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Rudy Gestede : « Il faut quand même prendre du plaisir dans la défaite »
Depuis le début de sa carrière, Rudy Gestede, 28 ans, a disputé 45 matchs de Premier League. Et n'en a gagné qu'un. Une statistique que l'avant-centre béninois de Middlesbrough relativise, en s'estimant heureux de réaliser un rêve d'enfance.
Comment se passe la vie à Middlesbrough ?Au club, ça va, il y a une bonne ambiance. En revanche, dans la ville, il n’y a pas grand-chose à faire. C’est très petit, très calme. Cela ressemble un peu au Nord de la France, avec des gens très accueillants, et qui adorent le foot.
Vous avez essayé le parmo, la spécialité culinaire locale ? Il s’agit d’un morceau de poulet recouvert de béchamel et de fromage. Ça fait envie.Malheureusement non, je n’ai pas encore goûté.
Après le match nul du week-end dernier face à Burnley (0-0), vous croyez encore au maintien de Middlesbrough ?On est encore dans la course, avec seulement six points de retard sur Hull, le premier non-relégable, avec deux matchs en retard dont celui de ce soir. Tout est encore possible, donc.
Passons aux choses qui fâchent. Sur 45 matchs de Premier League disputés dans votre carrière, vous n’en avez gagné qu’un seul. C’était avec Aston Villa, en août 2015. Comment l’expliquez-vous ?Je suis conscient que la statistique est très mauvaise pour moi, mais c’est un sport collectif. La saison dernière, je n’ai pas tellement joué avec Aston Villa, ce qui explique en partie la déroute. Et cette saison, je suis arrivé à Middlesbrough à la trêve hivernale, avec pour mission d’aider le club à se maintenir. Après, c’est Dieu qui décide. Moi, je fais le maximum tous les jours, en espérant être récompensé. En attendant, je prends mon mal en patience.
La vie de footballeur est souvent considérée comme une vie de rêve. Mais peut-on vraiment être heureux en gagnant aussi rarement ?Psychologiquement, c’est sûr que c’est compliqué. Parce que bon, le plaisir on le prend dans la victoire. Après, je suis conscient de la chance que j’ai d’exercer ce métier, d’être payé pour pratiquer mon hobby au plus haut niveau. Mais quand je rentre chez moi après les matchs, c’est un peu dur. C’est pesant. Mais il ne faut pas lâcher, il faut rester déterminé, en se disant qu’on va gagner le prochain match. À un moment, la chance va forcément me sourire.
Il peut quand même y avoir de la satisfaction, après une défaite ?
Bien sûr. À mes yeux, je joue dans le plus beau championnat du monde. Jouer contre Manchester United, Arsenal et toutes ces grosses équipes, c’est un rêve d’enfance. Dans ce petit malheur, il faut quand même prendre du plaisir. Et puis je relativise. Quand je rentre à la maison, j’ai ma famille qui m’aide à oublier un peu la défaite.
Votre femme fait tout pour parler d’autre chose que du match, quand vous rentrez ?Elle en parle, mais ce n’est tellement pas son truc, le foot. On se rassure en se disant qu’on est tous en bonne santé, au sein d’une famille heureuse. C’est bien là le principal. Mon fils de 5 ans me demande juste si on a gagné, si j’ai marqué, et puis il retourne jouer. Ça ne le touche pas plus que ça. Si on a perdu, c’est pas son problème. Tant qu’il peut aller jouer, tout va bien pour lui.
Vos potes vous chambrent à ce sujet ?Ils évitent. Je suis assez grand, donc je peux m’énerver rapidement. Non, ils essaient de me remonter le moral, c’est pour ça que ce sont mes amis.
Est-ce que vous preniez plus de plaisir en Championship, où vous avez connu plus de succès ?Forcément, parce que je marquais plus de buts. Mais malgré la difficulté, je préfère évoluer en Premier League. Je réalise mon rêve, ce ne sont pas quelques barrières qui vont me faire baisser les bras.
Qu’est-ce qui rend les matchs de Premier League si difficiles à gagner ?Il y a une grande différence de niveau entre les équipes de tête et les autres. Quand on joue contre une équipe du haut de tableau, cela se limite souvent à un attaque-défense. On peut de temps en temps arracher un résultat sur un coup de chance, mais… En revanche, entre les équipes de seconde partie de tableau, ça se joue à pas grand-chose. Même nous qui sommes en difficulté, on n’a pas grand-chose à envier aux équipes qui sont au-dessus. Elles ont peut-être un peu plus d’expérience, mais ça se joue sur des détails. En Premier League, il ne faut pas rater ses occasions, parce que t’en auras pas 2000. Alors qu’en Championship, tu sais que si tu loupes, t’en auras d’autres derrière.
Est-ce que vous pourriez envisager un retour en France ?Je connais mes qualités, je connais mon niveau, et je n’aspire pas à aller au PSG pour le moment. Et je ne vois pas quel autre club peut sortir 8 ou 10 millions d’euros pour un joueur de mon niveau.
Propos recueillis par Mathias Edwards