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Ruben Neves et Rony Lopes dos ados
Ils sont jeunes, ont encore des boutons plein la gueule et quelques poils au menton. Pourtant, ils ont déjà tout pour briller sur la scène européenne. Eux, ce sont Ruben Neves (17 ans) et Rony Lopes (19 ans), et mercredi soir, ils s'affronteront pour une place en Ligue des champions.
Que fait-on à 17 ans ? Réviser pour ses premières épreuves du bac, jouer au foot avec ses potes jusqu’à pas d’heure, mais prendre plus de râteaux hors du terrain qu’à l’intérieur… Que ne fait-on – en théorie – pas à 17 ans ? Conduire une voiture seul, acheter de l’alcool, voter… Rien, donc. Sauf quand on s’appelle Ruben Neves et que l’on joue au football comme un dieu. Là, tout est déjà permis. Comme conduire un Estádio do Dragão plein à l’orgasme ou battre le record de la plus grande légende du FC Porto. Vendredi dernier, le jeune milieu défensif est devenu le plus jeune buteur de l’histoire de la Liga Sagres, à 17 ans et 155 jours, à la faveur d’un extérieur du droit aussi subtil qu’efficace. Romain Salin, le portier français de Maritimo, a seulement pu regarder le ballon franchir la ligne. Fernando Gomes, ex-attaquant de la maison, a vu, impuissant, son record s’envoler, arraché par un môme encore plus précoce qui ne demande qu’à avoir la même carrière que lui. Car précocité n’est pas forcément synonyme de grande carrière. Bojan Krkić en sait quelque chose, Marvin Martin aussi – même s’il n’a explosé « qu’à » 20 ans. Mercredi, dans le Nord de la France, Ruben Neves sera de nouveau le plus jeune, mais d’autres mômes de moins de 20 piges se dresseront sur son chemin. Divock Origi, bien sûr, mais surtout Rony Lopes, son compatriote prêté par Manchester City au LOSC. Lui aussi détenteur d’un record (plus jeune buteur de l’histoire de la FA Cup), avait été repéré il y a quelques années de cela, alors que le Brésilien d’origine évoluait encore dans les catégories de jeunes de… Benfica. Porto-Benfica. Entre Neves et Lopes, ce ne sera pas un match dans le match, mais un classico dans le barrage. Alors, qui va gagner ?
Équipe : avantage Ruben Neves
Le nouveau cru de Porto n’a plus rien à voir avec le vin bouchonné de 2013-2014. Exit Josué, Licá et Varela, bonjour Oliver, Brahimi, Tello, Casemiro, Martins Indi, etc. Sur le papier, les Dragons semblent mieux armés que les Lillois. Sur le terrain aussi. Si l’on pouvait penser que le LOSC aurait l’avantage de la cohésion d’équipe, la première journée de Liga Sagres a démontré que le travail collectif effectué par Julen Lopetegui en amont portait déjà ses fruits, du moins offensivement. Et Ruben Neves n’y est pas étranger. En plus de savoir frapper et marquer, le gamin régale ses ailiers ainsi que Jackson Martínez avec des longs ballons distillés à haute dose, permettant de varier ainsi le jeu court au sol proposé par le reste de l’équipe. Porto supérieur à Lille, oui, mais les hommes de René Girard ont tout de même un coup à jouer en contre. Avec le départ de Mangala et l’implication offensive des latéraux, Origi et Kalou ont de quoi s’éclater. Encore faut-il un joueur capable de proposer autre chose que de longs ballons à l’écossaise, à l’instar de ce que le LOSC a réalisé lors des deux premières journées de L1. À chaque fois qu’il est entré, Rony Lopes a donné du liant au jeu nordiste grâce à son activité et son intelligence. Il pourrait être la clé d’une éventuelle qualification lilloise. À moins que Marvin Martin ne se réveille après trois ans de léthargie.
Qualités individuelles : match nul
Difficile de comparer les deux joueurs étant donné qu’ils évoluent à des postes différents. Rony Lopes se définit comme un milieu créatif, une espèce de 10 moderne qui aime marquer des buts, tandis que Ruben Neves est un milieu défensif de formation. Leur jeu est donc basé sur des paramètres différents. Le Lillois est un bon passeur, mais ses qualités premières résident dans son explosivité, sa percussion, sa ruse, sa frappe, ainsi que sa disponibilité. Quant à Ruben Neves, le bougre est loin d’être un peintre quand il s’agit de dribbler, mais sa position de dernier défenseur de l’entrejeu l’oblige à mettre en valeur son sens de l’anticipation, sa vision de jeu, sa qualité de passe longue et sa frappe. En outre, les deux gosses possèdent d’énormes qualités mentales. L’un parce qu’il ne doute pas du fait qu’il s’imposera bien vite à City, l’autre parce que la pression ne l’atteint pas. Balle au pied, les deux font preuve d’une maturité « verrattienne » . Match nul, donc.
Expérience : avantage Rony Lopes
C’est bien beau de marquer pour son premier match officiel chez les pros, mais dans un match à enjeux comme un barrage de Ligue des champions, l’expérience peut faire la différence. Or, Ruben Neves n’en a pas. Rapidement surclassé chez les jeunes et passé directement des juniors à l’équipe principale sans connaître l’équipe B, le milieu portista n’a donc qu’un vrai match dans les pattes. Oui, il a été titulaire à plusieurs reprises au cours de la pré-saison et s’entraîne avec le groupe professionnel depuis près d’un an, mais son CV fait pour le moment pale figure à côté de celui de Rony Lopes, lequel a connu la Youth Champions League, le championnat et les deux coupes anglais. Sans parler du fait qu’il s’est entraîné quotidiennement avec Yaya Touré, Agüero, Kompany, Zabaleta… tandis que Neves n’a pas dû apprendre grand-chose de Licá. Dur.
Le vainqueur : l’équipe du Portugal
Le milieu de terrain du Portugal a sérieusement besoin d’un bon coup de jeune. Sans compter William Carvalho, qui débarque à peine dans le onze initial lusitanien, Raul Meireles a dépassé la date de péremption et Moutinho a intérêt à retrouver son niveau s’il ne veut pas céder sa place à l’un des deux jeunes à la mode. Ces deux-là semblent déjà destinés à former un redoutable duo sur le moyen terme au sein de la Selecção. À moins que Rony Lopes, partagé entre son pays d’accueil et son pays natal (le Brésil), n’en décide autrement. Lui qui compte une trentaine de sélection chez les jeunes a récemment été invité à jouer pour le Brésil par le directeur des catégories de base auriverde. Jouer derrière Jo, ou derrière Éder ? Dilemme de haut niveau pour le Lillois. En attendant, il devra surtout concentrer ses efforts sur Porto pour éviter de repousser un peu plus sa première participation en C1 au profit de son cadet de deux ans, lequel confirmerait sa réputation de précoce.
William Pereira