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  • Économie du football

Salary cap… ou pas cap ?

Par Pierre Rondeau
Salary cap… ou pas cap ?

La crise devrait accélérer les choses : face aux difficultés économiques qui s’accumulent, les clubs de Ligue 1 pourraient décider de la mise en place d’un plafonnement des salaires. C’est en tout cas le souhait de la DNCG. Mais le salary cap est-il réellement une bonne idée ou est-ce juste de la poudre aux yeux ?

La situation est, pour le moment, très inquiétante. La crise sanitaire maintient les huis clos dans les stades et bloque les recettes de billetterie des clubs professionnels. Rajoutez à cela la faillite du principal diffuseur Mediapro, incapable d’honorer son contrat de 830 millions d’euros avec la LFP, et le retour, très certainement au rabais, de Canal+, les prêts accumulés par les équipes et les chutes des revenus commerciaux, et vous obtenez une crise qui tend les bras.
Selon Jean-Marc Mickeler, président de la DNCG, chargé de la surveillance comptable des clubs et récemment interrogé par le quotidien L’Équipe, « les pertes sont incommensurables ». Sur toute l’année civile 2020, la Ligue 1 devrait présenter un déficit de 800 millions d’euros, et les choses ne devraient pas aller en s’améliorant. Il faut donc trouver des solutions. Et vite, idéalement.

Salaires trop chers ?

Pour lui, le salut passera bien évidemment par une réduction des salaires, peut-être provisoire, juste le temps de voir passer les choses, pour ensuite réfléchir à une forme de régulation du football. Déjà, en mars dernier, avant le début de la pandémie en Europe et du confinement, Mickeler avait soumis l’idée d’un plafonnement contrôlé des salaires, à travers, à la fois, des ratios sur le chiffre d’affaires total et sur l’évolution proportionnée (l’idée, qu’en gros, la masse salariale peut seulement augmenter dans les mêmes proportions que l’évolution du budget et du chiffre d’affaires total). Ce plan avait dû être reporté sine die après les premiers déboires économiques. Par la suite, plus personne n’en avait reparlé… jusqu’à l’annonce des pertes records.

D’ailleurs, Mickeler n’est pas le seul à vouloir de la régulation dans le football, à vouloir contrôler et plafonner les salaires des footballeurs, jugés mirobolants et déconnectés des réalités économiques et sociales du pays. L’actuel groupe d’économie du sport à l’Assemblée nationale, codirigé par les députés Régis Juanico et Cédric Roussel, se penche très sérieusement sur une proposition de loi visant à la mise en place d’un salary cap, à échelle française, voire européenne.

Avec eux, le parlementaire socialiste Dominique Potier, élu de Meurthe-et-Moselle, soutient, depuis 2017, une proposition de salaire maximal à 12 fois le salaire minimum, autrement dit à 42000 euros par mois en Ligue 1 (le salaire minimum en Ligue 1 étant de 3500€, N.D.L.R.). Jamais votée, malgré 4 projets présentés, cette idée fait pourtant son petit bonhomme de chemin et regroupe de plus en plus de partisans. Le contexte économique actuel pourrait-il permettre sa concrétisation et son application réelle ? Si oui, dans quel but et avec quels intérêts ?

Des effets positifs… vraiment ?

Dans l’histoire, le salary cap, couramment utilisé dans le sport américain, date de 1922, moment où la Cour suprême américaine autorisa les organisateurs des ligues à ne pas respecter les règles de la concurrence dès lors qu’elles contribuaient au « bien-être social » . Le but originel du salary cap n’est donc pas d’assurer une stabilité monétaire et financière, mais de protéger l’intensité et l’équilibre compétitif, et de permettre que toutes les équipes se valent sans qu’il y en ait une toute puissante qui accapare, à coups de dollars, les meilleurs joueurs. Ceci étant, en Top 14, le championnat de rugby français a beau avoir appliqué un salary cap, il n’a pas pour autant garanti un équilibre et une stabilité économique. De très nombreux clubs étaient encore en situation de déficit avant la crise de la covid-19.
De même, il existe de nombreuses variantes du salary cap, sans forcément d’effets économiques ou sportifs notables. Par exemple, la MLS, le championnat nord-américain de soccer, a voté la règle du « joueur désigné » , dite « loi Beckham » , en 2007, permettant de désigner 3 joueurs au maximum par équipe n’intégrant pas les comptes de la masse salariale et donc de la limitation des salaires. Initialement, le but était de pouvoir attirer des superstars européennes avec des rémunérations déplafonnées, pouvoir payer Zlatan Ibrahimović ou Steven Gerrard plus de 5 millions de dollars pendant que tous les autres touchaient moins de 50 000 dollars par an. En conséquence, les inégalités ont explosé et sont aujourd’hui à des niveaux bien plus élevés que celles déjà observées en Europe, sans que l’équilibre économique de la MLS ne soit pérennisé.
Quant à la NBA, le salary cap présente une autre variante dite « souple » . Il est calculé sur la part du chiffre d’affaires total alloué aux joueurs et peut être dépassé. Auquel cas, les franchises s’acquittent alors d’une « luxury tax » sur le montant dépassé, immédiatement redistribuée aux autres équipes qui ont respecté la règle. Mais même ici, l’objectif économique n’est pas atteint et les rémunérations, malgré ce plafonnement symbolique, atteignent des sommets.

Le foot doit voir plus grand

Le salary cap dans le football français et/ou européen ne serait donc ni fonctionnel ni pertinent, s’il est la seule option. Appliqué à échelle franco-française, il contribuerait à réduire la compétitivité du pays et à soutenir seulement la rémunération des propriétaires. Pire, globalement, il provoquerait des effets pervers et des externalités négatives, s’il est mal réfléchi. Pour l’économiste Christophe Le Petit,« l’introduction d’un salary cap ne va pas résoudre tous les problèmes du sport professionnel.[…]Il faut avoir, au contraire, une approche globale où la régulation salariale ne serait qu’un outil parmi d’autres pour assainir le milieu. » L’option salary cap ne serait alors qu’un gadget si elle est appliquée seule. Pour un véritable bouleversement dans le foot – pour peu qu’on le souhaite, évidemment -, ce n’est pas une seule loi qu’il faut voter, mais un plan concret, total, complet et réel de régulation. Ce qui est autrement plus ambitieux qu’un peu de poudre aux yeux…

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