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Serge Aurier, au bon souvenir de Paname
Il y a eu les polémiques, puis son départ du Paris Saint-Germain en 2017, et enfin ses débuts compliqués sous le maillot de Tottenham avec la concurrence féroce de Kieran Trippier. Mais cette saison, enfin, Serge Aurier a retrouvé le terrain et la niaque qui a fait de lui l’un des latéraux les plus bandants d’Europe sous le maillot parisien. Élément clé des Spurs, il aborde ce huitième aller contre Leipzig avec les fantômes loin dans le rétro et le confiance-mètre au maximum.
Chacun a sa petite façon de célébrer la Saint-Valentin. La plus efficace ? Un petit bouquet de fleurs, un resto en tête-à-tête à la lueur d’une chandelle, un cadeau. Serge Aurier, lui, avait opté pour une stratégie différente, dans la nuit du 13 au 14 février 2016. Lors d’un live de son ami Mamadou Doucouré sur l’application Periscope, il bandait l’arc de Cupidon pour envoyer une petite pique à certains de ses coéquipiers, et une belle insulte à son coach Laurent Blanc. Drôle de façon de leur déclarer sa flamme, dira-t-on. Mais qui sommes-nous pour juger ? Après tout, chacun a sa petite façon de célébrer la Saint-Valentin.
Quatre ans après « l’affaire » , tout a changé, ou presque. Periscope n’est plus vraiment une application dans le vent, sauf pour ceux qui l’utilisent via Twitter, et Serge Aurier est bien loin du Paris Saint-Germain. Mais cet épisode sur Periscope, lui, continue d’être la première chose qui vient à l’esprit au moment de repenser à Serge Aurier. Un acte fondateur dans sa carrière, plus que ses nombreux trophées, qui a acté son divorce avec le Paris Saint-Germain et l’a forcé à l’exil. « Dans cette équipe, il n’y en avait pas beaucoup qui avaient l’amour du maillot, de Paris, comme moi. J’étais fier de jouer dans ma ville, fier de l’importance que j’ai commencé à prendre. J’étais tellement content que rien ne pouvait m’arrêter. Le fait que tout ça m’en ait dégoûté au point de partir, c’est dommage.[…]Pour les gens en France, ce n’était jamais fini, » explique-t-il cette semaine dans une interview fleuve à France Football.
Oppa Tott’nam Style
Direction Tottenham, donc, un club assez gros pour lui faire oublier le Paris Saint-Germain, mais pas assez pour convaincre Adrien Rabiot. À ce moment-là, Paris semble le grand gagnant du deal : le club se débarrasse d’un joueur accablé par les polémiques et qui, sportivement, s’est fait dépasser dans la hiérarchie des latéraux droits par un Thomas Meunier performant. Mais aujourd’hui, il y a quelque chose d’assez cocasse à voir à quel point la roue a tourné : à Paris, Meunier n’est pas au top de sa forme et de sa popularité, et le poste de latéral droit est pointé du doigt comme une véritable faiblesse ; à Londres, en revanche, Serge Aurier est en train, petit à petit, de convaincre les supporters des Spurs grâce à de très belles performances auprès de José Mourinho. Et loin des murmures destructeurs de la capitale.
Tout n’est pas parfait, évidemment. Le 2 février dernier, les Spurs ont beau avoir corrigé City (2-0) au terme d’un match mêlé de maîtrise et de réussite, la rage des supporters de Tottenham se dirigeait presque unanimement vers un Aurier coupable d’avoir concédé un penalty. Une énième erreur qui ne rappelle que trop les deux premières saisons compliquées sous le maillot des Spurs d’un Aurier en reconstruction, qui a dû alors composer avec la concurrence d’un Kieran Trippier au sommet de son art. Deux premières saisons très moyennes qui font souvent pencher la balance du mauvais côté pour Serge Aurier, chacune de ses erreurs ou de ses errances dans le placement étant pointées du doigt avant toute autre chose. Il avait d’ailleurs demandé à quitter le club l’été dernier. Mais Trippier parti à l’Atlético, Aurier a récupéré un premier rôle et s’en accommode finalement plutôt bien, surtout depuis l’arrivée de José Mourinho.
Critiqué, mais décisif
Les statistiques ne sont pas tout dans le football, mais elles permettent quand même de dessiner autour de l’Ivoirien une belle tendance. Sur ses 21 apparitions en Premier League cette saison (3e joueur le plus utilisé par Tottenham en championnat après Alderweireld et Lucas, à égalité avec Son et Winks), il compte déjà 4 passes décisives, dont 3 depuis l’arrivée du Mou (2e meilleur passeur des Spurs, 7 passes dé’ toutes compétitions confondues). Un chiffre qui récompense une inlassable activité offensive, avec 91 centres en Premier League (4,3 par match en moyenne, de loin le meilleur total de Tottenham et 5e chez les défenseurs du championnat), sans pour autant masquer une grosse faiblesse défensive : Aurier compte 3,3 tacles en moyenne par match (5e meilleur total d’Angleterre chez les défenseurs), 2,5 dégagements (3e total de Tottenham) et 1,7 interception (1er de Tottenham). Et s’il concède encore beaucoup de fautes (27 en Premier League cette saison, deuxième plus gros total des Spurs), il n’est que très rarement averti (seulement deux jaunes, dont un s’est transformé en rouge, cette saison). En gros ? Cette saison, et d’autant plus depuis l’arrivée de Mourinho dont le système le met en valeur, Aurier est autant impliqué défensivement que dans l’animation offensive de son équipe et, bien souvent, le travail est bien fait. Si les critiques se font encore entendre, Serge Aurier a pourtant les arguments pour les faire mentir.
La roue a tourné pour Serge Aurier. Ce mercredi soir, au lendemain d’une défaite parisienne qui a montré un visage bien triste de ses latéraux, il entame avec un Tottenham vice-champion d’Europe une nouvelle campagne de matchs à élimination directe en C1 et il y jouera, cette fois-ci, un rôle majeur (il avait manqué la saison dernière les quarts et les demies sur blessure, et était resté sur le banc lors de la finale). Pendant que Serge Aurier retrouve son niveau de Paris, Paris aurait bien besoin d’un latéral de son niveau. Oui, les choses ont bien changé depuis Periscope.
Par Alexandre Aflalo