pour moi, lâchait-il y a deux ans, admiratif. Quand mes amis sortaient dehors, moi je restais chez moi à regarder des DVD de lui. J’ai grandi en le regardant et je voulais apprendre de lui. » L’ex-Red a appris, oui, mais le plus souvent sur le banc. Alors que l’entrejeu de la formation de Brendan Rodgers manquait clairement d’inspiration, l’homme au crâne dégarni n’a jamais saisi sa chance. Parce que son irrégularité immuable et ses pétages de câble ont fini par devenir rédhibitoires. Symbole de ses maux permanents à l’époque ? Son doublé en Ligue Europa contre les Youngs Boys, en septembre 2012, suivi d’une expulsion quelques jours plus tard face à Manchester United, où il s’écharpe dans la foulée avec Alex Ferguson. Après 69 matchs toutes compétitions confondues et un épanouissement jamais trouvé, le moment de dire au revoir était venu : « Je devais partir, je devais le faire pour moi, car je n’aimais pas ma façon de jouer et je voulais avoir du temps de jeu. Peut-être que les gens se sont dit : « Vous êtes jeune, vous êtes grassement payé, vous devriez être heureux d’être sur le banc de Liverpool. » Je ne l’étais pas. Je préfère toucher mon argent et jouer. Voilà ma façon d’être. »

L’Euro 2016, un vrai coup à jouer ?

Arrivé à l’été 2013 dans la brume galloise de Swansea, Jonjo a d’abord conforté sa réputation de joueur impulsif sur les près anglais. Une myriade de cartons jaunes, une expulsion contre Everton (novembre 2014) et une suspension de quatre matchs par la FA pour un geste illicite sur Emre Can, quelques semaines plus tard. Excédé, son manager Garry Monk lui enjoint alors d’ « apprendre vite » et « se rendre compte » de son attitude préjudiciable pour son équipe. Puis, il y a eu cette lueur. Une inspiration géniale survenue face à Aston Villa où le Britannique claque une magnifique frappe des soixante mètres (4-1, avril 2014). Le talent était latent, il n’avait plus qu’à être bonifié. Et son mariage l’été dernier a fait de lui un joueur nouveau, soucieux de donner enfin l’élan espéré à sa carrière. « Après mon enterrement de vie de garçon, j’ai travaillé chaque jour avec un coach personnel chez moi, dans l’Essex, révélait-il il y a peu. Il n’y avait que lui et moi. Il m’a fait travailler dur, je voulais parfois le tuer ! On travaillait une heure et demie à la salle : les jambes, le haut du corps et les abdominaux. Puis nous partions courir quarante minutes. Ça en valait la peine puisque ça a porté ses fruits. »
Le week-end dernier, lors de la réception de Manchester United au Liberty Stadium (2-1), Shelvey a illuminé le jeu des Swans. Vision de jeu aiguisée, passes courtes et transversales délicieuses, il a récité sa plus belle partition. Tellement séduisante que celle-ci a également fait succomber le sélectionneur anglais, Roy Hodgson, qui l’a retenu pour les matchs éliminatoires de l’Euro 2016. « Jonjo Shelvey se voit offrir une nouvelle chance après son début de saison impressionnant » , s’est contenté de commenter le boss des Three Lions. Dans une équipe nationale en quête de certitudes, notamment au milieu de terrain, l’opportunité d’aller obtenir une place de titulaire se veut réelle. À 23 ans, celui qui est désormais le chauve le plus connu du Royaume se tient en tout cas prêt : « Il a juste fallu que je devienne adulte. Je sens que je vais me donner toutes les chances d’être meilleur joueur encore qu’aujourd’hui, pour n’avoir aucun regret à la fin de ma carrière. » Vivement le renouvellement des vœux de mariage.

Les notes de Koh-Lanta : la tribu maudite

Par Romain Duchâteau

Propos de Jonjo Shelvey extraits du Guardian et du Daily Mail

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