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Romain Stevenon : « Le transfert de Cvitanich est le fruit d’un travail collectif »
Il y a peu, Romain Stevenon est devenu le super stagiaire après que son blase est parvenu en une des journaux pour avoir fait découvrir Dario Cvitanich à l'OGC Nice. Sauf que l'histoire n'est pas aussi simple. Et surtout beaucoup plus collective.
Romain, quel était ton rôle au sein du club niçois ?Je suis titulaire d’un Master en droit du sport et management du sport. J’avais déjà fait un stage au sein du club de Nice durant mes études. Je voulais intégrer la cellule recrutement et j’ai tout naturellement envoyé une lettre de motivation à Oliver Echouafni durant l’été 2011. À cette époque, il s’occupait du recrutement. Il m’a donné ma chance et j’ai commencé à faire des petits rapports de matchs et de joueurs. Essentiellement sur DVD. Je me suis intégré au sein de la structure qui comprenait Éric Roy – Directeur sportif -, Serge Recordier et Jean-Philippe Mattio. Des anciens pros. La cellule fonctionnait très bien, j’ai pris le train en route en m’appuyant sur les choses déjà en place : poursuivre le suivi des joueurs, faire remonter les dossiers, etc. On regardait de nombreux championnats : Amérique du Sud, pays de l’Est, Scandinavie. On ne recherche pas un profil en particulier.
Et là, arrive le cas Dario Cvitanich. La cellule recrutement le connaissait de nom. Serge et Jean-Philippe le pistaient depuis l’époque où il jouait à Banfield, bien avant son transfert à l’Ajax Amsterdam. Ils avaient commandé deux vidéos report mais avaient cessé de le suivre après son départ pour la Hollande pour 7 millions d’euros. Donc là, je regarde un match de Boca en février 2012 et je le trouve intéressant. J’en parle à Serge, qui est dans le même bureau, et qui me confirme que la cellule le connaissait de nom. Dès lors, on s’est tous mis à regarder ses matchs suivants. Mais pas que moi, toute la cellule. On était dans l’échange perpétuel. Éric Roy est même parti le voir en Argentine. On a dû regarder une quinzaine de matchs de lui. On était tous unanimes sur la qualité du joueur. Il était fort dos au but, solide sur ses appuis, bon dans les remises, dans les déplacements dans la surface. La valeur collective du joueur était évidente. Et puis il avait des stats. Alors oui, il s’était un peu raté aux Pays-Bas mais on s’est tous fiés à ce qu’il nous montrait sur le terrain. Il avait des vraies qualités. La cellule limitait le risque en pariant sur lui.
Pourquoi avoir mis autant de temps à le recruter ?Observer un joueur demande du temps. Tu dois faire des rapports, le suivre sur une période donnée. Ensuite, le club a changé de staff et d’entraîneur. La cellule recrutement a proposé quelques joueurs à Claude Puel dont Dario. La suite n’appartient plus au recrutement mais à l’administratif, qui se charge de négocier les transferts. J’ai terminé mon contrat fin juillet, à cette époque, Cvitanich n’avait pas encore signé.
Et ta réaction quand il signe ?J’étais très content car c’était un joueur que l’on souhaitait, que l’on avait observé tous ensemble. C’est un vrai travail collectif. On pointe souvent du doigt les erreurs des cellules de recrutement mais quand tu vois le boulot effectué par celle de Nice, et notamment Mattio et Recordier, tu ne peux qu’être admiratif. Par exemple, Éric Bauthéac est suivi depuis ses débuts à Cannes. Romain Genevois, ça remonte à Gueugnon. Il faut laisser mûrir le joueur, c’est un travail fastidieux mais hyper important. Et quand on te dit que le club n’a pas trop de moyens pour recruter, tu te dois d’être encore plus solide. Alors quand Jean-Philippe et Serge arrivent à te dénicher Delle, Genevois et Bauthéac en fin de contrat, c’est un travail exceptionnel.
« Être recruteur au PSG, ça ne sert à rien actuellement »
Pourquoi ne pas être resté au sein de la cellule ?Mon contrat s’est terminé. Serge et Jean-Philippe ont œuvré pour que je reste mais je n’ai pas été conservé. Je n’ai pas eu plus d’explications. C’est mon club de cœur, j’avais très envie de rester. Surtout, bosser avec Serge et Jean-Philippe, c’est du bonheur. Ces mecs sont au top dans leur boulot. C’est un régal d’apprendre les ficelles du métier aux côtés des meilleurs. J’ai eu des pistes pour bosser depuis juillet, surtout avec des agents de joueurs mais ça ne m’intéresse pas trop. J’ai la fibre sportive, pas commerciale. J’ai envie de bosser pour un club. J’ai une petite centaine de joueurs dans mes dossiers qui évoluent en Pologne, Scandinavie etc. C’est ma carte de visite en somme. Il faut savoir qu’un joueur n’est jamais la découverte de quelqu’un. S’il joue déjà dans un club, c’est qu’il a déjà été supervisé. Il faut juste garder un œil ouvert sur lui. Ensuite, c’est le travail collectif. On a tous nos critères de sélection. C’est dans l’échange, notamment avec les plus anciens, qu’un rapport de qualité se fait.
Et la cellule de Nice, peut-on dire qu’elle est de qualité ?Quand tu prends le cas Loïc Rémy, qui vient pour ensuite le revendre deux fois plus cher, c’est que tu avais vu juste. Idem pour Mounier ou Koulibaly, qui est passé par la Thaïlande. Sans parler de Digard, Civelli ou encore Pejčinović, qui évoluait en D2 allemande. C’est là que tu vois le boulot des mecs comme Serge et Jean-Philippe. On devrait plus souvent mettre en avant les réussites. Être recruteur au PSG, ça ne sert à rien actuellement. Les CV arrivent de partout. Lucas Moura, ce n’est ni une découverte ni un pari. Je sais qu’à un moment donné, Nice suivait Alexandre Büttner, le latéral gauche qui a signé à Manchester United pour 1,5 million d’euros. Le club était dessus mais parfois, il faut batailler avec des gros poissons. À Nice, la cellule avait remarqué les Hoarau et Hamouma à Gueugnon, les Corgnet à Dijon, Koscielny ou Giroud à Tours. Ensuite, il faut gagner la bataille financière et ce n’est pas toujours facile.
Tu l’as croisé, Dario Cvitanich ?Même pas. Et je n’ai pas son maillot non plus.
propos recueillis par Mathieu Faure