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Shaun of the stades

Par Christophe-Cécil Garnier
Shaun of the stades

Il ne fait pas partie du Ninety-Two club, mais explose les scores. Shaun Smith est un énergumène connu dans le milieu des groundhoppers, les amoureux des stades. Rencontre avec un fan qui ne s'arrête jamais et avoue souffrir de troubles obsessionnels compulsifs.

Shaun Smith a déjà été à Prague, une fois. Mais les multiples châteaux et cathédrales qui jalonnent la capitale tchèque ne sont pas restés gravés dans son esprit. La seule chose qu’il a retenue de son voyage, c’est le Juliska Stadion, le terrain de jeux du Dukla Prague. « Dans la tribune centrale, on avait une vue de toute la ville. C’était fantastique. »

Il est comme ça, Shaun Smith. Sous son toupet anthracite, sa mémoire fonctionne à plein régime. Chaque stade correspond à une histoire. Et quand on a visité plus de cinq cents enceintes comme lui, on a des choses à raconter. Le rendez-vous a été pris au deuxième étage de l’Union Rooms, au 48 Westgate Road. Avant d’arriver à ce bâtiment d’architecture victorienne de Newcastle, il faut descendre une rue remplie d’un nombre irrationnel de magasins de motos. À croire que chez les Geordies, on aime aller vite. D’ailleurs, Shaun Smith gobe les mots comme il avale son café. Rapidement. La polaire du Royal Post Mail, son employeur, est posée sur la chaise à côté de lui.

C’est à huit ans qu’il démarre sa véritable passion. Il assiste à un match de Newcastle en 1974, l’année où les Magpies atteignent la finale de la FA Cup, perdue contre Liverpool. Il commence par faire tous les matchs de Newcastle à domicile avec son père. Au fur et à mesure, il enquille plus de onze cents matchs à Saint-James Park, le stade mythique de Newcastle. Un club qu’il a littéralement dans la peau – un tatouage d’un Magpie orne son avant-bras. Trois autres représentent les Beatles, les Clash et l’Ange du Nord, un monument local. Et dans les narines. « Quand j’étais jeune, il y avait une brasserie à côté du stade, près de la statue de Robson. Quand on allait aux matchs, une espèce d’odeur horrible ressortait et restait dans les tribunes. C’était infâme. Maintenant, même si l’odeur n’est plus là, j’ai quand même l’impression de la sentir. »

« Clic clic clic ! »

Une fois qu’il a quitté l’école vers seize ans, il se met au boulot pour se payer les déplacements. Il délaisse les relents de bière et va supporter son équipe de cœur dans tous les coins de l’Angleterre qui impliquent un adversaire. Au bout de quarante-cinq terrains, il réalise que les quatre-vingt-douze ne sont plus très loin. « J’avais fait le tour de tous les stades possibles avec Newcastle et j’ai décidé d’aller voir d’autres équipes pour lesquelles je n’éprouvais, en théorie, aucun intérêt. » En théorie seulement. L’obsession se développe et commence à coûter des ronds. Quand on habite à Newcastle, tous les autres stades du pays se trouvent plutôt loin. « On doit tout planifier en fonction du travail. Si je dois aller dans le sud, ça me demande trois ou quatre mois de préparation. En espérant que tout se passe bien. Si j’avais été à Birmingham, ça aurait été plus facile. Mais je ne pouvais plus m’arrêter. C’était devenu un trouble obsessionnel compulsif (TOC). Je collectionnais quelque chose et je devais le compléter. C’était comme cocher des cases : clic, clic, clic ! »

Il finit par remplir sa liste, mais n’adhère jamais au Ninety-Two. Jusqu’en 2010, une règle du club implique de faire les équipes de football durant leur temps dans les quatre ligues professionnelles. Si l’une d’entre elles descend à l’échelon amateur, elle est à refaire. Cette règle a été abolie en 2010, mais a suffi pour que Shaun Smith classe l’affaire. « Le fait d’être allé partout est suffisant pour moi. C’était comme un rêve de tous les faire. Et je l’ai réalisé. »

Le Nordiste est né à deux miles de Saint-James Park, entre le terrain de Newcastle United et celui de Gateshead, un club de cinquième division. Son histoire peut se résumer à cette seule localisation. S’il est fan des Magpies et a fait tous les terrains « connus » , il est devenu un amoureux du groundhopping et a visité tous les types de stades, de l’Écosse au pays de Galles, en passant par ceux des petits villages anglais. « Ce qui me plaît, c’est l’expérience d’un nouveau club. Comment sont les fans, de quelles façons sont faits les stades. Je me rends dans les petites divisions parce que le football est plus honnête qu’en Premier League. »

Pin’s, Facebook et Costa Garraf

Shaun Smith a désormais visité 549 terrains et le compteur continue de tourner. Il y a dix ans, il en avait 400 de moins. Chaque club a été l’occasion de récolter un pin’s. Il a en revanche très vite arrêté la collecte des mugs. « J’en avais une centaine et je ne savais pas où les mettre ! »

Le web est le vrai terrain où il peut accumuler ses exploits. Shaun a commencé un blog en même temps que sa nouvelle obsession. Il lui permet de présenter ses découvertes et fédérer une communauté autour du groundhopping. Son groupe Facebook rassemble trois mille passionnés qui se rendent parfois de petits services. « À force de faire le pays de long en large, on trouve toujours quelqu’un qu’on connaît. Si j’ai besoin de billets pour un match, on va me dépanner. » Lui-même a déjà aidé de nombreux fans dans leurs pérégrinations, en leur procurant des billets pour les travées de St James’ Park.

Cet automne, il n’a pas pu compter sur son réseau pour l’aider à trouver des places en Espagne, pour des vacances en famille sur la Costa del Garraf. Shaun Smith savait déjà que sa femme et ses deux enfants ne l’accompagneraient pas au Camp Nou de Barcelone, mais ce voyage avait une saveur particulière pour lui. Comme une revanche. En 2003, Newcastle est en Coupe d’Europe et se déplace en Catalogne. Il prend des billets pour l’occasion, mais le match est annulé. « J’ai toujours pensé que j’allais y retourner à cause de cette mauvaise expérience. Mais ce genre de raisonnement, c’est sans fin. Si je m’écoutais, je pourrais aller partout. »

De toute façon, il ne pense pas s’arrêter un jour. Mais il évolue. Cette année, son break de stades a duré plus longtemps que d’habitude. Trois petites semaines. « J’en ai découvert vingt et un nouveaux. L’année dernière, j’en avais fait trente-six. Donc je me suis calmé. » Et si ça lui permet d’avoir une belle vue sur la ville, pourquoi s’en priver ?

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