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San Francisco 49ers et Leeds United, un pont pour l’avenir
Qui a dit que les Américains se moquaient du football, celui de l'autre côté de l'Atlantique ? Au capital de Leeds United depuis 2018, les San Francisco 49ers sont désormais propriétaires de 37% du capital du club d'Andrea Radrizzani. Paraag Marathe, président des opérations économiques et vice-président exécutif des opérations football de la franchise NFL, est devenu par la même occasion vice-président des Peacocks. Entretien avec un homme d'affaires pour qui le Super Bowl a autant d'importance que Leeds-Crystal Palace.
En quoi consiste vos missions au sein des San Francisco 49ers ?Ça fait vingt ans que je suis aux 49ers et j’ai eu différents postes. Pendant sept-huit ans, j’ai été président et chef de la direction de l’administration, je devais m’occuper de la construction du nouveau stade, le Levi’s Stadium. Après son inauguration en 2014, je suis devenu président de l’entreprise 49ers et nous faisons de nombreuses choses, comme investir dans d’autres équipes de football, d’autres types d’investissements, du consulting, toutes les opportunités de business qui permettent de développer les 49ers. Et ça passe par investir dans d’autres équipes de sport, comme Leeds United dont je suis devenu vice-président et c’est le projet qui m’excite le plus désormais.
Pourquoi avoir choisi Leeds plutôt qu’un autre club ?Tout le monde dit que Leeds est un géant endormi, et c’est tellement vrai. Le club a de fortes racines, une histoire remarquable et une base mondiale de fans. Lors des deux dernières décennies, le club galérait et était en dehors de la Premier League. Il y a 30-40 ans, c’était un des meilleurs clubs d’Angleterre et on a failli louper une génération entière de fans en étant en dehors de la Premier League. On a senti que c’était un club avec l’opportunité de devenir tellement plus grand, et on avait envie de les aider à y arriver. Pour moi, c’est un club similaire dans de nombreux aspects aux 49ers des vingt dernières années, donc depuis que j’ai commencé à travailler aux 49ers. Quand on regarde la franchise NFL et le club de football mondial que nous sommes devenus, une véritable marque internationale, nous pensons que Leeds a le même potentiel.
Pourquoi une franchise NFL s’intéresse à un club de soccer ?Nous sentons que nous avons l’expertise et des personnes très compétentes pour améliorer les mêmes choses que nous avons améliorées aux 49ers. Nous voulons déployer nos ailes, partager nos succès et aider d’autres clubs. Que ce soit jouer au football, au soccer, au basket-ball, au cricket, c’est la même chose. Les joueurs sont sur la pelouse, sur le parquet ou sur la glace et il y a la partie commerciale en dehors du terrain, le business est vraiment similaire peu importe la discipline. Et nous avons trouvé qu’avec Leeds, il y avait une opportunité de faire mieux. Manager un club de soccer et une franchise NFL est similaire, car on retrouve les mêmes concepts. Les joueurs ont des agents avec des contrats à négocier, vous devez maximiser ce que vous pouvez, faire ce qu’il est possible avec votre budget pour avoir les meilleurs joueurs possibles sur le terrain et dans le même temps, minimiser les risques. Vous avez un stade, il faut faire en sorte de vendre des tickets, avoir des partenariats et en faire un endroit accueillant. Vous devez essayer de faire grandir votre marque, faire que des enfants deviennent fans de l’équipe et développer le merchandising. Il faut captiver la fan base et c’est ce que nous essayons de faire désormais avec Leeds.
Personnellement, est-ce que le soccer vous passionne ?J’aime vraiment beaucoup. Je l’aime autant que je le déteste, car je suis ravi lorsqu’on gagne, mais j’agonise quand on perd. Mais Leeds est réellement devenu une partie de moi.
Quels sont vos projets et vos objectifs avec Leeds ?Le premier objectif était de revenir en Premier League, et c’est déjà super d’y être arrivé. Le deuxième objectif à court terme, c’est l’étape supérieure, c’est-à-dire de montrer qu’on est capable d’y rester. Plus de la moitié voire les deux tiers des clubs promus en Premier League sont relégués dans les deux saisons suivantes. Il faut donc que l’on montre qu’on est capable d’y rester et que chaque saison commence sans l’inquiétude d’être potentiellement relégué. Et évidemment, après cette étape, avancer au classement et pouvoir jouer la Ligue Europa, puis la Ligue des champions. Nous devons croire au fait que sky is the limit.
Quelles sont vos missions personnelles en tant que vice-président ?Faire en sorte que l’équipe ait du succès sur le terrain et captiver la base de fans que nous avons dans le monde. Il faut qu’une vraie famille se crée autour et avec Leeds United. Que Leeds devienne une véritable marque, à l’instar du Paris Saint-Germain. Nous devons faire en sorte que Leeds puisse être ce type de marque.
En France, nous avons Frank McCourt comme propriétaire de l’Olympique de Marseille, avez-vous suivi son projet et qu’en pensez-vous ? Des critiques sont souvent revenues sur le fait que gérer un club de football n’est pas la même chose que gérer une franchise aux États-Unis.J’ai un peu suivi son projet. J’ai fait en sorte d’être attentif aux propriétaires américains qui se sont implantés dans des clubs européens. Je pense qu’il y a quelque chose que nous devons faire et que nous ne faisons pas. Je ne vise personne en particulier, mais ma conviction est que, aux États-Unis, quand les success stories fonctionnent, c’est lorsque nous nous en soucions vraiment et que nous y mettons de la passion. Nous, Américains, devons vivre et mourir avec les clubs européens comme nous le faisons aux États-Unis. Ça ne marche pas quand nous y voyons juste une opportunité financière et d’investissement. Sans cette passion, c’est difficile d’y mettre vraiment une part de soi-même. C’est pour ça que nous sommes si excités par le projet de Leeds. Certes nous investissons de l’argent, mais nous mettons vraiment de l’amour dans le projet.
Dans les tout prochains mois, que comptez-vous mettre en place avec Leeds ?C’est simple, me faire vacciner pour pouvoir retourner sur place. (Rires.) Je n’ai pas pu y aller depuis neuf mois, j’y vais d’habitude toutes les six semaines et je voudrais désormais y aller toutes les quatre semaines, mais je ne peux pas pour l’instant.
Avez-vous eu des échos sur la réaction des supporters des Peacocks depuis le début des investissements des 49ers ?
Ils sont conscients du projet et très optimistes. Ils comprennent notre implication, que ce n’est pas que de l’argent, mais du temps vraiment investi et des ressources apportées au club pour grandir.
Avez-vous entendu parler du projet de Superligue ? Pensez-vous qu’un système comme celui-ci est une bonne idée, à l’instar de la NFL ou de la NBA ?J’en ai entendu parler. Je n’ai pas tous les détails, car j’ai seulement lu quelques articles à ce sujet, mais je sais que la Premier League a toujours fait en sorte d’avoir un championnat compétitif basé sur la méritocratie, et on peut voir que ça fonctionne très bien comme ça. J’aime le format actuel du soccer européen. Et je ne pense pas qu’on puisse comparer la NFL à la Superligue. Quand on regarde la NFL, c’est similaire au soccer européen, lorsqu’on gagne sa division, on joue les play-offs et c’est la même chose si le club est bien classé en Premier League, il peut prétendre à des places européennes.
Propos recueillis par Alexandre Delfau
Photo : 49ers