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De Rossi, un nouveau costume à sa taille à la Roma
En janvier dernier, Daniele De Rossi retrouvait sa ville de toujours, Rome, et son club de toujours, la Roma. Et c’est désormais dans le rôle de Mister que DDR s’est offert une seconde jeunesse dans la ville éternelle.
« C’était impossible de refuser d’entraîner la Roma, mais je veux être traité comme un entraîneur et pas comme un enfant du club. » C’est avec ces mots que Daniele De Rossi se présente à la presse, le 19 janvier dernier. Quatre ans et demi après, le champion du monde 2006 est de retour au bercail, avec pour mission de relancer une équipe au fond du trou. La tâche s’annonce âpre, mais pas impossible, comme lui-même le dit : « Si je ne me sentais pas capable ou bien que l’équipe était mauvaise, j’aurais refusé. » Deux mois plus tard, la Roma revit, en attestent les résultats obtenus : treize matchs joués pour neuf victoires, deux nuls et deux défaites, pour passer de la 9e à la 5e place. Avec en bonus une qualification pour les quarts de finale de la Ligue Europa.
« Il m’a redonné confiance et m’a remis au cœur du jeu, c’est ce qui me manquait ces deux dernières saisons. J’ai énormément d’estime pour lui », expliquait en conférence de presse Lorenzo Pellegrini, symbole de cette résurrection romaine. Deux petits mois ont suffi à De Rossi pour (re)conquérir le cœur des tifosi romains. Avant d’être adoubé chez lui, l’emblématique numéro 16 giallorosso s’est fait les dents à Ferrara, sur les rives du Pô. Comme le dit le dicton, l’échec précède la gloire.
Le laboratoire de Ferrara
Comme beaucoup de ses compères champions du monde, De Rossi a décidé d’embrasser une carrière d’entraîneur. Après une expérience dans le staff de Roberto Mancini, notamment lors de l’Euro 2020, puis auprès des sélections U15 et U20 dans le rôle d’assistant technique, c’est en octobre 2022 que l’enfant d’Ostia se jette dans le grand bain. Et c’est le club de la SPAL – alors en grande difficulté en Serie B – qui décide de lui faire confiance, à la suite du licenciement de Roberto Venturato.
Scusateci, noi lo ricordavamo diverso 🤔😂#ForzaSPAL #ALLASPAL #DeRossi ⚠️ pic.twitter.com/A9kTlNjZNs
— SPAL (@spalferrara) October 12, 2022
Un pari osé, risqué diront certains, mais De Rossi obtient d’emblée la confiance de ses premiers soldats. « Il est arrivé avec une grande humilité, il prenait le temps de discuter avec tout le monde. Par exemple, il ne voulait pas qu’on l’appelle Mister ou Coach, mais simplement Daniele. Sa simplicité et ses qualités humaines nous ont surpris, quand on connaît la star qu’il était », développe Salvatore Esposito, qui a évolué sous ses ordres durant six mois. Les débuts de DDR en Émilie-Romagne sont prometteurs, avec notamment un succès 5-0 face à Cosenza. Le néophyte propose alors un jeu porté vers l’offensif, avec du pressing et de la verticalité : « Il s’inspirait de Guardiola et de De Zerbi dans son approche », précise Esposito. Un football total qui a aussi son revers de médaille : les Biancazzurri concèdent plus de buts qu’ils n’en inscrivent. La situation se complique, la bande de Daniele enchaîne les défaites, et après une série de trois revers consécutifs, le champion du monde est démis de ses fonctions.
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Mais sa philosophie de jeu et sa personnalité ont marqué les esprits de ses anciens joueurs. « J’en garde un excellent souvenir, on parle encore de Daniele entre nous, assure Esposito, aujourd’hui au Spezia Calcio. Quand il est arrivé, on était au fond du trou et il a réussi à nous relancer avec ses idées de jeu, sa vision. Malheureusement, je pense qu’il était peut-être trop ambitieux pour un club de Serie B. » Excepté auprès de quelques suiveurs de la deuxième division italienne, le gioco développé par De Rossi à Ferrara n’a pas fait grand bruit. Mais les bases sont posées.
De Capitano à Mister
A-t-il les épaules pour reprendre la Roma ? Manque-t-il d’expérience pour une telle mission ? A-t-il été nommé seulement pour son nom ? Lors de son intronisation en janvier dernier, Daniele De Rossi suscite – à juste titre – beaucoup d’interrogations. Le bambino du club romain a rapidement fait en sorte de montrer qu’il n’avait pas seulement été choisi pour son patronyme et sa barbe soyeuse.
Dès les premières rencontres, DDR impose sa patte, passant en 4-3-3, et appliquant les mêmes principes de jeu qu’à la SPAL. « Je prends du plaisir à regarder jouer cette Roma », introduit Ricardo Faty, qui a évolué pendant deux saisons à ses côtés. L’ancien milieu romain suit toujours assidûment la Louve et il avoue être tombé sous le charme de ce qu’a mis en place son ancien coéquipier : « Si on compare avec son prédécesseur Mourinho, je ne dirais pas que c’est un jeu plus offensif, mais plus enthousiasmant. On ressent une équipe beaucoup plus soudée et déterminée, que ce soit offensivement et défensivement. »
Si de l’eau a coulé sous les ponts et que le temps « des parties de PlayStation en mise au vert » semble révolu, Ricardo Faty n’est pas surpris de l’avoir vu enfiler le costume de Mister : « On sentait son âme naturelle de leader, quelqu’un capable de souder un groupe. Il n’a jamais dit formellement qu’il voulait devenir entraîneur après sa carrière, mais ça se sentait. Quand je l’ai connu, il était encore très jeune, mais il avait déjà ce côté meneur d’hommes. »
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Plus que son côté meneur d’hommes et sa capacité à fédérer un groupe, c’est son exigence tactique qui tape dans l’œil. En l’espace de treize matchs, le fraîchement diplômé de la licence pro UEFA a fait de la Roma une équipe très disciplinée tactiquement, avec un bloc équipe qui défend et attaque de manière compacte. Exemple il y a trois semaines lors du huitième de finale aller face à Brighton (4-0), rencontre durant laquelle DDR « a donné une leçon à son homologue italien, Roberto De Zerbi », souligne Faty, qui ajoute que « ce n’est vraiment pas donné à tout le monde ».
Présent dans les travées du Stadio Olimpico, le vainqueur de la Coppa Italia 2007 a même été impressionné : « Il est parvenu à faire déjouer cette équipe de Brighton à tous les niveaux en identifiant ses forces et ses faiblesses. Sa tactique a totalement marché, c’était vraiment un tour de force, tout le mérite lui revient. » Une réussite inspirante pour Ricardo Faty, qui « compte bien se rendre à Trigoria dans les prochaines semaines pour comprendre sa méthodologie et en tirer des choses pour la suite ». La route est encore longue pour Daniele De Rossi, mais ses débuts dans un nouveau rôle sont prometteurs. « Seuls les résultats priment dans le football », rappelle quand même le Franco-Sénégalais. L’enfant de la Roma n’a pas attendu de mettre son costume d’entraîneur pour le savoir.
Par Tristan Pubert
Propos d’Esposito et de Faty recueillis par TP