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- 38e journée
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Sadio Mané, au bon souvenir de la CFA
Sadio Mané, c'est l'histoire d'un mec érigé en génie au Sénégal, remplaçant en CFA en France, exilé en Autriche, puis titulaire dans bon club de Premier League. Un parcours assez classique, en somme.
« Il vient de Sédhiou, le Sud du Sénégal. C’est une région fleurie. » Mady Touré est fier d’évoquer le cas Sadio Mané, lui, le boss de l’établissement AS Génération, le centre de préformation affilié à Metz depuis 2003. Il a bien connu Sadio pour l’avoir couvé durant toute sa formation. C’est le troisième de ses poulains qu’il voit briller outre-Manche après Papiss Cissé et Diafra Sakho. « Sadio allait plus vite que les autres et il a surtout cette capacité que ni Messi ni Neymar n’ont : celle de répéter les efforts et les courses sans jamais s’arrêter ou ralentir. » Rien que ça. À l’AS Génération, on préforme les joueurs. On leur apprend les règles de base du football de haut niveau. Entraînement, jeu collectif et personnalisé, l’académie fait de jeunes enfants des rues des jeunes adultes prêts à affronter le haut niveau hexagonal. À leur majorité, les meilleurs partent à Metz. « Sadio était un garçon attentif et très sage. Je n’ai jamais eu de souci de discipline avec lui » , se remémore Mady Touré.
Pubalgie, CFA et Ligue 2
Malheureusement, son ange gardien ne pourra lui venir en aide quand, en France, le jeune Mané connaît de grosses difficultés. « Il a rapidement contracté une pubalgie. Et comme il ne voulait pas s’arrêter, il jouait avec la douleur. Jamais à 100%, quoi » , précise Touré. Relégué avec la CFA, Mané ne joue pas et ne parvient qu’à grappiller quelques minutes de jeu au compte-gouttes. « J’ai failli tomber de ma chaise quand on m’a parlé d’échec, tempère José Pinot, directeur de la réserve du FC Metz. Si Sadio jouait au début des bouts de matchs avec la CFA, c’est parce qu’il ne pouvait tout simplement pas tenir 90 minutes. » L’homme se souvient d’ailleurs d’un jeune homme « calme, avec un peu de tempérament, mais à l’écoute et toujours prêt à s’améliorer » .
Rapidement, les choses se remettent dans l’ordre, et Sadio Mané passe de la CFA à la Ligue 2. « Rapidement, la CFA est devenue trop facile pour lui. Puis après, ça a été au tour de la Ligue 2. Il a fait aussi de super Jeux olympiques à Londres. C’est pour ça qu’il n’est pas resté bien longtemps chez nous » , précise José Pinot. Pourtant, après son joli parcours avec la sélection sénégalaise aux JO 2012, aucun club de Ligue 1 ne semble décidé à lever les quatre millions d’euros fixés par Metz, descendu en National. « Marseille, Lille et Bordeaux s’étaient renseignés, malheureusement la frilosité des clubs français en a décidé autrement » , révèle Thierno Seydi, agent de Sadio Mané à l’époque. Proposé à des clubs de Premier League, Mané est recalé, faute d’avoir joué 75% des matchs de sa dernière saison et d’avoir jamais été appelé au moins une fois chez les Lions de la Téranga. Du coup, à l’été 2012 et à 48h de la fin du mercato, Sadio est toujours messin.
Marseille, Lille et Bordeaux l’ont loupé
Après une dernière offre de Nice jugée trop faible, c’est finalement le Red Bull Salzbourg qui empoche la mise. Quatre millions d’euros dans les caisses du FC Metz, une jolie opération financière pour le club messin et un passage éclair qui, pour José Pinot, prouve une nouvelle fois la valeur du centre de formation messin. « Attention, le cas Mané, c’est un franc succès. Le mec, c’est un ambassadeur de notre centre de formation. Il est la preuve qu’on est une bonne maison et qu’on a du savoir-faire. » Voilà donc Sadio propulsé en Autriche. Pour Thierno Seydi, il y a là une vraie stratégie de progression de carrière. « L’objectif, c’était qu’il devienne un bon joueur en Autriche et qu’il rebondisse ensuite soit en Bundesliga, soit en Premier League. Il lui fallait un club intermédiaire. Et j’avais vu juste » , assure-t-il.
Au Sénégal, la presse s’indigne toutefois du choix de Mané et de son agent. « J’ai été traité de paria, mais aujourd’hui je suis vu comme un génie » , ironise Seydi. Pour cause : Mané reste deux saisons en Autriche, avec un bilan on ne peut plus honorable, 31 buts en 63 matchs. De quoi lui ouvrir enfin les portes de la Premier League. Le club de Southampton vient en effet le débaucher lors du dernier jour du mercato 2014, avec un superbe chèque de 16,5 millions d’euros. Une petite revanche pour le joueur et son agent, notamment vis-à-vis de la Ligue 1. « Au départ, je ne tenais pas trop à ce qu’il signe son premier contrat pro à Metz, car le club jouait à un bas étage du football français, avance l’agent. Mais au final, je ne regrette pas, car ce sont les seuls qui ont cru en lui. Cela avait été la même chose pour Papiss Cissé et Diafra Sakho : aucun club français n’a daigné les recruter, et aujourd’hui, regardez où ils sont. » Cerise sur la saison : le week-end dernier, Sadio Mané a inscrit le triplé le plus rapide de l’histoire de la Premier League. Une manière comme une autre de dire au monde entier : « Rappelez-vous de mon nom. »
Par Quentin Müller