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Romero, les frères Derrick du Paraguay
Ángel Romero est attaquant. Óscar, son frère jumeau, se balade avec le numéro 10 sur le dos. Formés à Cerro Porteño, les deux sont désormais titulaires en sélection paraguayenne. Portraits.
C’est un essai comme un autre. Deux gamins paraguayens, les jumeaux Romero, s’envolent pour l’Argentine et le club de Boca Juniors. Pendant une semaine, Óscar et Ángel s’entraînent avec les jeunes des Xeneizes. Les dirigeants du club argentin n’hésitent pas et décident de les recruter. Le rendez-vous est fixé : les deux jeunes seront présents pour la pré-saison. Les contrats sont prêts, mais une signature manque. Celle du père des joueurs. Qui a abandonné sa famille lors de la naissance des jumeaux. La suite est racontée par Óscar Romero, dans les colonnes d’El Gráfico : « Ils exigeaient la signature de mon père. Mais on a été élevés sans lui, on ne sait pas ce que c’est d’avoir un père. On l’a cherché pendant longtemps, mais on ne l’a pas trouvé. On n’a pas pu signer à Boca à cause de ça. La même chose à San Lorenzo. » Dès le retour au Paraguay, les jumeaux intègrent le club de Cerro Porteño, où ils commencent leur formation. C’est ainsi que Boca Juniors et San Lorenzo ont manqué Óscar et Ángel Romero, qui font respectivement le bonheur du Racing et de Corinthians aujourd’hui. Et celui de la sélection paraguayenne, qui rêve de voir la Russie.
Vingt minutes pour convaincre
L’étape argentine est oubliée. Óscar et Ángel Romero débarquent à Cerro Porteño en mars 2008. Hernán Acuña, entraîne la catégorie des moins de dix-sept ans à l’époque. Il raconte l’arrivée des deux cracks : « Ils avaient seize ans. Partout où ils allaient, il y avait Adolfino Cañete. C’est un ancien joueur, qui a notamment participé au Mondial au Mexique avec le Paraguay. Il s’est reconverti et cherche dans tout le pays les futurs grands joueurs pour les intégrer à son académie. Cañete a énormément de contacts et c’est grâce à lui que les jumeaux ont fait des essais en Argentine. Ensuite, il a tout fait pour leur trouver un grand club au Paraguay. » Et d’ajouter : « Ils ont fait vingt minutes d’entraînement le premier jour. Je suis allé voir le responsable de la formation de l’époque – Blas Cristaldo, aujourd’hui adjoint du sélectionneur paraguayen – et je lui ai dit de les faire signer de suite. En deux jours, l’affaire était conclue. » Les deux se baladent dans les catégories de jeunes, gagnent quelques titres et intègrent le groupe professionnel en 2011. Acuña, qui les a suivis durant leur formation, présente les deux profils : « Óscar est gaucher, et quand il est arrivé au club, il a annoncé qu’il était meneur de jeu. Son frère Ángel est un vrai buteur. Aujourd’hui, le football sud-américain a perdu de son essence. Et quand tu vois jouer Óscar, il ressemble à ces joueurs qui peuvent jouer sur une aile ou dans l’axe, tant que tu leur donnes la balle dans les pieds. Angel est moins technique, mais excellent devant le but. »
Après deux titres avec le club de la capitale paraguayenne, Ángel rejoint Corinthians lors de l’été 2014. Son frère fait ses valises pour l’Argentine et enfile le maillot de Racing.
Le duo se reforme en sélection
Les jumeaux inséparables, tant sur le terrain qu’en dehors, empruntent donc des chemins différents. Un moment qu’Hernán Acuña redoutait : « On ne peut rien faire quand deux grands clubs du continent frappent à notre porte pour de tels joueurs. » Il se souvient de leur relation à l’époque de la formation : « Non seulement ils sont jumeaux, mais en plus ils se cherchaient énormément sur le terrain. Même trop parfois, et je leur reprochais. C’était une situation particulière. Il suffisait qu’un des deux soit sur le banc pour que l’autre joue mal ou se comporte moins bien sur le terrain. Avant chaque entraînement, à l’époque où il n’avait pas gagné sa place, Ángel venait me voir pour me demander de le mettre titulaire. Le lendemain, il m’envoyait son frère pour négocier. » Alors qu’ils ont failli rejoindre le Real Madrid en 2013, les frères Romero (vingt-quatre ans) sont aujourd’hui suivis par de nombreux clubs du Vieux Continent. Avec la sélection paraguayenne, les deux se sont imposés depuis l’arrivée du nouveau sélectionneur, Francisco Arce. Pour Hernán Acuña, « ils doivent être titulaires indiscutables en sélection » . « Ces gamins amènent quelque chose de différent. Aujourd’hui, ils sont prêts pour l’Europe » , conclut-il. Ça tombe bien, le Paraguay, qui n’a pas vu le Brésil en 2014, compte bien débarquer en Russie dans deux ans.
Par Ruben Curiel
Propos de Hernan Acuña recueillis par RC.