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Rodrigo de Paul, l’âme de l’Argentine
Joueur majeur de l'Albiceleste depuis le succès en Copa América voilà un an et demi, Rodrigo de Paul s'est imposé comme un symbole de cette sélection. Proche de Lionel Messi, milieu de terrain infatigable et guerrier jamais rassasié, le Colchonero jouera forcément un rôle de premier plan face à l'équipe de France.
« Je pense au Mondial tous les jours. Ce sera le dernier de Leo. On va tout faire pour le rendre heureux et transmettre ce bonheur à tous les foyers du pays. » En juin dernier, déjà, Rodrigo de Paul confiait à TycSports l’immense impatience qui gagnait le pays à l’approche de la Coupe du monde. La dernière chance pour le peuple de Diego Maradona de voir lui succéder une Pulga jamais en réussite dans le tournoi. De longs mois plus tard, le milieu de terrain de l’Atlético de Madrid et sa bande se présentent face à la dernière marche de cette quête d’une vie. Un match pour entrer dans la légende et écrire l’histoire, dans lequel l’Albiceleste ne pourra pas faire sans un grand De Paul.
Un homme pour recommencer à rêver
Pour comprendre l’importance prise par le natif de Sarandí au sein de l’équipe nationale, il faut remonter quelques années en arrière. Nommé sélectionneur dans la foulée du Mondial russe, Lionel Scaloni ne semble pas avoir l’étoffe nécessaire et subit un feu nourri de railleries. « Au début, il y avait de la méfiance. Envers nous, envers le staff, c’était assez difficile, rejouait récemment De Paul pour Telefe. Avant le début de la Copa América(2019, NDLR), nous allions dîner et éteignions la télévision. Nous en sommes arrivés là parce que c’était assez difficile, nous avions l’impression qu’il y avait des gens qui voulaient que l’équipe nationale échoue. » Battue par le Brésil, l’Argentine se rassure malgré tout, et De Paul en profite pour s’imposer comme une valeur sûre de l’équipe, en même temps que Scaloni. « Désormais, il peut nous convaincre de ce qu’il veut. S’il est 10 heures du matin et qu’il dit « bonne nuit », alors c’est la nuit pour nous », poursuit l’intéressé pour illustrer la confiance des joueurs en leur coach.
Alors encore joueur de l’Udinese, le n°7 bleu ciel et blanc devient peu à peu l’un des essieux les plus importants de la Scaloneta. Un statut renforcé deux ans plus tard, toujours chez le grand voisin aux cinq étoiles. À la différence que cette fois, cette équipe d’Argentine est arrivée à maturité et met fin à vingt-huit ans de disette, dans le sillage d’un De Paul excellent en finale. La saison dernière, l’ancien joueur et consultant Diego Latorre disait de lui sur ESPN : « Il est le système nerveux. Un footballeur qui synthétise tout ce que Scaloni veut de l’équipe au niveau de l’agressivité et cette volonté frénétique de récupérer le ballon. » Un homme qui symbolise l’espoir nouveau célébré par les milliers de hinchas présents à Doha, à chaque reprise du tube « Muchachos ».
MuchachosAhora nos volvimo’ a ilusionar Quiero ganar la terceraQuiero ser campeón Mundial pic.twitter.com/iGniCxuhqS
— FÚTBOL ARGENTINO ?? (@TodaLaPrimeraA) December 5, 2022
Un garçon capable de s’en prendre à ses propres coéquipiers Juan Foyth et Giovani Lo Celso – dont il tente comme il peut de compenser l’absence avec un peu de créativité – lors d’un récent Atlético-Villarreal. Ce qui lui vaudra un appel courroucé de Scaloni pour calmer les choses. Il faut dire que de caractère, De Paul n’en manque pas. « J’ai toujours apprécié avoir un rôle important, confiait-il à Rolling Stones avant le tournoi. C’est la personnalité qui m’a permis d’arriver là où je suis. Je n’ai pas peur du contexte. J’ai une grande confiance en mes capacités. Dans les moments délicats, je préfère prendre le ballon et absorber la pression, mais pas parce que je pense que mes coéquipiers n’en sont pas capables. C’est plus une question d’instinct, c’est ce qui sort de moi, ce qui se passe en moi. C’est comme ça que j’ai agi toute ma vie, sur et en dehors du terrain. »
Joue-la pour Messi
Sur le rectangle vert justement, le tournoi de Rodrigo de Paul laisse de nombreux observateurs de l’Argentine sur leur faim. Tenu comme l’un des premiers responsables du coup de froid contre l’Arabie saoudite, le bonhomme reste le seul membre de l’entrejeu à n’avoir jamais quitté sa place depuis. Qu’il soit associé à Enzo Fernández, Leandro Paredes, Alexis Mac Allister ou Guido Rodríguez au milieu de terrain, son abattage et ses projections vers l’avant pour compenser le manque de poids en l’absence de Di María en font un élément indispensable. « Les gens veulent que l’Argentine gagne la Coupe du monde, mais ils veulent surtout voir gagner Leo. Et ce n’est pas seulement en Argentine, mais aussi dans d’autres parties du monde, avouait-il encore dans Rolling Stones. Leo a déjà laissé un héritage très important dans l’équipe nationale, c’est le plus important. Tout ce qu’il a engendré pour le football argentin entrera dans l’histoire, il n’a besoin de rien d’autre pour le réaffirmer. Mais nous devons l’aider à gagner cette Coupe du monde, tout simplement parce que ce serait quelque chose de largement mérité. C’est ce que nous voulons tous, nous qui aimons le football, n’est-ce pas ? »
Orpheline de Javier Mascherano, l’Argentine s’est enfin fait greffer un nouveau poumon pour s’enivrer à nouveau de grandes bouffées d’air frais. Face aux Bleus et à leur flanc gauche à la fois force offensive et talon d’Achille défensif, Rodrigo de Paul pourrait bien être l’une des clés de cette finale indécise. Surtout si Ángel Di María n’est pas en mesure de tenir sa place et doit renoncer à la deuxième finale mondiale de sa carrière. Après quelques pépins physiques venus perturber sa phase finale, agaçant au passage Lionel Scaloni, conscient de la difficulté de se passer de lui, l’ancien Valencien est prêt à en découdre. Et ne rêve de rien d’autre que d’un énième maté en compagnie de son ami Messi. Mais cette fois-ci, après lui avoir offert la gloire éternelle.
Tom Binet