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Mourinho-Alonso, le maître contre le maestro
Dans un duel inédit en demi-finales de Ligue Europa entre la Roma et le Bayer Leverkusen, José Mourinho et Xabi Alonso se retrouvent après trois saisons passées ensemble au Real Madrid il y a plus de dix ans (2010-2013). L’accomplissement d’une prophétie du Mou’ qui a toujours perçu le Maestro basque comme un futur maître du banc de touche.
D’un côté le maître, José Mourinho, 60 ans, et tenant du titre de la Ligue Europa Conférence avec son équipe de la Roma. De l’autre l’élève, Xabi Alonso, 41 ans, et entraîneur du Bayer Leverkusen depuis un peu plus de sept mois. En jeu ? Une finale de Ligue Europa. Mais aussi des retrouvailles un peu particulières pour les deux hommes. Au Real Madrid, Xabi Alonso a disputé 151 matchs toutes compétitions confondues sous les ordres du Mou’ entre 2010 et 2013, étant titulaire dans plus de 90% des rencontres. Ensemble, ils ont remporté la Liga, la Coupe du Roi et la Supercoupe d’Espagne. Trois saisons durant lesquelles le milieu de terrain basque a été le pendant du coach portugais sur le terrain, toujours à faire les allers-retours entre le pré et le banc de touche pour distiller les conseils tactiques du Special One à ses coéquipiers. Alors forcément, ce duel contre le néocoach espagnol, José Mourinho l’avait un peu vu venir.
Prophétie auto-réalisatrice
« C’est un homme, pas un garçon. C’est un grand joueur. Je lui ai déjà dit en plaisantant que comme je vais entraîner pendant encore 30 ans, nous nous rencontrerons tous les deux en tant qu’entraîneurs », avait déjà prévenu l’actuel entraîneur de l’AS Rome en 2011 lors d’une conférence de presse. Une prophétie qu’il a réitérée des années plus tard, alors que Xabi Alonso venait de passer ses diplômes d’entraîneur et démarrait dans le grand bain, après un passage chez les U13 du Real Madrid, en prenant la tête de la Real Sociedad B, en Segunda B (troisième division espagnole).
« Ce que je dirais de Xabi Alonso ? Son père était également joueur et entraîneur, il a donc grandi de la même manière que moi. Il est ensuite devenu joueur, bien meilleur que moi, bien sûr. Sa position sur le terrain lui permettait d’avoir une très bonne connaissance du jeu. Il a joué en Espagne, en Angleterre et en Allemagne. Il a été entraîné par Guardiola au Bayern, par moi-même au Real Madrid, par Ancelotti à Madrid, par Benitez à Liverpool. Si vous mettez tout cela ensemble, je pense que Xabi a toutes les conditions pour devenir un très bon entraîneur », confirmait en novembre 2019 José Mourinho dans une interview donnée à la chaîne YouTube Top Eleven.
Jose never misses, now we’re gonna see Xabi Alonso vs Jose Mourinho in the semis.pic.twitter.com/glO3czZLOA
— Dr Yash (@YashRMFC) April 20, 2023
Quatre ans plus tard, Xabi Alonso peut effectivement se targuer d’être « un très bon entraîneur », respectant ainsi la prédiction du Mou’, et affrontera donc son ancien boss sur la pelouse du stade olympique de Rome en demi-finales de Ligue Europa. Arrivé dans la banlieue de Cologne en octobre dernier, alors que le Bayer occupait la 17e place du classement de la Bundesliga, Xabi Alonso avait hérité d’une équipe intéressante, mais mal en point mentalement et qui avait besoin de voir autre chose. Une première expérience dans une équipe du top 5 européen qui a démarré sur une série de six matchs sans victoire, avant de profiter de la trêve du Mondial pour faire ingurgiter les concepts tactiques à ses zouaves. À l’instar du Real Madrid de Mourinho, le Leverkusen d’Alonso repose en partie sur ses qualités défensives et sa faculté à contre-attaquer. Aujourd’hui sixièmes de Bundesliga, les résidents de la BayArena viennent de mettre fin à une série de 14 matchs sans défaite, s’inclinant dans le derby face à Cologne 1-2 ce vendredi. Un échec pas vraiment inquiétant pour l’ancien de la Casa Blanca. « J’ai toujours dit que nous avions de la qualité, mais que la tête était plus importante. En ce moment, nous avons un bon mélange de qualité et de mentalité. C’est ainsi que nous en sommes arrivés là », rappelait-il juste avant, reprenant ainsi le prisme de la mentality, si chère à son formateur d’antan.
Inspiration et flagornerie
« J’ai eu l’occasion de travailler avec différents entraîneurs, mais José a quelque chose d’un peu différent, se rappelait-il en 2014 dans une interview pour le Daily Mail. La façon dont il transmet et communique avec les joueurs est différente, tout comme sa façon d’être en empathie avec nous. Les joueurs croient en lui – vous voulez jouer et vous battre sur le terrain pour lui. » Une façon de faire qui, reconnaît-il dans une interview pour Coaches Voice en 2019, a influencé son style de jeu en tant qu’entraîneur : « Mourinho est l’un des plus grands entraîneurs que j’ai jamais eus. Il se distingue par sa capacité à lire les matchs, sa stratégie et sa capacité à réagir lorsque le jeu a besoin d’un changement. »
Dernière équipe allemande en Coupe d’Europe, le Bayer Leverkusen de Xabi Alonso a même été approuvé par son maître en conférence de presse. « Son Bayer Leverkusen est l’équipe que j’ai vue jouer le mieux en contre-attaque en Europe cette année », valide José Mourinho, qui rappelle avoir toujours eu « une relation fantastique » avec son prochain adversaire. « Que Xabi aime un jeu différent (du sien) est une autre chose, mais il démontre au moins une qualité qui est importante pour moi, c’est-à-dire le pragmatisme de jouer d’une manière qui convient aux qualités de ses joueurs. Il a cinq ou six joueurs qui peuvent rivaliser avec Marcell Jacobs sur 100 mètres, qui savent aussi bien défendre que se projeter en contre-attaque ensuite. » L’élève dépassera-t-il un jour le maître ?
par Anna Carreau