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Sebastian Rode, le revanchard
Après deux saisons en demi-teinte au Bayern Munich, la faute à un temps de jeu parfois maigrichon, Sebastian Rode a rejoint le Borussia Dortmund cet été. Avec pour ambition de devenir un peu plus qu'un bon joueur de Bundesliga.
« Si j’ai choisi Dortmund, c’est parce que j’ai toujours été fan du club. » En prononçant cette phrase, Sebastian Rode pensait se mettre les supporters du Borussia dans la poche. Sauf qu’en deux-trois ans, les fans de Dortmund ont appris à se méfier. Pour éviter d’être taxé d’opportuniste, l’ancien du Bayern n’a donc pas hésité à poster sur les réseaux sociaux une photo de lui avec un maillot du BvB version « Die Continentale » . « Je ne dis vraiment pas ça pour faire plaisir, quand j’étais petit j’étais vraiment fan du BvB, et jouer en jaune et noir est pour moi un rêve qui se réalise » , a-t-il surenchéri sur le champ. Les supporters sont donc rassurés, Sebastian Rode a bien envie d’être là. Et pas pour se tourner les pouces de surcroît.
« Avant mon arrivée, j’ai beaucoup discuté avec Thomas Tuchel que je connais depuis longtemps. Il sait que je suis surmotivé. Ce que j’aime chez lui, c’est qu’il ne se contentera pas de finir deuxième. Et je suis comme ça aussi » , a déclaré le joueur à sa signature. Si Sebastian Rode a autant d’ambition, ce n’est pas seulement parce qu’il était fan de la bande à Rosický durant son adolescence. Non, à bientôt 26 ans, il sait que ces deux dernières années passées au Bayern ont ralenti sa progression : « En 2014, avant d’arriver à Munich, j’avais déclaré que mon objectif était d’intégrer l’équipe nationale. Malheureusement, j’ai dû revoir mes plans. »
Deux ans de perdus ?
Pourtant, lorsque Rode arrive gratuitement au Bayern lors du mercato estival de 2014, Matthias Sammer ne tarit pas d’éloges sur sa nouvelle recrue. « Sebastian est l’incarnation du professionnalisme, du dynamisme. Je suis certain qu’il va apporter beaucoup d’enthousiasme et d’élan à notre équipe » , déclare-t-il lors de sa présentation à la presse. À l’Eintracht Francfort, Rode avait montré de belles choses, que ce soit en deuxième ou en première division. Qu’il débarque chez le Rekordmeister n’a alors rien d’étonnant. La première année, en profitant des blessures de certains cadres du milieu de terrain, Rode arrive à jouer quelques matchs et même à être titulaire une dizaine de fois toutes compétitions confondues. S’il n’explose pas véritablement, son rendement est très correct pour une première saison dans un club d’une telle envergure. Guardiola semble content de lui. L’ancien international espoir se dit alors que sa deuxième saison en Bavière ne pourra être que meilleure. Sauf que non. Vidal débarque en Bavière, les blessés reviennent dans le game et Rode voit son temps de jeu fondre comme neige au soleil.
Autre problème, Pep se met à l’ignorer. Au printemps dernier, il déclare que son entraîneur « ne lui parle jamais » et qu’il est donc « dur de savoir ce qui ne va pas » . Si aujourd’hui, Rode a trouvé, en la personne de Thomas Tuchel, un entraîneur qui tient à lui, cet épisode l’a profondément marqué. Plus que l’ignorance de Guardiola, c’est le silence des dirigeants du Bayern qui l’a choqué. Rancunier, il n’a pas l’air enclin à vouloir leur pardonner. « J’aurais aimé plus de soutien. Le club n’arrêtait pas de dire combien je comptais pour eux, mais en réalité, je ne l’ai jamais vu essayer de discuter avec Guardiola, de comprendre ce qu’il se passait. Finalement, ce n’est pas plus de la faute de Pep que des dirigeants qui m’ont laissé tomber » , affirme-t-il dans une interview à Kicker en juin dernier.
Solide comme un roc
Évidemment, Sebastian Rode n’est pas la recrue la plus clinquante du Borussia Dortmund cet été. Il n’a pas le talent d’Ousmane Dembélé ou le palmarès de Mario Götze. Il compte « juste » 99 matchs de Bundesliga dont une partie en tant que remplaçant. Pourtant, de tous les nouveaux arrivants, il est sans doute le plus important. Solide, calme et affûté, Sebastian Rode a profité des matchs amicaux estivaux pour montrer à Thomas Tuchel qu’il n’était pas là pour rigoler. Ça tombe bien, ses qualités sont exactement celles qui manquaient au BvB l’année dernière, surtout sur la fin de saison. S’il sait que la concurrence sera rude au milieu, il a conscience que grâce à lui, le Borussia pourrait être un peu plus robuste : « Je ne suis pas là pour remplacer qui que ce soit. İlkay Gündoğan est par exemple un joueur qui apportait tellement techniquement… Je n’ai pas les même qualités que lui. Mais je sais que je pourrais apporter plein d’autres choses. »
Autre donnée qui joue en sa faveur, Rode est l’une des recrues les plus vieilles du BvB. Alors qu’un bon nombre de joueurs n’ont même pas encore vingt ans, lui fait figure de vieux de la vieille. Un peu à l’image de Gonzalo Castro l’an passé – même si ce dernier était beaucoup plus expérimenté avec déjà près de 300 matchs de Buli sous le coude –, l’ancien de l’Eintracht est là pour apporter de la tenue à l’équipe. Même s’il doit à un moment le mettre sur le banc, TT sait qu’il pourra compter sur un joueur prêt à tout donner en toutes circonstances. « Mon objectif est bien évidemment de gagner des titres avec le Borussia et de jouer assez bien pour entrevoir une participation à la Coupe du monde en Russie » , déclare-t-il avec ambition. De l’ambition assumée, et non dissimulée derrière une certaine fausse modestie, c’est peut-être tout ce qu’il manquait au Borussia Dortmund. Un club connu ces derniers temps pour ne pas être capable d’achever ses adversaires. Pour cela, Thomas Tuchel s’est peut-être trouvé un nouveau soldat.
Par Sophie Serbini