- Ligue 1
- J38
- Caen-Bordeaux (0-1)
Sankharé, l’amour foot
Ce vendredi soir, en inscrivant son premier but de la saison en championnat, Younousse Sankharé a offert aux Bordelais leur première victoire en sept matchs, envoyé le SM Caen en Ligue 2, et offert un sursis à Dijon, son ancien club. Grâce à un coup de tête, bien sûr, mais aussi à pas mal d'amour.
Le football est capricieux et pique ses plus grosses crises lorsque personne ne s’y attend. Les Caennais, qui devaient assurer un point à domicile pour disputer les barrages, l’ont vérifié à leurs dépens ce vendredi soir face à des Girondins qui restaient sur une série historique de six défaites consécutives. Et qui avaient décidé de se présenter à Michel-d’Ornano avec une équipe expérimentale, comprenant entre autres un gardien, Gaëtan Poussin, qui effectuait sa première sortie en L1, des joueurs en fin de contrat non conservés, Igor Lewczuk et Jaroslav Plašil, et Sergi Palencia, dont le prêt ne sera pas converti en achat.
Autant dire qu’à l’annonce des compositions d’équipes, les supporters normands avaient pas mal de raisons d’être confiants en l’avenir. Surtout que pour orchestrer tout cela, Paulo Sousa avait choisi de confier la baguette à Younousse Sankharé dont la dernière apparition remontait au 31 mars dernier à Amiens (0-0). Remplacé par François Kamano à la 64e minute, le Sénégalais n’avait alors pas serré la main de son entraîneur en quittant la pelouse. À Caen, il est au contraire tombé dans les bras du coach dès la 19e minute après avoir marqué son premier but de la saison en championnat. Capricieux, on vous dit.
Les câlins en retour
L’improbable s’est donc produit aux alentours de 21h24, dans le Calvados. À la réception d’un centre de l’extérieur du droit d’un autre revenant, Sergi Palencia, Younousse Sankharé s’est élevé, droit et dur comme un clou de cercueil, pour placer le coup de tête qui a enterré les Caennais en Ligue 2. Et qui a offert un sursis à Dijon, le club qui l’a relancé entre 2010 et 2013. Malgré le peu de temps de jeu reçu, c’est donc vers Paulo Sousa qu’il a accouru pour recevoir une étreinte sincère. Peut-être par réflexe. Peut-être pour le remercier de lui avoir offert une dernière chance. Ou peut-être, tout simplement, parce que Younousse Sankharé est un joueur qui, plus que les autres, a besoin d’amour. Car l’homme fonctionne à l’affect, jusqu’à l’extrême.
C’est d’ailleurs tout sauf un hasard si c’est sous les ordres de Jocelyn Gourvennec, avec qui il entretenait une relation particulière à Guingamp puis à Bordeaux, qu’il a donné le meilleur de lui-même. Récemment, on l’a dit perturbé par les moqueries dont il a fait l’objet à la suite des complications subies après une opération médicale d’implants de barbe qui l’ont tenu éloigné des terrains un mois pour cause de fièvres. Cette sensibilité à fleur de peau, Younousse Sankharé l’exprime également au sortir des pelouses lorsque les choses ne tournent pas en faveur de son équipe. Ce qui fait le bonheur des intervieweurs, qui ont pris l’habitude de recueillir ses jurons.
Cœur achevé
Younousse Sankharé est un type entier, c’est à prendre ou à laisser. Et il semblerait que pour la nouvelle direction bordelaise, ce soit la seconde option qui soit envisagée. Même s’il y a deux semaines, des proches du joueur déclaraient à 20 Minutes que « Bordeaux reste sa priorité. Point barre. Il se sent très bien ici dans le club, mais aussi la ville » .
Parce que Paulo Sousa a beau déclarer que son équipe « doit posséder un sens de la famille, car nous sommes une famille » , le football régi par des fonds d’investissements ne laisse en réalité que peu de place aux sentiments. Alors qu’il suffit parfois d’un peu d’amour pour enrayer une terrible série de défaites. Cœur sur toi, Younousse Sankharé.
Par Mathias Edwards