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Roxana Maracineanu : Une ministre (des sports) ne devrait pas dire cela…

Par Nicolas Kssis-Martov
Roxana Maracineanu : Une ministre (des sports) ne devrait pas dire cela…

Roxana Maracineanu, notre ministre des Sports, a assisté au dernier PSG-OM au Parc des Princes. Comme nous, elle s'est ennuyée. Du coup, elle a décidé de regarder vers les tribunes et elle n'a pas aimé du tout ce qu'elle a vu et entendu. Et elle a surtout illustré à quel point le foot peut devenir le point Godwin de la politique.

« Ils criaient contre Marseille au lieu d’encourager leur équipe. J’ai entendu des choses horribles sur Marseille. Apparemment c’est historique, mais je n’emmènerai pas mes enfants dans un match comme ça pour qu’ils me demandent « mais maman, que sont-ils en train de chanter ? » » À la première lecture des propos de Roxana Maracineanu sur les réseaux sociaux, qui bruissaient d’indignation et souvent, avouons-le, de vannes sexistes, on a d’abord cru à une réponse instinctive, pour combler les attentes médiatiques. Sauf que dimanche, sur Europe 1, la ministre des Sports a remis le couvert : « Je ne vais pas répéter ici les insultes que j’entends dans les cris des supporters, qui sont soi-disant là pour encourager leur équipe alors qu’ils passent leur temps à dire des insanités sur l’autre équipe. On se permet dans le milieu du football de faire des choses qu’on ne peut pas se permettre ailleurs. »

Gouverner ou commenter ?

Passons vite sur la méconnaissance profonde du foot, et surtout de sa culture populaire, que cachent ou soulignent, selon le point de vue, les déclarations de l’ancienne nageuse médaillée olympique. On ne saurait lui en tenir grief. Être ministre des Sports n’a jamais impliqué d’être expert en tout et toutes les disciplines. Marie-George Buffet, Roger Bambuck, Bernard Laporte ou Edwige Avice l’avaient bien démontré par le passé, sans pour autant manquer à leur premier devoir : représenter et guider la politique de l’État, de la République au nom du bien commun. Et d’ailleurs on avait l’impression, après la parenthèse transparente de Laura Flessel, que Roxana Maracineanu s’inscrivait plutôt dans cette filiation des grands commis de l’État.

Voila le pire. Soit vraiment convaincue, soit prise au piège de sa logique, madame la ministre brandit maintenant la menace d’une ligue de vertus. « On est en train de réfléchir avec la présidente de la Ligue et le président de la Fédération à comment on peut faire : on va bientôt réunir les instances du supportérisme et je vais évidemment porter ce message.(…)On ne peut pas se permettre de se dire qu’on va emmener nos enfants au stade et entendre de telles choses. »

Les bras ballants, on se demande par quel bout prendre un tel fatras d’atteintes à la liberté d’expression, de bonne conscience XIXe, de condescendance anti-foot et de mépris social. Y compris le bon sens paraît désarmé. Nos kids n’apprennent plus depuis longtemps leurs insultes dans les gradins, mais avec leur smartphone. Alors quoi ? On interdit les Youtubeurs ? Pendant qu’on y est, le rap aussi, car combien de gamins innocents devant les millions de vues de PNL ? Puis les manifestations, leurs pancartes et leurs slogans si souvent orduriers (bon de ce côté, le gouvernement tente déjà le coup). Et d’expérience, autant déboucher directement sur la prohibition, puisque c’est surtout la deuxième pinte en terrasse qui menace les chastes oreilles.

Et si Madame la ministre, vous nous parliez plutôt de l’Agence nationale du sport, de ses couacs et des inquiétudes qu’elle suscite ; de ce que vous comptez faire contre le racisme dans le foot amateur, le sexisme dans les instances du sport, l’homophobie entretenue par les agents et les directions des clubs à coups de « don’t ask don’t tell ! » , le trafic des jeunes joueurs africains, sans oublier de nous justifier pourquoi nos Bleus se rendraient au Qatar en 2022 dans des stades posés sur les cimetières des ouvriers qui les ont bâtis ? Et qui sait, vous positionner face au PSG, plutôt que contre ses supporters, sur le cas Rabiot au lieu de vous réfugier derrière un « Ce n’est pas parce qu’on est ministre des Sports qu’on peut intervenir dans le sport professionnel ou sur des cas bien particuliers. » Le droit d’un travailleur, même millionnaire, concerne toujours l’intérêt public. Et contrairement au CIO en 2024, le joueur parisien paie ses impôts en France. Pour conclure, Madame la ministre, nous estimons au plus haut point le rôle d une ministre des Sports de la République française, alors par pitié, laissez les fausses pudeurs et autres « folklores » aux hypocrites ou aux démagos, et mettez-vous à bosser les vrais dossiers du foot !

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