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San Siro, le chant du cygne ?
Alors qu'il accueille ce samedi la finale de Ligue des champions, le stade milanais de San Siro a été remis à neuf pour l’occasion. Cela n’a toutefois pas réglé le problème de sa vétusté et de la cohabitation des deux clubs de la ville.
« Nous devons affronter de nombreux problèmes pour préparer une pelouse digne d’une finale de Ligue des champions. Le chef jardinier est l’unique personne avec des compétences techniques au sein de l’équipe du stade. Tous les autres peuvent au mieux tenir une fourche » . Ce coup de gueule est signé Keith Dalton, le « match operations manager » de l’UEFA durant un discours au World Stadium Congress à Doha.
Le lendemain, la MI Stadio, société gérée par le Milan et l’Inter et en charge des infrastructures de San Siro, publiera un communiqué pour réaffirmer les conditions d’un terrain en bien meilleure forme depuis le passage au mixte naturel/synthétique il y a quatre ans. Une diatribe qui symbolise cependant assez bien le statut de stade, mythique, chargé d’histoire, à couper le souffle lors des grands soirs, mais désuet et au rapport qualité/prix bien bas.
Un 4 étoiles qui en vaut 5
Pour la 4e fois, une finale de C1 aura lieu au Giuseppe Meazza. L’Inter y avait battu le Benfica en 1965, Feyenoord le Celtic en 1970, enfin, plus récemment, le Bayern avait eu besoin des tirs au but pour venir à bout de Valence. C’était en 2001, quinze années sont passées et il a fallu attendre la dernière minute pour que l’enceinte milanaise soit un tantinet rénovée. Raison principale ? Elle appartient à la commune qui a d’autres priorités, tandis que les colocataires font le strict minimum pour entretenir un immobilier qui ne leur appartient pas. On se refile la patate chaude et sans l’organisation d’un événement majeur, la situation serait probablement restée figée. Pas d’Euro suite aux deux tentatives infructueuses (2012 et 2016), mais une finale de Ligue des champions. Principales retouches ? Des nouveaux bancs de touche plus ou moins à l’anglaise, les chiottes refaits (il était temps…), nouveaux panneaux d’indications, couverture de la fosse aux pieds de la tribune orange et agrandissement du musée. La vraie nouveauté étant l’arrivée du métro, précisément le terminus de la néo-ligne 5.
Un passage sur le billard qui va enfin permettre à San Siro d’obtenir le statut cinq étoiles, car oui, quand l’agencement de la plus importante des rencontres du football de clubs lui a été attribuée, il en possédait une de moins. D’ailleurs, suite à une inspection fin mars, les fonctionnaires de l’UEFA ont parlé de « 4 étoiles et demie » devant le retard de l’avancée des travaux. L’impression est que l’organe européen a fait une fleur à l’Italie, un peu comme pour la finale 2009 disputée dans un stadio Olimpico de Rome en meilleure santé mais possédant une piste d’athlétisme qui gâche fortement la vision des spectateurs. Mais revenons à notre Meazza : son Media Center est un modeste préfabriqué d’une cinquantaine de places se trouvant en dehors du stade. Pour l’occasion, il sera évidemment agrandi, du bricolage. Une enceinte ni vraiment adaptée aux journalistes, ni aux personnes handicapées devant se présenter deux heures avant le coup d’envoi pour s’offrir les meilleures places (placement libre), si elles arrivent à les obtenir.
Une cohabitation anachronique
L’Inter et le Milan voient évidemment ces travaux d’un bon œil, mais on est en droit de se demander si la cohabitation de deux des plus grands clubs du foot de la planète a encore un sens, qui plus est dans un stade quasi centenaire. Les dirigeants respectifs se posent la question et c’est le Milan qui est passé à l’acte avec un projet plutôt bien foutu mené par Barbara Berlusconi. Il s’agissait de racheter la Vecchia Fiera se situant dans le quartier Portello, de tout raser et d’y construire un stade de 55 000 places juste à côté du nouveau siège. Un quartier 100% rossonero. Tout était prêt, la promo, les maquettes… avant une incroyable machine arrière. Motif officiel : le prix trop élevé de la bonification du terrain. Motif officieux : Silvio Berlusconi n’a aucune intention de déménager pour des raisons sentimentales.
Du coup, l’Inter s’est sentie flouée, d’autant qu’Erick Thohir s’était déjà fait son petit film, réduction de la capacité du stade, restos au 3e anneau (éternellement fermé hormis pour le parcage visiteurs et les gros chocs) et tout le toutim. Pour le moment, c’est l’impasse et une des raisons pour lesquelles ces deux institutions sont complètement larguées. D’ailleurs, une étude de la chambre de commerce de Monza et Brianza se basant sur divers paramètres (chiffres d’affaires des clubs, résultats, réputation internationale, valeur économique du territoire, etc.) a calculé que San Siro était victime d’un debranding de 6,6 milliards d’euros depuis 2009, passant de 30 à 23 quand, dans le même temps, Bernabéu enregistrait un +11,4 et Old Trafford un +16,6. Moralité, même l’embauche de Nicolas le jardinier n’y changerait rien.
Par Valentin Pauluzzi