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Au bout de Séville
Tenant du titre en Ligue Europa, le Séville FC s’attendait à vivre une belle saison. À la veille de retrouver le RC Lens en Ligue des champions, un match couperet pour être reversé en Ligue Europa, c’est malheureusement tout le contraire qui semble se produire.
Au printemps dernier, tous les observateurs ont eu le même mot en tête : « encore ». Rien de plus logique, puisque le Séville FC décrochait sa septième Ligue Europa, la cinquième en dix ans. Tout présageait alors un retour des Sévillans sur le devant de la scène pour cette saison 2023-2024. Mais les conflits internes en ont décidé autrement, pour un club aujourd’hui en grandes difficultés.
Le déclencheur Monchi
Voilà donc Séville bloqué au seizième rang en Liga, au soir d’une nouvelle défaite concédée ce samedi sur la pelouse de Majorque (1-0). La sixième cette saison. Depuis août, il faut d’ailleurs défiler en deuxième page du classement pour trouver trace des Andalous. Et pour cause, avec deux victoires seulement, mais surtout sept nuls, le meilleur classement atteint depuis l’entame de l’exercice n’est qu’une triste douzième place. Nous jouions alors la 7e journée. Les prémices de la dégringolade, Edu Saniña, suiveur du club pour Gol, les scrutait en réalité avant même le début des échauffourées : « Tout a commencé avant même la préparation pour la Supercoupe d’Europe contre Manchester City. Monchi (directeur sportif du club, NDLR) avait annoncé son départ pour Aston Villa, beaucoup de joueurs n’étaient pas au courant et il y a une grosse fracture avec la direction. » La triste confirmation du pauvre bilan établi la saison dernière (déjà), avec une douzième place en championnat, sauvée par ce succès en C3.
La défection de l’historique Monchi n’a ainsi fait qu’élargir la cassure entre les cadres, pour qui il servait d’intermédiaire solide avec le président José Castro Carmona, les recrues, dont il était l’initiateur, et les dirigeants. Une fragilité interne, accentuée par de sérieux problèmes économiques, qui a vu le club perdre son sponsor principal, s’endetter de 90 millions d’euros et placer l’ensemble de son effectif sur la liste des transferts pour en tirer quelques deniers. À ce titre, le déficit sévillan en matière de transferts sur les cinq dernières saisons s’élevait à près de 80 millions. Ce qui prenait la direction d’une saison poussive s’est transformé en bourbier, avec des « recrues déboussolées, car celui qui les a ramenées n’est plus là, et la direction se préoccupe plus des affaires économiques que du bien-être des joueurs », pose Saniña.
Du renouveau en janvier
Pour les cadres restés, le débat s’axe finalement autour de la motivation. Lassées de voir leur club ne faire que survivre, des figures comme Ivan Rakitić, Youssef En-Nesyri, Lucas Ocampos ou Jesús Navas semblent en effet au bord de la rupture. « Aujourd’hui, les deux seules satisfactions se nomment Djibril Sow et Dodi Lukebakio, rappelle Edu Saniña. Les deux seuls nouveaux à s’être intégrés comme il le fallait. » De quoi donner lieu à des scènes surréalistes. Postés devant le centre d’entraînement Ramón Cisneros Palacios lundi dernier, une cinquantaine de supporters s’en sont violemment pris aux joueurs. Le « mouille le maillot ou casse-toi » a ainsi résonné à chaque sortie de grosse cylindrée du parking, avant que l’évènement ne dégénère. Vexé par les insultes, Erik Lamela a répondu avec une bonne dose de noms d’oiseaux, avant de défier la foule à la bagarre. Il a alors fallu l’intervention du service d’ordre pour disperser tout le monde.
À tous les étages, rien ne va dans le bon sens à Séville. Seul consensus trouvé : il faut tout reconstruire en janvier. « L’entraîneur, Diego Alonso, est arrivé il y a peu et se retrouve un peu dans un bourbier. Il est arrivé à un moment critique, et on lui demande en plus de faire des résultats. Non, ce qu’il faut, c’est finir cette année 2023 tant bien que mal, et repartir de zéro en janvier. L’entraîneur aura eu le temps de trouver la formule adéquate, et les joueurs de se remettre la tête à l’endroit. Ensuite, c’est objectif maintien », conclut Saniña. Les Sévillans disposent donc de six mois pour tout changer et, au moins, colmater les dégâts. S’ils parvenaient à renverser Lens (3e du groupe avec cinq points), l’actuel dernier du groupe B de Ligue des champions (avec 2 points) pourrait arracher ses retrouvailles avec sa chère Ligue Europa. Vu la réussite sévillane dans cette compétition, on peut donc dire que la saison du Séville FC se joue ce mardi à Bollaert.
Par Adel Bentaha
Propos d'Edu Saniña recueillis par AB.