- Premier League
- 6e journée
- Manchester United/Tottenham
Rooney, sympathy for the Devil
Le déplacement de Manchester United à Tottenham (samedi 18h30) est l’occasion du grand retour en Premier de Wayne Rooney, absent depuis plus d’un mois pour une entaille à la cuisse. L’occasion de venir rebooster les Red Devils. L’occasion aussi de remettre quelques pendules à l’heure…
C’est entendu, Wayne Rooney a des gouts de chiottes. Ceux des nouveaux riches. Le lascar crève juste d’envie d’inviter les branleurs de One Direction pour pousser la chansonnette, soit disant à l’occasion de l’anniversaire de son rejeton Kai, trois ans, qui doit probablement se foutre royalement qu’un boys band viennent ambiancer son jardin. Ou comment utiliser son bout de chou pour assouvir un kif inavouable : avoir vingt-six ans et encore écouter de la musique Biactol. C’est marrant, car l’homme Wayne est finalement aux antipodes du footballeur Rooney. Le garçon a des tropismes criards d’ado attardé ? Le joueur, lui, facture un jeu d’une maturité infinie où le strass et les paillettes sont des latineries de gonzesse. Un joueur surtout qui est essentiel au plus grand club anglais des vingt dernières années (on évitera soigneusement de dire de tous les temps, histoire de ne pas déclencher une baston larvée avec les supporters de Liverpool).
C’est marrant quand même comme le sport en général et le foot en particulier sont une invitation à la recherche permanente du contrepied. Il faut toujours que l’on essaie de jouer au plus malin. Prenez par exemple cette saison. On entend absolument tout sur l’effectif de Manchester United et sur le rôle des uns et des autres. Et dans l’habit du crack, que n’entend-on pas ? Ici que Van Persie serait le clutch player des Red Devils, là que l’homme-clé reste Paul Scholes, ou encore que le plus doué est Nani, voire même que celui qui éclairera le jeu sera Kagawa. C’est humain de chercher la nouvelle sensation ou de chercher une autre piste que le discours universel et, en ce sens, il est amusant de constater les efforts considérables déployés dans les commentaires pour faire mine de passer sous silence la seule évidence qui soit encore et toujours : le joueur le plus fort de MU, c’est Wayne Rooney. Point.
L’homme à tout bien faire
On ne devrait pas avoir à le dire, mais il le faut. Car à force de taire ce genre de vérité imparable, on finit par les oublier. Car disons-le tout net : Manchester n’est plus tout à fait United quand son attaquant n’est pas de la partie. C’est vrai, les vice-champions d’Angleterre gagnent en ce moment, mais en dispensant un win ugly qui rend la chose fragile. C’est que, dans le jeu, la bande à Ferguson est actuellement assez prévisible, un peu lente, sans idée forte et sans animation digne de ce nom. Et qui mieux que Rooney, de retour après son entaille à la cuisse, peut hisser le niveau des Diables dans chacun de ces secteurs ? Van Persie ne possède pas l’activité ni la vitesse pour réveiller tout ça, Kagawa n’en a pas l’impact physique, Nani pas la passion et Scholes est avant toute chose un gestionnaire de tâches modèle plus plus. L’animateur et le détonateur du jeu, c’est avant tout l’avant-centre de l’équipe d’Angleterre. Par sa puissance, par sa vitesse, par sa percussion, par sa capacité dans chaque zone du terrain avec un égal bonheur, aux avant-postes, sur les côtés, à la mène, au relais et parfois même à la récup’. Avec énergie, bien entendu, mais aussi, soulignons-le une nouvelle fois, ça ne mange pas de pain, avec intelligence quand le bougre navigue entre les lignes, part dans la profondeur, sur les flancs ou assure les bons replis ; un vrai casse-tête à gérer pour l’équipe adverse.
Une omniprésence qui lui jouerait presque des tours, d’ailleurs, puisque le bougre se fiche de ses stats comme de sa dernière pinte. Une tare à une époque où le ballon rond ne semble plus se lire qu’à la lorgnette « Football Manager » et sa dictature des chiffres. Mais il est comme ça, Wayne, on ne le refera pas : une bête individuelle totalement dédiée au collectif. Comme quand, le plus sérieusement du monde, il se place sur la même ligne que ses rivaux d’attaque mancuniens. « Il y a beaucoup de concurrence aux avant-postes. Tant mieux pour l’équipe. Robin van Persie, Danny Welbeck, Shinji Kagawa, Javier Hernandez et moi-même sommes en concurrence pour une ou deux places. Mais ça ne peut pas faire de mal. » Sûr de toute façon qu’il bouffera tout le monde. Après tout, peut-être que pour Rooney comme pour les commentateurs, il y a des évidences qu’il n’est plus besoin d’énoncer.
Dave Appadoo