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Roy Krishna : « On s’est sentis chez nous au Brésil »
Dans la marée d'athlètes ayant participé aux Jeux olympiques, certains méconnus ont eu le droit à leur petit moment de gloire. Roy Krishna est de ceux-là. C'est le Fidjien qui a marqué le premier et, à ce jour, le seul but de sa sélection aux JO. Interview.
Roy, tu viens juste de rentrer de Rio, c’était comment ?Je n’osais même pas penser jouer au football aux Jeux olympiques. C’est une expérience irréelle. Je n’oublierai jamais ce moment. Participer à ça, jouer contre des équipes comme l’Allemagne, le Mexique, la Corée du Sud. Pffff, c’est juste un truc de fou.
En plus, tu as marqué l’unique but de ton équipe dans ce tournoi, ça te fait quoi ?Je suis super fier de ce but. Je me pince encore de temps en temps pour m’assurer que c’est bien vrai quand on m’en parle. Marquer contre le Mexique, c’est l’une des plus grandes réussites de ma carrière.
Tu aurais imaginé ça dans tes rêves les plus fous ?C’est un objectif de marquer à chaque match que je joue. À ce niveau-là, c’est dingue, mais c’est arrivé. On ne me l’enlèvera jamais.
Vous avez mené contre le Mexique. Comment l’équipe vivait cela ? Quel a été le discours du coach à la mi-temps ?L’équipe était très heureuse de faire jeu égal avec le champion olympique en titre. C’était dingue. Les consignes du coach étaient de continuer sur le même rythme, jouer de la même manière tout en renforçant notre défense.
Quand on se présente aux JO en étant le petit poucet, c’est quoi l’état d’esprit du groupe ?
Dire que l’on a été submergé par les événements, c’est un euphémisme. On a vraiment réalisé ce que l’on venait de faire quand on a terminé en fait. L’équipe a adoré le Brésil. Le public s’était pris d’affection pour nous, c’était fou. Il devait y avoir une poignée de Fidjiens dans les tribunes, pourtant, on était encouragés par des « Fidji, Fidji, Fidji » , j’en ai encore la chair de poule. L’organisation était super, toujours là pour nous qui étions un peu dépassés par les événements. On s’est sentis chez nous au Brésil.
Quelles ont été vos sensations en rentrant sur le terrain pour le premier match ?Que c’était grand. (Rires) Il y avait surtout de l’excitation et de la fierté de représenter un petit pays que personne n’a jamais associé au football. Être dans le top 16 des équipes aux Jeux était déjà le meilleur moment de nos carrières.
En tant que capitaine, tu ressentais un surplus de pression ?
Bien sûr. Mais plus que le capitanat, c’est le fait d’être le seul joueur professionnel de l’équipe qui a multiplié les attentes. Tout le monde espérait que je fasse des miracles. On était trois joueurs de plus de vingt-trois ans. On devait tenir la baraque, et on le faisait en se soutenant. Je m’assurais que le groupe ait toujours le moral au beau fixe. Même après une défaite, on devait garder la tête haute et profiter.
Qu’est-ce que tu as ressenti personnellement en participant à un tel événement ?C’est un privilège et un honneur que de représenter mon pays à ce niveau-là. C’est un moment unique dans la carrière d’un footballeur, surtout quand tu viens des Fidji. Ça m’a mis dans la lumière comme je ne pensais pas y être. Je donne même des interviews à un site français. (Rires) Être au pays du football a également renforcé ma passion pour le football.
Quel a été le meilleur moment dans ce tournoi ?Entré sur le terrain, le maillot de mon pays sur les épaules, en bombant le torse de fierté. Et mon but aussi.
Comment était l’ambiance au pays ?
Les gens se sont rendu compte que l’équipe avait réalisé une de ses plus belles performances en se qualifiant pour ce tournoi. Ils avaient l’impression de vivre un moment qui restera dans l’histoire. Ça nous a un peu mis la pression, on ne voulait pas être ridicule. Mais ils comprenaient la situation. La médaille aurait été un exploit. On est 187e au classement mondial, deux de nos adversaires étaient dans le top 15, l’autre 48e. Ils ne boxaient pas dans la même catégorie que nous.
Quelle est la place du football aux Fidji ? Dans certaines régions du pays, le football est assez populaire. Ce n’est pas comparable au rugby, mais ça se développe. Que ce soit les Fidji, ou l’ensemble de l’Océanie, on a le potentiel pour progresser si les choses sont bien faites, mais ça sera long.
Pas de vacances pour toi, tu as déjà retrouvé le chemin de l’entraînement…Oui, on est en pleine pré-saison avec mon club. Je suis arrivé pile au moment du gros travail physique pour être prêt à la reprise en octobre. Ça fait plaisir de retrouver mes coéquipiers des Wellington Phoenix. Je me suis tout de suite retrouvé, même si j’étais parti quatre mois.
Propos recueillis par Nicolas Kohlhuber